Banque mondiale : Quel est le véritable agenda d’Eileen Murray pour la Tunisie?

Chargée du bureau de la Banque mondiale en Tunisie, Eileen Murray, gréco-américaine, siège à la représentation de Tunis depuis 2010. Une étrange coïncidence. Car sa nomination a correspondu avec le déclenchement des fameux printemps arabes dont le point de départ a été la Tunisie. C’est également une manne pour madame, lorsque l’on sait que le mandat des représentants de la BM dans un pays ne doit pas dépasser les 4 ans. Cela fait six ans qu’elle est à Tunis. Y aurait-elle été maintenue parce qu’elle n’a pas encore achevé sa mission qui va dans le sens de son rapport «La Révolution inachevée»? Celle qui devait aboutir à l’instauration d’un régime islamiste proche des frères musulmans en Tunisie?

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Il faut reconnaître que les différents rapports émanant de la BM à propos de notre pays, depuis l’arrivée d’Eileen Murray, devraient nous pousser à nous interroger sur sa neutralité et son objectivité dans le traitement du dossier Tunisie.

Rappelons en passant que notre pays était, du temps de Ben Ali, l’“élève modèle de la Banque mondiale“ et cité en exemple par ses dirigeants qui ne prononçaient pas dans leur rapport le terme «corruption» la maquillant en “mauvaise gestion”.

Cette même Tunisie s’est retrouvée soudainement et sous le règne de Mme Murray dans la peau du “vilain petit canard“ et accusée de toutes les tares. Pire, ces cinq dernières années, l’acharnement des rapports de la Banque mondiale ont été destructeurs pour le pays. Ils ont donné l’occasion aux détracteurs d’une Tunisie moderne et progressiste et à une poignée d’hommes et femmes politiques ignares, haineuses et vindicatives d’y puiser tous les arguments pour se débarrasser et dénigrer toutes les compétences qui ont construit l’Etat tunisien depuis l’indépendance. Ces hauts commis de l’Etat et de l’Administration qui ont œuvré au rayonnement de la Tunisie avec les moyens du bord et malgré toutes les carences. Qu’ils aient été égarés au point de ne pas réaliser l’étendue des dégâts engendrés par des politiques laxistes ou attentistes cela ne veut nullement dire qu’ils sont tous des voleurs, des traîtres à la patrie ou des incompétents!

L’image de la Banque mondiale ternie par des mœurs “débridées”

Mais cela, Eileen Murray ne veut pas en entendre parler, ses partenaires privilégiés sont ceux choisis pour elle par sa patrie d’adoption (USA). Ils auraient à ses yeux toutes les qualités, y compris, peut-être, celles de tolérer ses mœurs dont on entendrait le «bruit assourdissant» même dans les salons de coiffure. Ce qui devrait en principe, nuire au plus haut point à une organisation aussi illustre que la Banque mondiale et ternit son image.

Mais ce n’est pas ce qui nous importe le plus, elle est libre de mener sa vie comme elle le veut, dans le respect de la culture ambiante si possible. Ce sont les compétences tunisiennes qui sont un patrimoine national que nous tenons à préserver. Et ce n’est pas à la Banque mondiale, conduite par madame Murray, de nous apostropher à chaque fois nous appelant à faire table rase de tous nos acquis d’avant le 14 janvier 2011!

«L’ouverture de l’espace politique et social qui accompagne le nouveau contexte démocratique offre une occasion unique de construire un dialogue participatif social et économique afin d’identifier les moyens de renforcer le lien entre la croissance, le bien-être et la participation citoyenne». Dans un souci de transparence, nous aimerions bien savoir si ce dialogue cité dans les rapports rédigés sous la direction d’Eileen se fait de manière équitable avec les composantes de la société civile ou si madame aurait des préférences sur les plans idéologiques et politiques qui iraient dans le sens des orientations US.

La Tunisie… un terrain conquis?

«La Banque fixe des limites, mais, comme je ne suis pas polie, je les outrepasse!» Les déclarations à l’emporte-pièce de l’Américaine Eileen Murray (58 ans), chargée des opérations de la Banque mondiale en Tunisie, lors de la réunion du Country Partnership Framework, le 8 mars, ont surpris les membres de la société civile tunisienne». Cela a été publié à «Jeune Afrique» le 25 mars 2016.

