Son nom a beaucoup circulé ces derniers jours pour remplacer Habib Essid à la primature. Il s’agit de Youssef Chahed, ministre des Affaires locales. Le président de la République, Béji Caïd Essebsi, vient de proposer son nom comme futur chef du Gouvernement d’union nationale (GUN), et ce lors de la réunion de consultations tenue à ce sujet, dans la soirée de lundi 1er août 2016, au palais de Carthage.
Cette “désignation“ de Youssef Chahed pourrait être officialisée dès mercredi 3 août, selon des sources bien informées dans l’entourage du chef de l’Etat.
Ont pris part au démarrage de ces consultations des représentants de trois organisations nationales, en l’occurrence le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), Houcine Abbassi, le président de l’Union tunisienne de l’agriculture et la pêche (UTAP), Abdelmajid Ezzar, et le vice-président de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), Hichem Elloumi, selon la page Facebook de la présidence de la République.
Quant aux partis politiques, ils étaient représentés par Rached Ghannouchi (Ennahdha), Slim Riahi (UPL), Mohsen Marzouk (Machrouu Tounes), Kamel Morjene (Initiative Destourienne), Samir Ettaieb (Voie Démocratique et Sociale), Hafedh Caïd Essebsi (Nidaa Tounes), Yacine Brahim (Afek Tounes), Zouheir Maghzaoui (Mouvement Echaab) et Issam Chabbi (Parti Républicain).
Mais qui est Youssef Chahed?
Youssef Chahed est né le 18 septembre 1975 à Tunis, marié et père d’une fille. Il est titulaire d’un diplôme en agroéconomie de l’Institut national agronomique de Tunis (INAT) en 1998, et d’un doctorat en sciences agronomiques en France. Il parle trois langues étrangères (français, italien et anglais) en plus de l’arabe.
Il est également chercheur et professeur universitaire en agroéconomie et a enseigné dans plusieurs universités tunisiennes et françaises; en plus d’être professeur-visiteur dans de nombreuses universités à travers le monde.
Auteur de nombreux rapports et articles scientifiques sur les politiques publiques en agriculture et les secteurs de production agricole en Tunisie, il était l’un des membres fondateurs du parti “El Joumhouri” avant d’adhérer au parti Nidaa Tounes, en tant que membre du bureau exécutif.
Dans le premier gouvernement Essid, il fut nommé secrétaire d’Etat à la Pêche. Puis à la faveur de la formation du gouvernement Essid II en février 2016 et jusqu’à aujourd’hui, Youssef Chahed occupe le poste de ministre des Affaires locales, et ce suite à la division du département de l’Intérieur en deux entités distinctes –ministère de l’Intérieur et Affaires locales.
Alors si Youssef Chahed, âgé seulement de de moins de 41 ans, était confirmé en tant que chef du gouvernement, ce serait une première en Tunisie. Est-ce à
Est-ce à dire que la Tunisie se dirige vers “la normalité“ politique du 21ème siècle? Seul l’avenir nous le dira. Est-ce un cadeau? Sûrement pas, compte tenu de la situation dans laquelle se trouve notre pays.
Oui, la Tunisie a besoin de changements… dans tous les domaines. Mais est-ce que Youssef Chahed saura les apporter? On peut y répondre par la négative, et ce pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que souvent en politique, la volonté à elle seule ne suffit pas. Il en faut beaucoup d’autres ingrédients pour réussir, comme le soutien d’un parti politique, avoir les coudées franches, avoir de l’expérience…
Ensuite, comme son prédécesseur, Youssef Chahed risque d’être prisonnier des “parties“ qui vont le cautionner, à commencer par la présidence de la République jusqu’à l’UGTT en passant par Nidaa Tounes, Ennahdha, UPL, Afek Tounes… Autant dire qu’il sera soumis à plus de pression que Habib Essid, vu le nombre important de “parties“ intervenantes dans la gestion de son gouvernement. Car ne l’oublions pas, il est appelé à diriger un gouvernement d’union nationale (GUN), lequel se transformera très vite en “gouvernement de multiples parties“ (GMP), avec tout ce que cela entraîne comme égos, défense des intérêts et de position, susceptibilités…
Compte tenu de ce qui précède, le futur jeune chef de gouvernement aura la tâche extrêmement hardie, et ce quel que soient sa personnalité, son charisme, son tact, son intelligence, sa sagesse. Car, il y a une montagne de travail qui l’attend en matière de réformes : politique, socioéconomique, financière, fiscale, douanière…
Son premier défi sera de trouver les hommes qu’il faut à la place qu’il faut… sans être soumis aux diktats des “parties“. Autrement dit, pourra-t-il composer son cabinet de façon indépendante, à la différence d’un Habib Essid?
Son second défi sera celui de pouvoir poursuivre des réformes entamées voire en initier d’autres.
En tout cas, la Tunisie est au bord de l’abîme, et de ce point de vue, elle a besoin d’un sauveteur. Mais est-ce que celui-ci sera un certain Youssef Chahed? Wait and see !