C’est devenu une habitude. Chaque fois qu’un ministre ou un haut cadre d’un ministère ose dire, dans le cadre d’un séminaire, que son département est en train de diagnostiquer la situation en vue de l’élaboration d’une étude stratégique, il provoque auprès de son auditoire hilarité, indignation et tollé général dans la salle.
Le directeur général du bureau de la planification et des équilibres hydrauliques au ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, Abderrazek Souissi, en a dernièrement fait les frais, lorsqu’il avait indiqué, lors d’un débat sur l’eau, que le premier objectif de la stratégie «Projet eau 2050» -un vieux projet qui remonte à 2009- est de faire un diagnostic de la situation.
Cette déclaration a provoqué l’ire des experts qui y ont perçu des signes de corruption (nouvelles commissions) et une perte de temps dans la mesure où les problèmes de l’eau en Tunisie ont été identifiés depuis des décennies, en l’occurrence: surexploitation des nappes souterraines, vieillissement de l’infrastructure hydraulique et son corollaire l’envasement des barrages engendrant des menaces pour la qualité de l’eau, report de la réalisation de plusieurs grands projets, épuisement des ressources hydrauliques (notamment souterraines), augmentation du taux de salinité de l’eau et faible taux d’approvisionnement en eau des zones rurales, notamment dans le nord-ouest et certains gouvernorats du centre-ouest.
Le potentiel mobilisable est aussi connu. Il est estimé à 5 milliards m3, dont près de 2 milliards sont consacrés à l’agriculture, tandis que le reste est utilisé pour satisfaire les besoins en eau potable, l’usage domestique, touristique et industriel.
Il faut reconnaître que cette allergie au diagnostic et aux études stratégiques a tendance à devenir une véritable problématique en ce sens où le premier réflexe d’un nouveau ministre est d’engager un nouveau diagnostic en vue d’une nouvelle étude stratégique.
Le ministère du Tourisme et de l’Artisanat a connu le même scénario. Chaque ministre qui arrive élabore sa propre stratégie. Il a fallu que la jeune ministre de l’époque, Amel Karboul, ose mettre fin à cette mascarade et groupe toutes les stratégies en un seul document. Il faut faire autant dans le reste des ministères.