Il est vrai que la représentante de la BM se croit tout permis et considère la Tunisie comme un terrain conquis, tant elle accorderait toutes ses «faveurs» et ses «crédits» à ses alliés potentiels qui se reconnaîtront dans ces lignes…

Et pourtant, des économistes d’envergure et des technocrates avertis, et il en existe dans notre pays, ont voulu attirer l’attention de la banque mondiale sur certaines dérives analytiques à propos du contexte sociaux et économiques dans notre pays. «Ce n’est pas que nous prônions des politiques étatistes, nous nous situons bien dans le cadre libéral, mais comme le soulignait Michel Albert dans un “Capitalisme contre capitalisme“, lorsqu’on adopte le cadre libéral, le débat n’est pas clos mais ne fait que commencer. Et si des pays libéraux réussissent et d’autres, tout aussi libéraux, échouent, la différence relève de la capacité des premiers à mettre en œuvre des stratégies mobilisant opérateurs publics et privés autour d’objectifs de développement ambitieux».

Madame Murray ne semble pas comprendre ces messages et n’est pas curieuse de discuter avec des technocrates reconnus aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale ou avec des représentants de la société civile reflétant la diversité idéologique de la Tunisie ou son aile la plus moderniste.

La Tunisie n’est pas la Grèce

Dans les rapports sur la Tunisie édités sous sa direction, Mme Murray passe sous silence la gestion des gouvernements post-printemps arabes, y compris celui de la Troïka. Comme si ces derniers avaient géré le pays en observant toutes les règles de bonne gouvernance et en administrant dans la plus grande transparence les deniers de l’Etat. Un parti pris que nous ne pouvons ignorer au vu des dérives de Madame la «Marquise» Murray, laquelle, semble-t-il, se prend pour la mandataire de la Banque mondiale dans un pays qui aurait perdu sa souveraineté si l’on voit les libertés qu’elle y prend sur le plan relationnel et tous azimuts.

Donneuse de leçons, elle n’hésite pas à rappeler aux Tunisiens l’exemple grec pour qu’ils se soumettent à son diktat et à ses instructions. «Une lecture incomplète et sélective de la complexité de la réalité tunisienne et une lecture partiale et idéologiquement biaisée ainsi qu’une inadéquation des recommandations», c’est ce que reproche, entre autres, certains cercles au rapport : «La Révolution inachevée», édité par la BM en 2014.

«Au cours de la transition politique de 2011 à 2014, des progrès importants ont été réalisés en vue de renforcer la transparence et la participation, notamment les droits civiques et politiques comme le démontrent les premières élections libres et équitables organisées dans le pays, le renforcement de la liberté de la presse et d’association, l’allégement des restrictions sur les activités des organisations de la société civile et autres, et l’amélioration de la gouvernance économique. Ces avancées majeures en termes de cadre institutionnel, législatif et judiciaire, et la reconnaissance des droits dorénavant inscrits dans la Constitution de 2013, poseront les fondements de la poursuite des progrès sociaux et de la multiplication des opportunités».

C’est dans le rapport de la Banque mondiale: soit un encensement des politiques des gouvernements successifs de 2011 à 2015. Il faut reconnaître, et selon plusieurs sources, que madame Murray y a de nombreux amis surtout parmi les partisans de l’islam politique «éclairé». Grand bien lui fasse.

Perte du capital confiance

Ceci étant, nous ne pouvons perdre de vue qu’être Américain implique un serment d’allégeance qui doit aller en premier lieu aux States dont on doit «soutenir la Constitution, obéir aux lois, renoncer à la loyauté envers son pays et/ou à un titre étranger et porter les armes américaines ou servir le gouvernement américain si besoin est».

Dans ce cas, comment être sûrs que le rôle d’Eileen Murray est tout d’abord d’œuvrer à sortir la Tunisie, grâce à la Banque mondiale, du marasme dans lequel elle se débat ou de servir les politiques hégémoniques américaines dans la région MENA et servir leurs intérêts?

Pour conclure, nous réalisons aujourd’hui que la représentante de la BM ne bénéficie pas d’un grand capital confiance que ce soit au niveau de nombre de cercles de décisions tunisiens ou encore auprès de la société civile sauf celle qu’elle a adoptée, outre le fait que, à cause d’elle, l’image de la Banque mondiale n’est pas des plus reluisantes dans la Tunisie d’aujourd’hui. Une Tunisie qui vient tout juste de commencer sa révolution madame Murray parce que les véritables patriotes et les acteurs de la société civile, soucieux de l’intérêt de la Tunisie, ont pris conscience du danger que vous pouvez représenter pour leur pays.

En fait, il s’agirait en premier lieu de vous assurer que la BM continue à jouer son rôle de toujours, celui de soutenir les réformes et les politiques de développement dans des pays comme le nôtre dans le respect de nos intelligences et sans parti pris prononcé pour aucune composante idéologique du paysage politique du pays.