Plus de 60 exposants ont couvert un des pavillons du palais des expositions du Kram, de tapis traditionnels dans une tentative d’attirer l’attention d’un client tunisien amateur du tapis traditionnel ou même d’un étranger qui n’a pas hésité à visiter la Tunisie malgré la conjoncture difficile.
En dépit de la hausse des coûts de location des espaces d’exposition et le recul des ventes à cause de l’afflux modeste de visiteurs, les exposants ambitionnent de relancer leurs affaires qui ont stagné après les attentats terroristes perpétrés contre le musée du Bardo (mars 2015) et à Sousse (juin 2015).
La fabrication de tapis et des tissages ras a connu son heure de gloire avant 2010 grâce à l’afflux touristique et au rôle de l’Etat qui supervisait la commercialisation de ce produit. Malgré la concurrence extérieure et le recul du secteur touristique, le tapis tunisien a généré des recettes de près de 643.000 dinars.
Les parties intervenantes, comme que le ministère du Tourisme et de l’Artisanat et l’Office national de l’artisanat (ONA), tentent de soutenir le secteur à travers l’organisation de foires et le renforcement du rôle de plusieurs structures, à l’égard du Centre technique de l’industrie du tapis.
L’ONA a encouragé les efforts de ces exposants pendant plus d’une semaine (du 18 au 27 décembre 2015), à travers une foire de tapis dans un pays qui fabrique plus de 83.000 mètres cubes de tissages ras et de fibres végétales.
Cette manifestation, organisée sur le thème “le tissage du Gtif” (textile utilisé dans la fabrication de tapis pour tentes bédouines), a regroupé des artisans venus des différentes régions spécialisées dans le tissage ras et les fibres végétales. Le Gtif, fabriqué à partir de poils de chèvres, de chameaux et de laine de moutons, se distingue par ses couleurs vifs et étincelantes. Il est utilisé pour la fabrication de tapis, Klim, Margoum, outre les tapis muraux.
La créativité naît de la crise
Abdelmoneem Dabboussi, artisan originaire de la région de Kairouan (la plus importante région de fabrication de tapis) qui a remporté, en 2014, le deuxième prix national de fibres végétales, a indiqué qu’il est propriétaire de 900 pièces tissées. Nombre de ces pièces constituent l’héritage de mon père, a-t-il indiqué. Selon lui, «la fabrication du tapis fait face aujourd’hui à d’énormes problèmes, notamment celui de l’écoulement du produit».
Malgré la crise que vit le secteur du tourisme, Dabboussi et plusieurs autres artisans ne se sont pas contentés de reproduire le même type de tissage. Ils ont renforcé leurs compétences, afin de répondre au rythme ascendant de la demande des clients en matière de décoration et de tissage traditionnel.
Pour Jalila Brini, artisane originaire de la délégation de Tajerouine ( Le Kef), la hausse des coûts des matières premières et la régression de l’activité touristique ont contribué à la baisse de son activité artisanale. La prospérité du secteur touristique avant l’année 2010 a constitué un facteur déterminant pour la relance de mon activité artisanale, a-t-elle fait savoir.
Contrairement à Jalila, Ibtissem Azebi estime que l’activité artisanale ne passe pas par une période de stagnation. Cette activité connaît des mutations qui exigent un nouveau code de conduite de la part des artisans, a-t-elle ajouté. Azebi a réussi, malgré la crise, à former un réseau de contacts et de partenariats avec les différentes parties intervenantes (usines de laine, artisans, commerçants et foires), qui lui a permis d’assurer la relancer de son commerce.
Certains exposants ont souligné que les tentatives visant à impulser le secteur de l’artisanat «restent limitées». Ils recommandent de former les artisans, de les faire participer aux foires internationales, de les soutenir financièrement pour faire face aux crises.
Omar Moussa, artisan originaire de Nabeul spécialisé dans la décoration, a fait valoir que l’industrialisation des tapis a causé des dommages considérables à l’activité de l’artisan. Il a appelé les autorités à protéger les artisans contre les industriels qui menacent la pérennité des activités artisanales.
Il s’agit en outre d’instaurer un cadre législatif favorable aux métiers artisanaux qui interdit l’attribution de la qualité «artisan» au producteur exerçant une activité parallèle dans les usines. Ses productions contrefaites sont inspirées des productions artisanales originales, a-t-il ajouté.