“Penser la Tunisie des 10 prochaines années nécessite forcément un renforcement des capacités du marché financier. Il est donc impératif d’effectuer une transition vers un modèle de financement diversifié, qui ne repose pas sur le seul financement bancaire”.
C’est l’avis de Mehdi Ben Mustapha, cadre au CMF (Conseil du Marché Financier), qui invite à avoir une vision manichéenne de la concurrence entre finance intermédiée et finance directe, les deux étant complémentaires.
Il a ajouté qu’au niveau du CFM ils ont un feedback très important de plusieurs chefs d’entreprise qui considèrent que l’introduction en Bourse, en plus de la levée de capitaux, leur a permis d’asseoir une crédibilité vis-à-vis de leurs banquiers, a-t-il affirmé lors d’un atelier, organisé sur “le rôle de la Bourse dans le financement du développement” par l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES).
“Afin de favoriser la migration vers un modèle de financement multiforme, le CMF a effectué une cartographie des réticences exprimées par les chefs d’entreprise quant à l’introduction en Bourse”, a-t-il ajouté. Parmi celles-ci figure “une réelle peur exprimée par les chefs d’entreprise de perdre le contrôle de leurs entreprises”. Cette peur est parfois confortée par un comportement non-incitatif, pour ne pas dire agressif de certains actionnaires minoritaires dans les instances des sociétés en question, a expliqué Ben Mustapha. Or, il faut savoir qu’il ne s’agit pas d’une perte réelle de contrôle mais d’une perte imaginaire due à un certain interventionnisme non-souhaité de certains actionnaires minoritaires.
La cartographie des réticences fait également ressortir “une peur de médiatisation non maîtrisée de l’entreprise. L’entreprise devient publique. Les analystes et la presse spécialisée en parlent et cela fait peur aux chefs d’entreprise.
Il y a aussi les contraintes réglementaires, ajoute-t-il. Et au vu de ces réticences, le CMF a essayé, selon Mehdi Ben Mustapha, d’établir certains axes de travail, pour pouvoir corriger le tir. Ainsi, “le premier axe c’est d’être à l’écoute des attentes et des besoins des chefs d’entreprise. Le deuxième consiste à accentuer la régulation pour que l’épargnant ait confiance dans le marché et y investisse. L’autre axe c’est l’amendement des exigences réglementaires pour les adapter à la taille de certaines entreprises. Cet amendement vise principalement le marché alternatif qui est dédié aux entreprises en difficulté et aux PME. Le quatrième axe concerne plutôt la demande et consiste à attirer les investisseurs institutionnels privés et publics vers le marché financier qui reste dominé par les petits porteurs”.