La CNAM avait déclaré, durant l’année 2015 et en grand fanfare, le lancement de la carte d’affiliés à base de technologie à puce et un système d’échange électronique entre la CNAM et les prestataires de santé publique (médecins, cliniques, hôpitaux, laboratoires et pharmaciens).
Le chargé de communication de la CNAM avait même affirmé haut et fort sur les plateaux de télévision et autres journaux que le système sera opérationnel début 2016. Mais en réalité il n’en est rien. Ce qui nous fait dire que, une fois de plus, nous Tunisiens sommes des champions du mensonge et de la parlotte.
En effet, malgré le lancement d’un grand appel d’offres pour l’acquisition d’une solution complète de “Carte de santé“ en 2015, aucune suite n’a été donnée à ce projet, en tout cas selon les informations dont nous disposons. Toujours est-il que nous ignorons s’il s’agit d’une annulation pure et simple –comme c’est souvent l’usage en Tunisie en matière de TIC- ou plutôt si la CNAM va nous annoncer les résultats de son choix. Et cela ne serait pas étonnant.
Mais quoiqu’il arrive, ce système ne pourrait pas être opérationnel avant 2018. Pendant ce temps, la CNAM continuera à accumuler des pertes dans la filière du tiers payants –plus de 150 millions de dinars à fin décembre 2015-, alors que le coût total de la solution (pour l’équipement des 22.000 prestataires de santé et 6 millions de cartes) serait de l’ordre de 30 millions de dinars, selon le PV d’ouverture publique des offres financières à la CNAM.
Mais allons plus loin –et ce n’est pas exagéré- pour dire que notre pays a sans doute raté un le rendez-vous avec l’histoire de faire un bond qualitatif technologique dans la modernisation des Systèmes d’informations publiques.
En tout cas, c’est encore un budget en plus dans les TIC qui est reporté et qui ne permettra pas de créer de nouveaux emplois pour les ingénieurs informaticiens dont le nombre de chômeurs dépasse les 8.000 cadres en janvier 2016.
Certains investisseurs vont jusqu’à affirmer que la Tunisie est le champion en Afrique des annulations des projets TIC. Et ce n’est pas faux, surtout lorsque l’Observatoire des marchés publics relevant du Premier ministère souligne que plus de 50% des appels d’offres informatiques -notamment dans les services- ont été déclarés infructueux. Cette proportion serait même de 70% chaque fois que le budget en jeu dépasse les 3 millions de dinars tunisiens, car le projet doit passer, selon la réglementation publique, devant la Commission supérieure des marchés publics du Premier ministère.
Tout ceci nous pousse à dire que si la Tunisie ne réforme pas sa réglementation des marchés publics, si elle n’abandonne pas la règle du moins-disant, si les appels d’offres sont exposés à l’annulation, et si l’administration ne fait pas l’effort nécessaire de traiter les projets dans les délais impartis en réduisant le temps de réponse, alors il est peu probable que les entreprises publiques et l’administration puissent faire leur mise à niveau.
Du reste, où est l’administration électronique, le passeport biométrique, la carte d’identité biométrique, le paiement électronique, les billets de spectacles et de stade électroniques? Voilà autant de projets qui dorment dans les tiroirs et qui tardent à se mettre en place.
N’ayons pas peur de le dire, la Tunisie n’est plus seulement en retard par rapport à l’Europe, mais elle l’est même par rapport à plusieurs d’Afrique subsaharienne.
Des exemples en voulez-vous? Dans les aéroports du Tchad, du Niger, de la Côte d’Ivoire et du Sénégal, le traitement des voyageurs se fait de manière biométrique avec prise de photo et des empreintes en temps réel. Quid de la Tunisie? Ici on continue à le faire avec la fiche de police des années 60.