«Ne croyez surtout pas que je me permettrais de dépasser les prérogatives stipulées par la Constitution pour ce qui est de l’exercice de ma fonction en tant que président», a déclaré Béji Caïd Essebsi, président de la République lors d’une réunion organisée récemment informelle avec un parterre de journalistes.
A l’ordre du jour, la situation désastreuse dans laquelle se débat le pays aussi bien sur le plan socioéconomique que politique.
Grands temps pour que les plus hautes autorités de l’Etat confessent au peuple la vérité sur la réalité du pays. Des caisses sociales qui frisent la faillite, une production de phosphate qui n’a pas repris, Petrofac prise en otage par une bande de jeunes endoctrinés par Hizb Attahrir et d’autres de la gauche, ce qui a pour conséquence: de l’électricité et du gaz payés plus cher par les contribuables.
Avis à la majorité silencieuse indifférente. Des jeunes qui ont osé jeter un véhicule de police qui a coûté des centaines de milliers de dinars en pleine mer et qui veulent bénéficier de l’impunité. Ils sont au nombre de 26 recherchés mais protégés par des insulaires qui veulent avoir de l’ordre tout en maltraitant les agents de l’ordre! Cauchemardesque!
Le président de la République n’a pas été dans les détails, mais il a paru réellement indigné quant aux atteintes répétées sur l’autorité de l’Etat: “Ce qui se passe à Gafsa et à Kerkennah est inadmissible. Il faut un État fort pour faire régner l’Etat de droit. Il faut aussi soutenir le gouvernement dans ses tentatives pour rétablir l’ordre”. Une posture approuvée par la majorité des représentants des médias présents.
Des médias qui ont clairement appelé le chef de l’Etat à user de son autorité morale et d’exercer son magistère pour sauver la Tunisie du chaos dans lequel elle se débat, en l’absence de grandes prérogatives constitutionnelles.
“Je suis conscient, averti des dangers que vit notre pays, je suis sensible aux souffrances du peuple dont certains pans dans l’incapacité de subvenir à leur existence convenablement et dignement. Mais que vous voulez vous, nous ne pouvons construire une maison solide qu’avec des matériaux adéquats. Aujourd’hui de quoi je dispose en tant que président? De peu de choses. Cela ne m’empêchera pas pour autant de faire le nécessaire pour assurer”.
Béji Caïd Essebsi a dû recevoir une salve de questions se rapportant aux relations douteuses du directeur exécutif de Nidaa Tounes avec certains milieux d’affaires peu recommandables, au fait que des affaires traitant des intérêts de l’Etat soient débattus dans des hôtels et des cafés, à la propagation du commerce parallèle jusqu’à atteindre les grandes artères du centre-ville dont l’Avenue Habib Bourguiba. “Vous vous rendez compte, monsieur le président, on vend des grillades dans des gargotes au centre de l’Avenue la plus emblématique de la Tunisie, au vu et au su des autorités compétentes”, a déploré un des journalistes!
Las et amer, mais décidé. C’est ce qui transparaît de l’attitude du président de la République. Il a soigneusement évité les questions embarrassantes se rapportant au rôle de Hafedh Caïd Essebsi dans le parti “Nidaa”, même si sa désapprobation n’a pas été déclarée, diplomatie oblige, a été flagrante. Il a appelé à ne pas faire d’amalgame entre lui et le parti Nidaa lequel “n’existe presque plus”.
Il a aussi reconnu avoir commis une erreur de jugement en considérant l’islam politique comme étant compatible avec la démocratie et en défendant ses porteurs partout dans le monde.
Béji Caïd Essebsi est aussi revenu sur la Constitution. “Pour nous, le fait d’avoir engagé un mouvement pour lutter contre la première version où il était stipulé que la femme est la complémentaire de l’homme, que la Chariaa peut être une source de législation, est une victoire. Ceci étant, la mise en application de la deuxième version de cette Constitution a montré qu’elle porte en elle des défaillances, nous sommes acculés à la respecter”.
BCE a voulu, à travers cette série de rencontres avec les médias les plus importants du pays, appeler les journalistes à être des acteurs importants dans le rétablissement de la dignité, le prestige et l’autorité de l’Etat. “La responsabilité est partagée entre présidence, gouvernement, organisations nationales, médias et acteurs de la société civile pour sauver le pays. Le pacte de Carthage l’a énoncé. Il engage tous les signataires à respecter ses clauses et son programme, ce qui permettra, en principe, de désamorcer la crise que traverse la Tunisie”.
Espérons que cela ne sera pas qu’un vœu pieux.