Ils ont été six Premiers ministres et chefs de gouvernement à avoir dirigé le pays après le soulèvement du 14 janvier 2011. Il s’agit, dans l’ordre, de Mohamed Ghannouchi, Béji Caïd Essebsi (BCE), Hamadi Jebali, Ali Larayedh, Mehdi Jomaa et Habib Essid.
Deux d’entre eux ont eu à leur actif d’avoir mené à terme des élections générales. BCE a eu le grand mérite d’avoir organisé avec succès les élections du 23 octobre 2011 pour la mise en place d’une Assemblée nationale constitutionnelle, lesquelles élections ont mené au pouvoir la fameuse coalition gouvernementale (la Troïka) avec un parti d’obédience islamiste majoritaire, Ennahdha.
Mehdi Jomaa a organisé quant à lui avec succès les élections générales (législatives et la présidentielle) de 2014 qui ont plébiscité le parti Nidaa Tounès en tant que parti majoritaire au Parlement, et permis l’accession au palais de Carthage de BCE. On s’attend à ce que le gouvernement de Habib Essid organise à son tour, dans de meilleures conditions, les élections municipales.
Cela pour dire que la priorité de ces chefs de gouvernement était d’organiser des élections. Ils ont également pour point commun d’avoir opté pour les solutions de facilité. Parmi celles-ci figurent le recours à l’endettement dont le rythme s’est accéléré durant cinq années, passant de 40% du PIB à 52% actuellement, et la satisfaction sans discernement des revendications sociales au point que la part des salaires représente de nos 13,8% du PIB et 70% des dépenses de gestion.
Gros plan sur le bilan de chaque chef de gouvernement.
Mohamed Ghannouchi, responsable d’une amnistie générale désastreuse
Après la fuite «au forceps», paraît-il, le 14 janvier 2011, du dictateur Ben Ali, Mohamed Ghannouchi, alors Premier ministre, forme un nouveau gouvernement dit d’«union nationale», le 17 janvier 2011. Mais la présence de membres du RCD à des postes clés provoque, en moins de 24 heures, la colère de la population et la démission de plusieurs ministres d’opposition, fragilisant d’autant plus le nouveau pouvoir et poussant Mohamed Ghannouchi à présenter sa démission, le 27 février 2011, à la suite de plusieurs jours de manifestations marquées par des violences.
Parmi les malheureuses décisions prises par le gouvernement Ghannouchi, figure l’amnistie générale qui a permis à des djihadistes islamistes de retrouver la liberté et de former ensuite des noyaux de terroristes que le pays peine actuellement à éliminer.
BCE, des succès mais aussi des ratages
Béji Caïd Essebsi, qui succède à Mohamed Ghannouchi, le 4 mars 2011, appelle à rompre avec la Constitution de 1959 et affirme que Ben Ali et son entourage seront jugés pour les crimes qu’ils ont commis.
A son actif l’organisation, avec succès des élections du 23 octobre 2011, qui avaient, au grand malheur des Tunisiens, amené au pouvoir un parti islamiste, déstructurant et calamiteux (Ennahdha). C’est à la faveur de son laxisme qu’Ennahdha était parvenu à introduire de l’argent sale dans le pays pour acheter les consciences et accéder au pouvoir.
C’est aussi durant son mandat que le terrorisme a fait son apparition. Le premier attentat terroriste a eu lieu, au mois de mai 2011, à Rouhia (nord-ouest du pays), attentat qui a coûté la mort à plusieurs militaires dont le colonel Tahar Ayari.
Est-il utile de remettre à l’esprit que c’est durant son mandat que l’institution policière a été déstructurée (limogeage des cadres les plus performants, suppression de la police politique…) et que les armes ont été introduites par le canal de frontières poreuses livrées aux contrebandiers et à des terroristes de tous les pays.
