Pour la première fois en Tunisie, un formulaire en ligne destiné au recensement des victimes des fautes médicales a été lancé. C’est ce qu’a annoncé le président de l’Association tunisienne pour le soutien des victimes des fautes médicales, Me Saber Ben Ammar, dont l’objectif est de “recenser le nombre exact des victimes des fautes médicales enregistré chaque jour et de là, parvenir à créer un Fonds national pour l’indemnisation des victimes”.
Désormais, il est du droit de chaque personne lésée ou un des membres de sa famille de remplir le formulaire en ligne en procédant à la saisie des données personnelles de la victime et d’un résumé de la nature du dommage causé et de l’erreur médicale commise ainsi que l’identité de la partie qui en est coupable, qu’elle soit personne morale (établissement public ou privé de santé) ou personne physique (médecin, infirmier, sage-femme…)
Depuis son entrée en activité le 6 octobre 2015, l’association est déjà parvenue à recenser 460 cas de victimes de fautes médicales, souligne Me Ben Ammar.
L’Association vise à travers cette campagne à mettre en place une base de données précise retraçant le nombre de victimes des fautes médicales en Tunisie. Une telle base de données servira à dresser un état des lieux de la situation, de soumettre les autorités officielles à l’obligation d’assumer leur pleine et entière responsabilité en matière de contrôle du secteur public et privé, et partant de prendre les mesures nécessaires à cet effet, selon le président de l’Association.
Me Ben Ammar a dénoncé, à ce propos, le black-out imposé par les autorités officielles sur ce dossier ainsi que l’attitude affiché par certains établissements de santé qui s’acharnent à nier l’existence de ces erreurs afin d’échapper aux poursuites judiciaires, et partant réparer les victimes.
Selon le président de l’Association, les statistiques dont dispose l’association montrent que près de 76% des fautes médicales sont commises dans les établissements publics de santé, 16% dans les cliniques privées et 8% résultant de fautes personnelles commises par des médecins et des infirmiers.
Evoquant la nature des fautes médicales les plus fréquentes, le président de l’association a indiqué qu’elles se répartissent comme suit : les fautes commises lors des opérations chirurgicales (38,5%), celles qualifiées de fautes de service (19,2%) et enfin les erreurs de diagnostic (15,4%). Tunis vient en tête des gouvernorats qui enregistre le nombre le plus élevé de fautes médicales, suivi des gouvernorats de Sousse et de Mahdia.
Ben Ammar a réitéré son appel aux autorités concernés et aux composantes de la société civile à soutenir les efforts de l’association visant à créer un Fonds national pour l’indemnisation systématique des fautes médicales.
Il importe dans ce contexte, a-t-il suggéré, de réviser le code de la déontologie médicale, soulignant que son association oeuvre à mettre en place un code de la santé publique en Tunisie fixant les droits et les obligations du médecin et du malade et comprenant l’indemnisation systématique des victimes des fautes médicales.
Il a également plaidé en faveur de la création de chambres ad hoc au sein des tribunaux habilitées à statuer sur les fautes médicales, dès lors que les affaires civiles intentées contre les médecins et les cliniques privées font recours souvent à un expert dont l’avis n’est pas contraignant pour le tribunal saisi.
Le dossier des fautes médicales ne cesse de retenir l’attention de l’opinion publique et des médias. Selon les médias tunisiens le nombre des fautes médicales a nettement augmenté au cours des dernières années, entraînant le décès du patient ou son incapacité permanente. La dernière en date est celle d’un bébé de 14 mois admis dans une clinique aux berges du Lac et soumis à un examen par résonance magnétique. Sa maman a déclaré aux médias que l’acte médical a tourné au drame puisqu’il a engendré la cécité et la paralysie de son enfant.