La réduction de l’endettement extérieur, l’amélioration du climat des affaires et de la gouvernance et la diversification de l’économie, ce sont là les principaux enjeux de la Tunisie, d’après la Banque africaine de développement (BAD), dans son rapport sur “les perspectives économiques en Afrique” présenté vendredi 3 juin à Tunis.
Les défis à relever concernent également, d’après Audrey Verdier Chouchane, économiste en chef à la BAD, la révision du modèle de développement, la restructuration du secteur financier, la résorption des disparités régionales.
Pour ce qui est du développement des unités industrielles, très peu de petites et moyennes entreprises (PME) arrivent à se développer et à créer de l’emploi, et ce processus demeure limité aux très grandes entreprises ou aux plus petites entités.
Mme Chouchane estime que ni le secteur des services ni l’agriculture ne vont résoudre le problème de l’emploi. Seule une véritable politique d’industrialisation pourrait le faire.
En 2015, la Tunisie a enregistré une croissance de 0,5%, ce qui est “très faible” par rapport à ce que a été prévu par la loi de finances de l’année dernière (3% du PIB). Cet écart reflète les problèmes de l’industrie des phosphates (arrêt de la production pendant une partie de l’année) et la baisse des recettes touristiques d’au moins 35% entre 2014/2015 outre une production manufacturière en berne, a-t-elle relevé lors de la 3ème rencontre internationale méditerranéenne organisée à Tunis, les 3 et 4 juin courant par l’Université centrale et l’association CEMAFI international.
C’est la production agricole qui a permis de compenser le manque à gagner et d’éviter la stagnation de l’économie. La croissance en Tunisie est toujours tirée par la consommation des ménages et la consommation privée alors que la formation brute du capital fixe aussi bien public que privé demeure très faible, d’où l’importance de déplacer les facteurs de croissance vers l’investissement et de rassurer les investisseurs, a t-elle souligné.
S’agissant de l’aide extérieure présentée au pays, l’économiste a relevé la hausse de l’aide bilatérale entre 2009 et 2011/2012, par rapport à l’aide multilatérale, précisant que l’on a assisté à un renversement de la tendance au cours de ces dernières années, ce qui a un impact sur la dette extérieure du pays.
En effet, entre 2007 et 2011, la dette extérieure était inférieure à 50% du PIB, mais elle se dirige actuellement vers les 70 et 75% du PIB et s’accroît à un rythme élevé de plus de 5% par an, ce qui risque de poser des problèmes à plus long terme.
Ceci dit, des experts pensent que cette dette est restée et reste soutenable car les maturités sont longues (sur 10 ans ou plus en général) et les taux d’intérêt sont faibles, ce qui n’est pas de l’avis de Verdier Chouchane pour qui “cela peut poser problème si le rythme de l’endettement se poursuit sur cette lancée”.
Le rapport de la BAD cite quelques indicateurs politiques tels que la montée de la protestation civile ou le durcissement du régime, soulignant que le rétablissement de la sécurité “reste un problème de taille pour le pays”, outre les problèmes liés à l’égalité du genre, notamment en ce qui concerne l’accès des femmes au marché du travail.
Toutefois, l’experte a exprimé son optimisme quant à l’avenir de l’économie tunisienne, précisant que le pays dispose de pas mal d’atouts dont une capacité de résister au choc et des compétences humaines dans les domaines de l’ingénierie et des sciences.