Est-ce nécessaire de rappeler également que lors de son mandat que la croissance fut nulle (croissance zéro) et que les caisses de l’Etat ont été vidées par l’effet de la multiplicité de la mise place de mécanismes encourageant la consommation, fainéantise et l’assistanat: indemnité de chômage Amal, intégration de milliers de travailleurs exerçant dans la sous-traitance, recrudescence des sit-in et des grèves anarchiques… (Lire sur ce sujet :Tunisie : Les 200 dinars du programme AMAL attirent les jeunes chômeurs!; Tunisie – Emploi: L’INFOTICA à la rescousse du Programme AMAL).
Hamadi Djebali : apparition du phénomène des assassinats politiques
Parmi ses réalisations après sa nomination, le 14 décembre 2011 en tant que chef du gouvernement, la création d’une coalition gouvernementale avec le Congrès pour la République (de Moncef Marzouki) et Ettakatol (de Ben Jaafar) et son plaidoyer pour le 6ème Califat.
Une année après, le pays connaît sous son mandat une tolérance complice avec les djihadistes islamistes, le premier assassinat politique, celui Chokri Belaïd (6 février 2013); l’assassinat à Kasserine, par un groupe terroriste, de l’adjudant de la Garde nationale Anis Jelassi, premier martyr des forces de sécurité; l’assaut mené par des salafistes violents contre le siège de l’ambassade américaine à Tunis (2012); la répression à la chevrotine de manifestations à Silaiana; la rupture des relations diplomatiques avec la Syrie; et l’extradition dans des conditions très louches de l’ancien Premier ministre de Kadhafi, Baghdadi Mahmoudi.
Le 19 février 2013, il remet sa démission ainsi que celle de son gouvernement au président provisoire de l’époque, Monecf Marzouki.
Gouvernement Ali Larayedh ou l’apogée du terrorisme en Tunisie
Ce dernier est officiellement nommé le 22 février chef de gouvernement. A son actif, l’organisation de la fuite du plus grand terroriste de Tunisie, Abou Yadh, l’assassinat, en dépit de son information à l’avance par les Américains, du député Mohamed Brahmi, la dégradation de la situation politique dans le pays et l’organisation du sit-in historique du Bardo lequel demandait son départ.
Le 9 janvier 2014, il remet la démission de son gouvernement et cède sa place le 29 janvier de la même année.
Mehdi Jomaa, organisation des élections générales
Nommé chef du gouvernement, le 26 janvier 2014, Mehdi Jomaa a eu le grand mérite d’avoir organisé avec succès les élections générales de 2014 qui ont été sanctionnées par la victoire aux législatives et à la présidentielle de Nidaa Tounès.
Autres points positifs à signaler durant son mandat: l’adoption d’une nouvelle Constitution et l’éradication de groupes terroristes à Tunis.
Son mandat a été marqué par la recrudescence du terrorisme (assassinat de soldats au mont Chaambi) et des mouvements sociaux particulièrement dans le bassin minier.
Au plan économique, le recours à l’endettement public s’intensifie, durant son mandat.
Habib Essid, le terrorisme s’intensifie et met à genoux l’économie du pays
Désigné chef du gouvernement, le 5 janvier 2015, Habib Essid a été confronté à d’énormes difficultés dont le terrorisme qui a frappé à trois reprises (au musée du Bardo, à Sousse et à l’Avenue Mohamed V) faisant au total 60 morts parmi des touristes innocents et une douzaine d’agents de la Garde présidentielle.
Au rayon des réalisations positives, figure la lutte avec plus d’efficacité contre le terrorisme avec comme pointe l’assassinat du terroriste Lokamn Abou Sakher et la décapitation de l’essaim terroriste sanctuarisé au mont Chammabi (katiba Okba Ibn Nafaâ).
A signaler, également, la reprise des grands chantiers (tronçons autoroutiers, réseau ferroviaire rapide du Grand Tunis…), l’adoption d’importantes réformes économiques: lois sur la concurrence, sur la recapitalisation des banques publiques, sur le partenariat public/privé…).
Globalement, la première année de ce gouvernement est tout simplement à oublier.