Un rapport de la Fondation “Carnegie”, un think tank mondial, estime que la transition de la Tunisie est “en panne”, et propose au pays la mise en place “d’un nouveau partenariat-cadre avec ses partenaires internationaux pour intensifier leurs engagements (auprès de la Tunisie) et l’assister à réaliser ses priorités urgentes”.
Le rapport, intitulé “Entre dangers et promesses: un nouveau partenariat-cadre avec la Tunisie”, présenté mercredi 27 avril à Tunis, estime que “l’économie tunisienne est à la peine, car elle est assaillie par la corruption et les défis législatifs, bureaucratiques et sécuritaires”.
A cet effet, les responsables de l’Etat en Tunisie, les communautés locales et le secteur privé sont appelés, selon Carnegie, à “instaurer un authentique dialogue national sur les priorités sociales et économiques pour réussir à stabiliser le pays, éviter tout dérapage et sortir de l’impasse.
Dans ce rapport, les auteurs estiment qu’un partenariat-cadre peut aider à conjuguer les actions de réformes et à rendre l’assistance internationale mieux coordonnée et intensifiée”.
Cinq lignes d’action qui s’imposent
Le gouvernement tunisien doit, d’après les auteurs de l’étude, prendre la tête de ce nouveau partenariat-cadre sur la base d’engagements dans cinq domaines complémentaires.
Le rapport préconise la création d’un “mécanisme G7” chargé de coordonner l’assistance internationale dans le secteur de la sécurité et d’en tirer pleinement parti.
“Les réunions internationales prévues en 2016, y compris le sommet du G7 (qui se tiendra en mai au Japon), la réunion de l’Assemblée générale de l’ONU (septembre) et la conférence sur les investissements internationaux en Tunisie (en automne), sont des plateformes idéales pour le renouvellement des engagements politiques et économiques de la communauté internationale envers la Tunisie”, révèle le rapport.
La 2ème action évoquée concerne l’instauration d’un dialogue inclusif avec toutes les parties, y compris les représentants de la société civile, les hommes d’affaires et les citoyens sur les lois et politiques économiques, sociales et sécuritaires qui seront décrétées.
“La capacité à arriver à un consensus ou compromis de manière inclusive doit être préservée et élargie sous la forme d’une plateforme permanente gouvernement/société civile”, préconisent les auteurs.
Le troisième volet du rapport concerne le renforcement des institutions publiques qui reste tributaire, selon le rapport, de l’établissement des priorités entre les réformes, y compris les réformes des administrations publiques, de l’investissement et des douanes.
Concrètement, il s’agit de promouvoir une croissance économique inclusive, de créer des emplois et de réduire au minimum les procédures administratives pour faire correspondre les objectifs des investisseurs à des besoins publics et une nouvelle culture propice à l’innovation et à la prise de risque.
Autre recommandation présentée dans le cadre de ce rapport, la mise en place d’un mécanisme rapide pour surmonter les obstacles et accélérer la mise en oeuvre des projets économiques à forte priorité, notamment les projets de développement économique et social, outre la création d’emplois.
Concrétiser les programmes…
Intervenant au cours de cette rencontre, Yassine Brahim, ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, a rappelé que les défis qui se posent pour la Tunisie concernent essentiellement la concrétisation des différents programmes et réformes déjà annoncés et qui peinent à être réalisés pour différentes raisons soulevées par le rapport Carnegie.
Cette étude permettra à la Tunisie d’affiner l’approche de concrétisation du Plan quinquennal de développement (2016/2020), a souligné le ministre, estimant toutefois que la priorité du gouvernement actuel reste le volet sécuritaire. Les opérations terroristes ont un impact dévastateur sur la situation du pays.
S’agissant des projets publics, le ministre a rappelé que des avancées ont été enregistrées. Selon la commission des marchés publics, le taux d’avancement de ces projets, a atteint, en 2015, 70% par rapport à l’année 2014, souligne encore le ministre, rappelant que les investissements ont connue une légère hausse au cours de la même période.
Evoquant les critiques de certains partenaires de la Tunisie, notamment les Etats-Unis concernant la lenteur des réformes entreprises, le ministre a indiqué que la Tunisie a déjà adopté une série de lois et de réformes (le partenariat public/privé, le statut de la Banque centrale de Tunisie (BCT), etc. “L’expérience a démontré qu’il n’y a pas beaucoup de pays dans le monde ayant adopté ce nombre de lois et de réformes”, a fait savoir Brahim.
Evoquant le point soulevé par rapport de Carnegie concernant l’administration publique qui “reste une force pour la stabilité mais un obstacle au changement”, Brahim a estimé que le vrai problème de l’administration publique tunisienne réside dans “le sentiment de peur qui y règne actuellement”.
Pour le ministre, la réconciliation constitue une priorité en vue de surmonter cette peur et de préserver les compétences de l’administration publique tunisienne et d’y attirer de nouvelles.