Ainsi en ont décidé les autorités russes et non les locataires de la Banque centrale de Tunisie comme l’on s’y attendait. C’est du moins ce que nous a révélé une source sûre du ministère tunisien des Finances. Il s’agit, de toute évidence d’un coup dur pour les professionnels qui avaient beaucoup misé sur la cotation du rouble en Tunisie pour appâter les touristes russes et leur donner l’occasion de payer, en rouble, leur séjour et achats en Tunisie.
Portée du niet russe.
Pour mémoire, face aux restrictions imposées aux touristes européens de visiter la Tunisie en raison du terrorisme, la Tunisie est depuis l’attentat de Sousse, en juillet 2015, en lice avec le Maroc pour attirer une partie des 6 millions de touristes russes qui visitaient traditionnellement la Turquie (4,5 millions environ) et l’Egypte (1,5 million) et qui ne peuvent plus le faire, aujourd’hui, sur instructions de leur gouvernement. Les deux pays espèrent tirer profit des tensions qui persistent entre la Russie et ces deux destinations concurrentes (Turquie et Egypte) suite à l’abattage par des terroristes d’un avion civil russe transportant des touristes au Sinaï en Egypte et à l’incident du chasseur-bombardier russe abattu par l’armée turque à la frontière syro-turque.
La décision aurait été motivée par le gouvernement russe de l’intérêt qu’il y a pour lui de garder chez lui les dollars que ses compatriotes auront à dépenser en dehors du pays. Il a apparemment tiré la leçon de la cotation du rouble dans des pays comme l’Egypte, Chypre et la Turquie, laquelle cotation n’aurait pas été dans l’intérêt de l’économie émergente russe.
Le marché russe demeure porteur
En dépit de ce contretemps, le marché russe demeure porteur pour trois raisons. La première réside dans le fait que le gouvernement russe, contrairement à ses collègues européens, n’a pas imposé aux touristes russes l’interdiction de voyager en Tunisie.
La deuxième consiste en l’initiative prise par le transporteur public Tunisair d’assurer, à compter du mois de mai prochain, trois vols hebdomadaires directs, Tunis-Moscou. A signaler également l’ouverture, à compter de ce mois d’avril 2016, d’une liaison directe Djerba-Moscou à raison de deux voyages par semaine.
Ces vols viennent remédier à l’absence de desserte entre Tunis-Moscou, laquelle a eu pour conséquence de freiner les flux des touristes russes qui veulent visiter la Tunisie.
En fait, il s’agit d’un rétablissement de la liaison Moscou-Tunis avec changement du transporteur. Auparavant, la compagnie russe Aeroflot atterrissait 4 fois par semaine à l’aéroport Tunis–Carthage: deux vols Moscou-Tunis, un vol Moscou-Tunis-Rio de Janeiro et un vol Moscou-Tunis–Bamako. Ils ont été tous annulés sans que personne ne remette cela en cause.
La réouverture de cette liaison touristique avec Moscou ne manque pas d’enjeux dans la mesure où elle va impacter positivement le tourisme tunisien.
Les conditions pour fidéliser les touristes russes
Néanmoins, la disponibilité d’une desserte aérienne régulière et de vols charter ne sont pas les seuls préalables à réunir pour attirer les touristes russes, il faudrait lui ajouter au moins deux autres.
Le premier relève de la responsabilité des professionnels. Ces derniers sont appelés à exploiter cette opportunité pour pratiquer des prix compétitifs. L’ultime objectif étant de fidéliser cette précieuse clientèle qui tombe à point nommé pour sauver un secteur sinistré.
Le second porte sur l’enjeu de mener une campagne de promotion auprès de ce marché émetteur porteur selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), de tenir compte de la baisse du pouvoir d’achat des Russes en leur proposant des prix compétitifs.
La récente invitation, à Djerba, aux frais de l’Etat tunisien d’une délégation de 440 responsables d’agences de voyage russes s’inscrit dans cette perspective heureuse.
A signaler que le nombre des touristes russes qui visitent la Tunisie a enregistré une importante régression depuis le soulèvement du 14 janvier 2011.
Est-il besoin de rappeler que le marché émetteur russe est retenu par les études de prospection de l’Organisation mondiale du tourisme comme un marché porteur. Ce marché devrait enregistrer, selon l’OMT, l’une des plus fortes croissances, avec un taux de croissance annuel de 7,4% entre 2011 et 2016 et un doublement des dépenses des touristes émetteurs à 67,1 milliards de dollars.