La non publication des contrats miniers et pétroliers constitue l’un des principaux maillons faibles de la Tunisie qui a obtenu un score défaillant de “31/100” en matière de pratiques de divulgation dans l’indice de gouvernance des ressources naturelles (RGI).
Le RGI, publié par l’Institut de gouvernance des ressources naturelles (Natural Ressources gouvernance -NRGI), mesure la qualité de la gouvernance dans les secteurs pétroliers, gaziers et miniers de 58 pays.
Malgré les bons scores réalisés, notamment pour le cadre réglementaire et législatif (75 points/100), les dispositions de contrôle et de prévention (62/100) et le climat incitatif (45 points), le rapport, qui couvre l’année 2013, indique que la Tunisie a perdu de précieux points à cause de son refus de divulguer le contenu de ses contrats pétroliers et miniers conclus avec les sociétés extractives.
Pour Wissem Heni, responsable au sein de l’Institut de gouvernance des ressources naturelles, le cadre législatif actuel tunisien ne constitue en aucun cas une entrave à la publication des contrats, d’autant plus que ni la nouvelle Constitution tunisienne, adoptée en 2014 ni le code des hydrocarbures de 1999 n’interdisent la publication de ces contrats. Au contraire, précise encore Heni, faire un pas dans ce sens ne manquera pas de renforcer la responsabilisation et la bonne gouvernance des investissements, outre le climat des affaires dans le pays.
Impact négatif de la non publication des contrats
L’argument justifiant la confidentialité des contrats par les informations commercialement sensibles reste peu crédible, surtout que les contrats tunisiens ne comportent pas d’informations sensibles ni de données confidentielles, affirme le responsable de NRGI. Et d’ajouter que ” l’interdiction concerne seulement la publication de données techniques qui peuvent causer un préjudice à la société d’extraction”.
Ce raisonnement axé sur les intérêts économiques des sociétés d’extraction est réfuté par la plupart des organisations internationales actives dans le domaine de la gouvernance des ressources naturelles comme “Publish what you pay” (Publier ce que vous payez – PCQVP), un réseau regroupant plus de 650 organisations de la société civile.
Pour cette coalition, quand les contrats et les accords concernant les projets extractifs sont secrets, le pays se prive de la possibilité de tirer profit de ses ressources en matière de développement économique et social. Même pour les sociétés, les contrats négociés derrière les portes closes alimentent la suspicion et la rumeur, rendant les contrats plus vulnérables aux négociations arbitraires, estime la PCQVP.
L’organisation explique dans le même sens que la divulgation n’est pas une fin en soi, mais c’est un élément essentiel pour la mise en place d’un bon système de gouvernance des affaires publiques et la prévention de la corruption, une démarche à laquelle la Tunisie a déjà exprimé sa volonté d’y adhérer.
La dernière déclaration en date, celle du nouveau ministre de l’Energie et des Mines, Mongi Marzouk, va dans ce sens. En effet, le ministre a exprimé la volonté de transparence et l’engagement de son département à appliquer les lois en vigueur ou celles nouvelles qui seront mises en place stipulant «la publication des contrats pétroliers ou miniers».
Dans une déclaration à TAP, à l’issue d’une séance d’audition (17 février 2016) de la Commission de l’industrie et de l’énergie, relevant de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le ministre a rappelé que tous les contrats pétroliers signés entre la Tunisie et les sociétés étrangères ont été déjà remis en 2013 au pôle judiciaire.
Il a, par ailleurs, indiqué que son département reste ouvert à toute initiative visant à renforcer les principes de transparence et de performance de la gestion des ressources naturelles de la Tunisie.
Marzouk a rappelé dans ce cadre que la Tunisie participera, les 24 et 25 février 2016 à Lima (Pérou), à la conférence mondiale de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE).
La Tunisie avait annoncé à plusieurs reprises sa volonté d’adhérer à l’ITIE qui constitue une norme mondiale visant à promouvoir une gestion ouverte et responsable des ressources naturelles, sans toutefois réaliser de véritables avancées dans ce sens.