Pour sa premiere visite officielle au Maroc, le président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, a eu un agenda bien chargé, qui se déploie entre Rabat, Casablanca et Ouarzazate.
Mercredi 20 juillet, lendemain de son arrivée dans le Royaume, fut placé sous le signe des rencontres officielles de haut niveau pour le président de la Banque et sa délégation, composée notamment de la représentante résidente au Maroc, Yacine Fal, du vice-président par intérim en charge des opérations, Janvier Litse, du vice-président par intérim chargé des finances, Charles Boamah, ainsi que du nouveau directeur général du fonds Africa50, Alain Ebobissé.
Rencontres de haut niveau et réunion de travail
Outre une visite de courtoisie au chef du gouvernement, Abdel-Ilah Benkiran, qui s’est déroulée au Palais royal, à Rabat, le président Adesina a rencontré le ministre de l’Economie et des Finances, par ailleurs gouverneur de la BAD pour le Maroc, Mohammed Boussaïd, ainsi que le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Salaheddine Mezouar, qui assure la présidence de la COP22 – qui se tient cette année à Marrakech.
La rencontre au ministère des Finances a été suivie d’une longue séance de travail, à laquelle se sont joints le ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime, Aziz Akhannouch, le ministre de l’Equipement, du Transport et de la Logistique, Aziz Rabah, ainsi que le ministre délégué auprès du ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique, Mamoune Bouhdoud, chargé des Petites entreprises et de l‘Intégration du secteur informel. Enfin, une dernière réunion de travail a eu lieu à Rabat, avec le patron de l’agence marocaine des énergies solaires (MASEN), Mustapha Bakkouri, et son équipe rapprochée.
Le Maroc, 3e investisseur en Afrique et 1er client de la BAD
D’emblée, le président Adesina a tenu à souligner la qualité de la coopération qui unit la Banque au Maroc, l’un de ses membres fondateurs et, surtout, son premier client. «Le Maroc est l’un de portefeuilles de projets de la BAD les plus performants du continent», a rappelé le président, qui s’est réjoui notamment du taux de décaissement (52%) affiché. Et de saluer les performances du Maroc au plan économique et de ses stratégies de développement, outre l’importance de son rôle sur le continent : «85% de vos investissements directs étrangers sont en Afrique», s’est réjoui Akinwumi Adesina, qui s’est aussi félicité la volonté qu’a exprimée le Maroc de réintégrer l’Union africaine.
Le Royaume est aussi le troisième exportateur sur le continent, derrière l’Afrique du Sud et l’Egypte -et le premier en Côte d’Ivoire, pays hôte du siège de la Banque.
La coopération de la BAD avec le Maroc «n‘est pas seulement une relation financière», a renchéri le ministre marocain de l’Economie et des Finances; «l’apport de la BAD au Maroc va au-delà».
Des priorités partagées et une convergence de vues
Pour accélérer son développement et asseoir une économie forte, le Maroc a lancé des stratégies cruciales: stabilisation macroéconomique, Plan Maroc Vert, électrification et raccordement à l’eau potable étendus à l’ensemble du territoire (affichant aujourd’hui un taux de 99% et 97% respectivement), déploiement d’infrastructures, désenclavement du monde rural, diversification de l’économie qui met l’accent sur un gain de valeur ajoutée, plan d’accélération industrielle et création d’un fonds dédié en optant pour un modèle d’industrialisation intégrée, une politique énergétique ambitieuse et innovante qui mise sur les énergies renouvelables avec MASEN…
Les nombreux échanges qui ont ponctué cette journée de rencontres et de réunions de travail ont mis en lumière la convergence de vues entre la Banque et les autorités du Maroc. Notamment lorsque le président Adesina a décliné les Cinq grandes priorités que la BAD s’est assignées: «Eclairer l’Afrique et l’alimenter en énergie» -en témoignent les grands progrès qu’a enregistrés le Maroc ces vingt dernières années en matière de connexion électrique; «Nourrir l’Afrique», auquel fait écho le Plan Maroc vert, qui vise le développement de l’agriculture et de l’agro-industrie (et grâce auquel l’impact de la forte sécheresse de cette année est grandement atténué); «Industrialiser l’Afrique», à laquelle répond la stratégie industrielle du Maroc; et «Intégrer l’Afrique», le Royaume s’imposant comme un interlocuteur et un partenaire privilégié de nombreux pays africains, et promettant son retour proche au sein de l’UA.
Quant à la COP22, qui se tiendra en novembre 2016 à Marrakech, «vous pouvez compter sur le plein soutien de la Banque», a lancé le président Adesina (la BAD, qui finance déjà l’extension de l’aéroport de la ville ocre, co-organise le Pavillon Afrique et échange au plus près avec les autorités marocaines tout le long des préparatifs de cet événement «en terre africaine».
Des annonces fortes et de nouvelles perspectives de collaboration
« je souhaite que l’on travaille ensemble », a déclaré le président Adesina à l’adresse des autorités marocaines, évoquant tour à tour les enjeux du changement climatique et les financements requis, la nécessité d’une tarification différentiée pour les prêts octroyés aux investissements climatiques dans les pays les plus fragiles, l’agriculture et l’agro-industrie, l’eau et l’assainissement, l’intégration financière (la BAD et l’ASEA viennent de signer, mi-juillet, un protocole d’accord qui implique notamment la place boursière de Casablanca)… Les opportunités de collaboration sont riches de promesses.
Sans perdre plus de temps, le président Adesina a émis une première proposition concrète: «créer avec le Maroc un fonds de private equity» pour doper les investissements dans l’agriculture. Et d’inviter le pays à faire profiter le reste du continent de l’expertise qu’il a développée en certains secteurs.
Le Maroc, investisseur panafricain
Le Maroc s’est imposé comme un investisseur de poids en Afrique subsaharienne, accélérant ses efforts en ce sens ces quinze dernières années. Premier investisseur en Côte d’Ivoire, le pays occupe la troisième place africaine des investisseurs étrangers à l’échelle du continent, derrière l’Afrique du Sud et l’Égypte. Signe de cette politique volontariste: «nous avons supprimé les droits de douane pour tous les pays d’Afrique subsaharienne», ainsi que l’a rappelé, mercredi 20 juillet 2016, le ministre de l’Economie et des Finances, Mohammed Boussaïd -à ce titre gouverneur de la BAD pour le Maroc. Une décision dont le président Adesina, chantre de l’intégration de l’Afrique, a salué le pragmatisme: «On doit réussir l’intégration, nous n’avons pas le choix. L’Afrique doit s’intégrer pour élargir ses marchés».
Source : BAD