Appelé, avec deux intervenants (Me Maya Boureghda, avocate spécialiste des PPP, et Adel Hentati, conseiller et spécialiste de l’environnement), à «challenger» Yassin Brahim, ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, au sujet des orientations et des objectifs du plan de développement, lors de la conférence sur «Le plan stratégique 2016-2020: financement, PPP & développement durable», organisée mardi 14 juin 2016 par l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), Jacob Kolster l’a fait sans prendre de gants.
Après avoir marqué une certaine défiance à l’égard de la notion de plan qui, selon lui, rappelle un peu «l’époque soviétique», et s’être déclaré partisan plutôt de l’adoption de «lignes directrices», le directeur régional pour l’Afrique du Nord de la Banque africaine de développement (BAD) a pointé du doigt plusieurs faiblesses et dysfonctionnements.
Rappelant une «règle basique», selon laquelle la concomitance «d’un taux de croissance inférieur au taux d’intérêt réel du financement est une situation insoutenable», M. Kolster constate que la Tunisie, où «le taux d’intérêt réel est trois fois plus élevé que le taux de croissance», est «dans cette situation depuis cinq ans».
Conclusion du représentant de la BAD: «On est un peu dans un cercle vicieux».
Usant ensuite d’un peu de diplomatie, le directeur régional pour l’Afrique du Nord de la BAD laisse entendre que les politiques ne sont peut-être pas à la hauteur de la situation, lorsqu’il affirme que pour «s’installer dans un cercle vertueux», il faut «non seulement des actions mais également un état d’esprit», et qu’il appartient aux politiques de développer celui-ci «en avançant des propositions qui tiennent la route».
Troisième reproche: l’utilisation des financements à des fins autres que ceux qui devraient être la leur. Selon Jacob Kolster, ceux-ci auraient dû servir pour relancer la croissance économique. Cela n’a pas été fait. Les autorités ont quant à elles déclaré, rappelle le responsable de la BAD, «avoir utilisé ces financements pour obtenir la paix sociale». Or, constate le directeur régional pour l’Afrique du Nord «on a payé mais on n’a pas obtenu la paix sociale».
Regrettant que les ressources soient «bouffées par l’administration centrale», M. Kolster souligne la nécessité que l’Etat «investisse pour créer la croissance et la paix sociale», mais observe que «ce n’est pas en créant 30.000 postes dans la fonction publique à Tunis qu’il y parviendra, mais en créant de l’emploi dans les régions où les jeunes sont payés 2.000 euros pour aller combattre en Syrie et en Libye».
Enfin, après avoir souligné l’hémorragie qu’occasionnent au pays les grandes entreprises publiques en difficulté, le directeur régional chargé de l’Afrique du Nord a appelé à «faire quelque chose pour que le secteur privé ait envie d’investir à long terme en Tunisie».