600 millions de dinars, c’est le montant du déficit prévu à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) en 2016; un déficit qui s’est creusé d’année en année pour atteindre, au cours des trois dernières années, 1,100 milliard de dinars.
Un déficit qui risque de se traduire en une incapacité à assurer la couverture sociale des affiliés à la CNSS. Des solutions urgentes s’imposent. Mais elles ne seront pas faciles à trouver dans une conjoncture économique difficile où l’on assiste à des fermetures en chaînes des entreprises privées.
Dans un entretien accordé au journal électronique «Al Masdar» repris par nombre d’autres sites et journaux, Rachid Barouni tire la sonnette d’alarme: «A ce train-là et si nous ne pouvons pas bénéficier au plus tôt d’une aide urgente, nous ne serons pas capables d’assurer le paiement des pensions aux retraités pour les trois premiers mois de 2016».
Rien de plus évident lorsque la Caisse dépense plus qu’elle ne fait entrer d’argent en termes de cotisations sociales et lorsque le nombre des retraités est en hausse continue.
La crise économique, comme citée précédemment, n’arrange rien. Dans la dernière note de conjoncture publiée par la BCT, un seul indicateur est plus qu’évocateur: celui du recul des activités industrielles. «Les principaux indicateurs conjoncturels observés au cours du mois de novembre 2015 montrent un repli des importations des biens d’équipement (-16% en glissement annuel contre une hausse d’autant au même mois de 2014). Egalement, les exportations des industries mécaniques et électriques ont enregistré un fléchissement (-4,9% contre 8,5%), ainsi que celles des industries du textile, habillement, cuirs et chaussures (-11,1% contre 2,2%)». Les entreprises qui tombent en faillite vivent des difficultés ou choisissent de s’implanter dans d’autres pays plus attractifs et ne sont plus remplacées par d’autres. Les investisseurs boudent la Tunisie devenue le site de tous les maux et où l’instabilité sociale est devenue la règle.
C’est ce qui explique l’inquiétude de M. Barouni: «Le montant de nos dettes auprès des entreprises privées s’élève à 4 milliards de dinars. Nous ne pourrons pas les recouvrir facilement au vu des difficultés qu’elles traversent. Si nous exigeons le paiement immédiat de nos dettes, les dirigeants nous rétorquent qu’ils n’auront d’autre choix que celui de fermer leurs entreprises et de mettre en chômage les travailleurs. Et cerise sur la gâteau, la Caisse assure pendant 6 mois les rémunérations des travailleurs licenciés à cause des difficultés économiques de leurs employeurs».
Pour Rachid El Barouni, le recul de l’âge pour le départ à la retraite, annoncé depuis quelques années, pourrait être l’une des solutions qui permettrait de résoudre le problème pénible du déficit chronique des Caisses de sécurité sociale. C’est aussi ce qu’avait déclaré Ammar Youmbaï, ministre des Affaires sociales, lors d’une conférence de presse en septembre 2015 arguant que l’on pourrait ainsi absorber une grande partie des déficits des Caisses sociales (CNRPS, CNSS, CNAM) et que l’on pourrait également entamer des réformes radicales et réfléchies dans les systèmes de retraite et d’assurance maladie. Encore faut-il que le ministre réussisse à en convaincre les syndicats, à leur tête l’UGTT.
Pour le ministère des Affaires sociales, la réduction des avantages attribués aux retraités serait envisageable pour faire face à l’«abîme des Caisses sociales dans l’attente de l’application des réforme du système de la sécurité sociale à moyen et long termes».
Mais ce qui serait encore mieux, plus que les réformes et les mesures urgentes qui doivent être prises pour que les Tunisiens qui ont trimé pendant plus de 30 ans puissent bénéficier tranquillement de leurs retraites, c’est d’avoir plus d’investissements et d’investisseurs. C’est ainsi que la CNSS pourrait être approvisionnée grâce à de nouvelles affiliations et plus de cotisations pour assurer les pensions de ses 600.000 retraités.
Mais il n’est plus aveugle que celui qui ne veut rien voir, et nul n’est sourd que celui qui ne veut rien entendre.