Les quantités de lait déversées quotidiennement dans la nature ont atteint des niveaux sans précédent, dépassant les 200.000 litres. Face à cette situation, les éleveurs et collecteurs de lait menacent d’observer un sit-in devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), pour protester contre “la poursuite de la crise étouffante de la filière laitière, résultant d’une hausse record des stocks stratégiques qui coïncide avec le début de la période de haute lactation”.
Dans un communiqué publié mardi 19 janvier, l’UTAP et la Chambre nationale des centres de collecte de lait (UTICA) avertissent que “la crise a atteint son apogée, après les mesures restrictives prises par les centrales laitières qui imposent des quotas aux agriculteurs, se réduisant d’une semaine à l’autre, sachant que certaines centrales ont abaissé de moitié les quantités moyennes acceptées quotidiennement. Elles justifient ces mesures par leur crainte de ne pas commercialiser leur stock et de devoir le détruire”.
Les centres de collecte n’accepteront plus le lait à partir du 20 janvier
Les 240 centres de collecte ne vont plus accepter le lait des éleveurs à partir du mercredi 20 janvier 2016, a affirmé Saadallah Khalfaoui, président de la Chambre nationale des centres de collecte de lait (UTICA), en raison des restrictions imposées par les centrales laitières.
Cette décision va provoquer le blocage total de l’activité de la collecte et la détérioration de la production des éleveurs, affirme l’UTAP.
Charfeddine Touati, éleveur installé à Jendouba, souligne: “nous ne pouvons pas travailler comme il se doit, tant nous restons dépendants de la centrale laitière. Notre lait n’est pas destiné à être transformé, par exemple dans les fromageries. C’est plutôt une production réservée à 80% à la fabrication du lait de boisson. Toutes les décisions prises par l’Etat en faveur de la filière laitière restent de vains mots. Nous attendons leur exécution, sinon nous resterons continuellement, en crise”.
Taoufik Riabi, président de l’Union régionale de l’agriculture et de la pêche de Jendouba, constate que «face aux quantités importantes de lait produites chaque jour par le cheptel national, les centrales laitières ont opté pour des quotas de réception de lait auprès des collecteurs . Le reste est déversé sur la voie publique».
“A Jendouba, atteste-t-il, l’unique centrale laitière dispose d’une capacité de transformation de 400 mille litres par jour, alors qu’elle ne réceptionne auprès des collecteurs que 220.000 litres par jour”.
Il est à rappeler que les mesures prises le 30 décembre 2015 par le ministère de l’Agriculture, portent essentiellement sur l’assainissement de la situation financière de l’unité de séchage du lait de Mornaguia et sa réouverture, l’arrêt de l’importation du lait en poudre, l’encouragement de l’exportation et la résorption de l’excédent de production.
La sortie de crise doit se faire avec l’aide de l’Etat
Pour Amor El Bahi, vice-président de l’UTAP, «la filière laitière est dans une impasse et ne peut en sortir qu’avec l’aide de l’Etat. Ce dernier a le devoir d’encourager les industriels à avoir recours au séchage local du lait et à prendre en charge la gestion d’au moins 10 millions de litres pour pouvoir rééquilibrer le stockage pendant les périodes de pic de la production”.
L’UTAP et l’UTICA ont recommandé de prendre des mesures urgentes, en mettant en place un mécanisme souple pour l’indemnisation des éleveurs et des collecteurs.
Il est à rappeler que le stockage de lait atteint actuellement 53 millions de litres, alors que pendant la même période des années précédentes il était estimé à 12 millions de litres.
«Si le stockage continue d’évoluer jusqu’à la période de haute lactation où la production laitière s’élève à 2,5 millions de litres par jour, la filière laitière va se dégrader et son chiffre d’affaires s’affaisser», estime El Bahi.
Il préconise d’accroitre d’urgence les capacités de l’unité de séchage de la Mornaguia qui a rouvert ses portes le 13 Janvier courant, de 70 à 80 mille litres actuellement à 150 mile litres.