Selon le ministre de l’Education, Néji Jalloul, la situation actuelle de l’école tunisienne pousse au désespoir et au pessimisme. “On s’approche, aujourd’hui, du cap d’un million de jeunes désespérés de leurs vie”, a-t-il dit, à l’ouverture d’un colloque national sur la lutte contre l’échec scolaire et l’abandon scolaire précoce qui se tient du 11 au 13 novembre 2015 à Tabarka.
Les chiffres sur le décrochage scolaire font honte dans un pays où l’enseignement est obligatoire, regrette-t-il, avant le 100.000 élèves dont 6.000 du cycle primaire ayant abandonné cette année l’école.
Jalloul souligne que la campagne “l’école renoue avec ses enfants” constitue une mesure concrète pour lutter contre l’échec scolaire, mettant l’accent sur la nécessité d’associer toutes les parties concernées à cet effort pour arrêter cette hémorragie qui coûte cher à l’Etat.
Selon les chiffres fournis par le ministère de l’Education nationale, 360.000 enfants âgés entre 6 et 18 ans ne sont pas scolarisés. 60% des élèves scolarisés abandonnent volontairement l’école contre 40% renvoyés suite à l’application de la loi.
Par ailleurs, Néji Jalloul dénonce l’absentéisme des enseignants qui, a-t-il dit, constitue un phénomène inquiétant, faisant savoir que son département ne fera pas de recrutement avant le traitement du dossier des enseignants qui sont en état d’exercice mais, en réalité, ne travaillent pas.
Il annonce qu’un projet de loi sur la réouverture des écoles de formation des instituteurs sera prochainement publié, mettant l’accent sur la nécessité de recruter des instituteurs dotés de la compétence scientifique et morale et maîtrisant parfaitement la langue d’enseignement.
Jalloul admet également qu’il ne peut y avoir de rendement des instituteurs sans l’amélioration de leur situation financière. Il est inadmissible, a-t-il dit, de voir celui qui oeuvre à créer l’intelligence croupir au bas de l’échelle de la rémunération de la fonction publique.
De son côté, la représentante de l’UNICEF à Tunis, Lila Pieters, s’est dit “choquée” du chiffre relatif à l’abandon scolaire en Tunisie, soulignant que le phénomène de l’interruption scolaire expose cette catégorie à de nombreux dangers, dont la marginalisation sociale et la déviance. “Trois mois après mon arrivée en Tunisie, j’ai relevé une volonté sincère qui anime le ministère de l’Education à faire face à ce phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans le monde”, a-t-elle déclaré.
Plus de 58 millions d’enfants abandonnent leurs écoles chaque année dans le monde, selon les statistiques de l’UNICEF. Il s’agit d’un chiffre qui nous appelle à lancer “un cri de détresse”, a regretté la responsable onusienne, faisant remarquer que l’interruption scolaire est un phénomène qui menace la sécurité et la stabilité du monde entier.
Quant au directeur des études, de la planification et des systèmes d’information relevant du ministère de l’Education, Bouzid Nciri, il a indiqué que pour la première fois depuis sa création, le ministère de l’Education a procédé à la collecte des noms et des adresses des élèves qui ont interrompu leurs études. Et qu’avant 2010, l’interruption scolaire faisait partie des sujets tabous, soulignant que cette année le ministère s’est penché sur la “décomposition” du phénomène et l’identification de ses origines de manière à permettre aux élèves ayant interrompu leurs études de renouer avec leurs écoles. Un numéro vert sera mis à la disposition du public en vue de permettre aux élèves ayant interrompu leurs études de recouvrer leur droit à l’enseignement, a-t-il annoncé, soulignant qu’il s’agit là d’une responsabilité partagée qui incombe à tous les acteurs sans exclusive.
Organisée par le ministère de l’Education et l’UNICEF, le colloque national sur la lutte contre l’échec scolaire et l’abandon scolaire précoce se penchera sur l’élaboration d’une stratégie nationale dans ce domaine.