L’événement sanitaire: l’Union européenne vient de faire un don aux hôpitaux publics, de 158 véhicules dont 43 ambulances, 67 véhicules tout-terrain et 48 utilitaires. Treize régions sur un total de 14 bénéficiaires de la discrimination positive prévue par la nouvelle Constitution profiteront de ce nouveau parc. Il s’agit des gouvernorats de Béja, Gabès, Gafsa, Jendouba, Kairouan, Kasserine, Kébili, Le Kef, Médenine, Sidi Bouzid, Siliana, Tataouine et Tozeur.
Il faut reconnaître que ces véhicules viennent à point nommé et interviennent à une période où le transport médical des malades urgents (femmes enceintes…) connaît de sérieux problèmes par l’effet de la mauvaise gestion, du sabotage et de la corruption qui gangrène ce secteur.
Des problèmes perceptibles à travers l’absence de médecins spécialistes à l’arrière-pays, la non disponibilité d’ambulances bien équipées, le décès de femmes enceintes de Tataouine au cours de leur transport à des hôpitaux sans adresse et l’incendie dans des circonstances louches d’au moins deux ambulances à l’hôpital régional de Jendouba.
Irresponsabilité d’un ministre
Face à ces problèmes qui prennent une dimension dramatique dans les zones rurales, le ministre de la Santé publique, Saïd Aïdi, ne fait que miroiter la programmation, à moyen et long termes, d’une dizaine d’hôpitaux régionaux, auxiliaires et universitaires dans les régions précitées.
Et lorsqu’il y a un sérieux problème, cas du décès d’une femme enceinte de Tatouine au cours de son transport, il lâche ses collaborateurs pour justifier ce genre de mort par des complications médicales et autres maladies-anomalies colportées par la victime.
Pis, il justifie l’absence de médecins spécialistes dans les régions de l’intérieur par le fait que la Constitution interdit d’obliger une personne physique d’exercer dans un endroit qui ne lui convient pas. Vu sous cet angle, les militaires et les forces de l’ordre seraient pour ce ministre des martiens.
Pourtant, lors de débats sur les plateaux de radio et de télévision, médias, société civile, députés et partis politiques, traumatisés par le drame des femmes enceintes qui meurent lors de leur accouchement, lui ont vivement recommandé qu’en attendant les investissements lourds dans son secteur, il pourrait commencer par la composante du transport médical. En dépit de ces propositions, Saïd Aïdi a préféré faire la sourde oreille.
Un geste philanthropique qui va coûter cher au contribuable
Il a fallu que l’Union européenne fasse ce geste philanthropique, compatisse avec les mal soignés de l’arrière-pays pour leur venir en aide avec ce don de véhicules multidisciplinaires.
Ces véhicules viennent renforcer le parc automobile existant des services de santé de ces gouvernorats et permettront aux équipes médicales d’être plus efficaces et d’intervenir plus rapidement pour les urgences.
Laura Baeza, ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie, a déclaré qu’«améliorer l’offre et la qualité des soins de santé figure au cœur des préoccupations des régions et est une priorité du ministère de la Santé; de ce point de vue, ce don est parfaitement en phase avec les besoins et je suis heureuse que l’UE contribue à apporter une réponse concrète aux attentes des Tunisiens».
Ainsi, c’est quasiment écrit noir sur blanc. C’est une partie étrangère (ici l’UE) qui va s’occuper de la santé de nos concitoyens à l’arrière-pays, alors que le ministre de la Santé, lequel vient de retourner d’un voyage inexpliqué à Davos en Suisse, se contente de réceptionner le lot des véhicules et de s’afficher avec.
Cependant, ce don de véhicules que son département aurait pu acquérir, facilement, par ses propres moyens et dans la dignité, risque de coûter très cher au contribuable tunisien. Car généralement, dans la logique des bailleurs de fonds, ce don est suivi le plus souvent d’un prêt (c’est-à-dire- plus d’endettement) avec en prime le marché d’approvisionnement des hôpitaux tunisiens en équipements européens.
Wait and see !