La Russie a été l’invitée d’honneur du 12ème Salon international de l’agriculture, du machinisme agricole et de la pêche (Siamap). Les Tunisiens en ont-ils profité pour tisser des liens commerciaux qui leur permettent de s’imposer sur un marché de près de 150 millions d’habitants? Peu probable. A voir ce qui vient de se passer juste après la crise turco-russe, on est en droit de se le demander.
Après l’embargo imposé par l’Europe à la Russie à cause de la crise ukrainienne et, tout récemment, presque la rupture des relations économiques avec l’un de ses plus grands partenaires, à savoir la Turquie, on se demande sur quelle planète vivent nos décideurs publics. La Russie s’est toujours montrée intéressée par le développement des échanges commerciaux avec notre pays, pourtant les nôtres ne se montrent pas empressés de conquérir un marché en pleine effervescence malgré sa crise actuelle que Ali Goutali, notre ambassadeur sur place considère comme conjoncturelle. M. Goutali a assuré lors d’un colloque organisé à Tunis au mois d’août 2015 que la relance économique de la Russie ne dépassera pas l’an 2016, c’est-à-dire aujourd’hui.
Suite à la crise avec la Turquie, la Russie a fait appel au Maroc, à l’Egypte et à Israël pour l’approvisionner en produits agricoles et agroalimentaires.
A la question “pourquoi la Tunisie ne fait pas partie des pays fournisseurs de la Russie“, la réponse a été simplement: «Nous n’avons aucune information sur le potentiel tunisien en la matière».
La Tunisie pèche par une absence de visibilité et d’agressivité commerciale. Dans un pays où les produits agricoles ne trouvent pas preneurs surtout après la débâcle touristique, on se demande à quoi cela sert d’avoir un ministère de Commerce censé avoir une unité de veille pour l’informer sur les opportunités à l’international pour écouler nos produits.
«La Tunisie peut exporter l’huile d’olive, les fruits, le poisson et le fromage. Ces produits sont actuellement absents du marché russe depuis l’embargo en vigueur à cause du conflit en Ukraine», a avait indiqué M. Goutali. Il est approuvé par Khalil Louati, le jeune président de la Chambre tuniso-russe pour le commerce, l’industrie et le tourisme (CTRCIT), en 2015, qui précise que «les exportations tunisiennes vers la Russie s’élèvent à 50 MDT alors que ses importations sont estimées à un 1,9 MD.
Aujourd’hui, M. Louati milite pour la création d’une centrale de collecte et d’exportation en Tunisie pour aider les agriculteurs tunisiens à exporter leurs produits à moindre coût sur le marché russe. M. Louati a déjà eu un accord de principe de la part de la PDG de Tunisair pour ce qui est de mettre à la disposition des opérateurs 3 avions cargos qui assureront le transport des produits agricoles frais.
Pour ce qui est de l’agroalimentaire, la certification des experts russes est nécessaire. «Elle n’est cependant pas difficile à obtenir à condition qu’il y ait du répondant du coté tunisien», précise le président de la CTRCIT.
Il va encore plus loin dans ses projets pour la consolidation des relations économiques entre la Tunisie et la Russie en annonçant son intention d’amener un million de Russes en Tunisie en 2016. «Vous savez, nous ne faisons pas de grands efforts pour susciter l’intérêt des Russes à notre destination, pourtant, 300.000 Russes viennent chaque année dans notre pays. 3 millions se rendent en Egypte et 4,5 millions en Turquie. Sommes-nous donc incapables d’attirer tout juste un million de Russes ? Des touristes qui sont dépensiers, bons vivants et qui ne sont pas frileux. Ils adorent les îles, et donc Djerba pourrait être le lieu idéal pour eux et en plus facilement sécurisé».
Une banque tuniso-russe à laquelle seront associés des Algériens et des Libyens pourrait bien booster les relations commerciales et rassurer importateurs et exportateurs, pour ce, il faudrait augmenter le volume des échanges entre la Tunisie et la Russie, suggère M. Louati.
Pour développer les relations tuniso-russes, il va falloir que les Tunisiens s’investissent au niveau de la diplomatie économique et expriment clairement leurs intérêts pour la Russie.
La réactivité, l’agressivité commerciale, ou encore la diplomatie économique restent des termes qui ne se conjuguent pas en tunisien!