Une trentaine d’années après le bras de fer perdu par l’ancien Premier ministre, Hédi Nouira, face aux médecins à qui il avait voulu appliquer le système des ordonnances numérotées dans les années 80, le ministère des Finances s’apprête à livrer une bataille similaire avec les professions libérales dont certains membres sont soupçonnés de fraude fiscale.
Et comme le donne à penser l’initiative qu’ils ont prise en juillet 2014, de créer une Union tunisienne des professions libérales (UTPL) –regroupant avocats, médecins, dentistes, ingénieurs, architectes, experts-comptables et comptables- à la veille de la discussion de la loi de finances dans laquelle devaient être insérées des dispositions visant à «encadrer» de plus près la fiscalité de ces corps de métiers, ceux-ci ne vont certainement se plier facilement à la volonté des autorités.
D’abord, la méthode douce…
Mais les professions libérales ne sont pas les seules dans le collimateur du ministère des Finances. Car, comme il l’a indiqué lors de la présentation de la loi de finances 2016, Slim Chaker (le ministre des Finances) déclare également la guerre à bien d’autres formes de fraudes fiscales. Comme celles commises par certains acquéreurs de biens immobiliers ou fonciers et qui leur permet d’éviter les 6% de frais d’enregistrement dus.
Pour réduire l’ampleur progressivement de ces fraudes, le ministère des Finances compte d’abord se donner les moyens de les détecter. C’est pour cette raison que ce département va se doter d’un système d’information moderne et plus efficient que l’actuel et que des passerelles vont notamment être aménagées entre les différentes bases de données de l’Etat pour éviter le cloisonnement de l’information.
Notre grand argentier table également, du moins au début, sur une approche «douce» basée sur le dialogue, car il sait que le comportent en général, et le comportement fiscal en particulier, sont parmi les choses les plus difficiles à changer. En somme, c’est bien une véritable révolution que M. Chaker a en tête de réaliser.
… et ses mesures d’accompagnement
Mais pour qu’elle ait le plus de chance de passer, le ministre des Finances propose une sorte de deal: la «vérité» dans l’acquittement du devoir fiscal en échange d’une plus grande souplesse et d’un meilleur comportement également de la part de l’administration.
Parmi les assouplissements et les garanties envisagés ou déjà décidés, la création du statut d’«opérateur économique agréé» pour éviter aux petites et moyennes entreprises les lourdeurs du contrôle douanier.
Deuxième mesure, un «encadrement des cas de refus de la comptabilité en cas de contrôle approfondi».
Troisième disposition allant dans le même sens, la réduction du taux de la taxation d’office de 20 à 10% pour permettre aux entreprises de disposer de cash. De même et dans le même but, la retenue sur la TVA pour les sociétés travaillant avec l’Etat va passer de 50 à 20%.
Last but not least, le ministère des Finances envisage de mettre sur la table un projet de «Code de déontologie» avec le secteur privé pour, selon le mot de Slim Chaker, «définir les droits et obligations de chacun».
La révolution fiscale aura-t-elle alors lieu? Wait and see.