La Tunisie devrait proposer une contre-offre à celle de l’Union européenne dans le cadre de l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA), dont le prochain round des négociations aura lieu au mois de novembre 2016. C’est ce qu’a déclaré Lobna Jeribi, présidente de l’association “Solidar Tunisie” lors une conférence internationale tenue dimanche, à Tunis.
Selon elle, “afin qu’elle renforce sa position lors des négociations, l’offre de la Tunisie sur l’ALECA, lancé depuis octobre 2015 et qui touche les services et produits agricoles, devrait être fructueuse, synergique et capable de relever les défis auxquels est confrontée la Tunisie”, lors de cette conférence tenue sur le thème “Pour une vision progressiste des accords commerciaux UE-Tunisie: un partenariat équitable pour la solidarité.
En tout cas, “nous proposerons au gouvernement, à la société civile et à toutes les organisations professionnelles une déclaration finale commune entre la partie tunisienne et celle européenne, élaborée par notre association et Global progressive forum, coorganisateur de cette conférence”, a-t-elle promis.
Pour elle, cette approche souligne la nécessité de tenir compte des déséquilibres démographiques et économiques évidents entre l’UE et la Tunisie, préconisant l’adoption d’une stratégie asymétrique en faveur de la Tunisie, graduelle et progressive dans les négociations et qui prenne en compte le schéma de développement économique de la Tunisie, ses priorités et ses ambitions.
Celle-ci devrait permettre de préserver les secteurs jugés sensibles par les parties, en concertation avec la société civile et préserver les services publics et la culture, tout en permettant le développement du secteur des services marchands en Tunisie.
Le document appelle à la prise en compte et à la résolution des problèmes structurels du secteur agricole tunisiens avant toute libéralisation, alors que l’offre européenne propose une période de transition pour la libéralisation de ce secteur allant de 0 à 10 ans en fonction du produit.
Selon cette déclaration, il est nécessaire d’intégrer dans le cadre de l’ALECA, les transferts technologiques et le développement des activités de la recherche et développement à travers les échanges entre les entreprises tunisiennes et européennes ainsi que la mobilité des citoyens dans l’espace tuniso-européen, sur la base de la non-discrimination.
En outre, un processus de reconnaissance mutuelle des diplômes devrait être mis en œuvre dans le cadre de l’ALECA via un système d’accréditation des institutions délivrant les diplômes.
De même, l’ALECA devrait contribuer à renforcer les acquis de l’Europe et de la Tunisie en matière de normes sociales et de travail garantissant les conditions d’un travail décent et l’inclusion des femmes sur le marché du travail.
De son côté, Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des Relations avec les institutions constitutionnelles, la société civile et des droits de l’Homme, dira que les négociations sur l’ALECA entre la Tunisie et l’UE ne devraient pas se contenter du volet technique mais devraient aussi refléter un aspect politique, et que la réussite de l’expérience tunisienne favorisera le développement dans la rive Sud de la Méditerranée. L’ALECA, a-t-il fait remarquer, n’est pas le choix du gouvernement mais une nécessité économique que les deux parties œuvreront à faire réussir.
Pour sa part, Gilles Pargneaux, coordinateur S&D de l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la Méditerranée, relèvera que l’ALECA est une opportunité pour dynamiser l’économie tunisienne qui subit depuis cinq ans des difficultés économiques, appelant à la création de projets environnementaux, de lutte contre les changements climatiques dans le cadre de l’ALECA, ainsi que des investissements dans le tourisme et la recherche et développement.
Au sujet de l’ALECA et l’agriculture, Omar Béhi, secrétaire d’Etat à la Production agricole, a souligné que l’ALECA est une opportunité à saisir et non une difficulté, à condition d’assurer la mise à niveau du secteur agricole tunisien.
Pour Ridha Ben Mosbah, conseiller auprès du chef du gouvernement chargé du dossier de l’ALECA, le choix de la Tunisie pour lancer les négociations sur l’ALECA est courageux mais ce choix explique la conviction de la Tunisie que l’intégration est le moteur de la croissance et le levier de la compétitivité, appelant à intégrer l’aspect de l’asymétrie, tenir compte de la sensibilité de certains secteurs et mener des études d’impact pour identifier les mesures d’adaptation des programmes de mise à niveau.