La nécessité d’appliquer la loi dans la lutte contre l’évasion fiscale, d’instaurer une justice fiscale, et de partager les sacrifices, dans ce contexte délicat que traverse le pays, tels sont les principales recommandations adressées par les participants à la 4éme session du Forum de la Fiscalité, organisée, jeudi, à Sfax, sous le thème “Les lois de finances en temps de crise”.
Dans son intervention, Fayçal Derbel, ministre conseiller auprès du chef du gouvernement, a critiqué les politiques financières et économiques qui se sont succédé, après la révolution, considérant que les crises vécues par le pays depuis 2011, sur les plans économique et fiscal, sont essentiellement nourries par une “pauvreté de réflexion et une absence de planification”.
Il a aussi dénoncé les amnisties fiscales successives, le recours régulier aux lois de finances complémentaires et les mesures décidées contre l’évasion fiscale qui n’ont fait qu’amplifier le phénomène.
Il a, par ailleurs, affirmé qu’il n’y a d’autres alternatives que la transparence pour réformer le système fiscal -pilier essentiel de la réforme économique- et affronter les crises financières, exprimant son étonnement quant à la demande incessante d’augmentation des salaires, face aux difficultés que rencontrent l’économie et le budget de l’Etat, et à l’explosion de l’endettement.
Réagissant à l’intervention de Fayçal Derbel, Fadhel Abdelkafi, ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, a souligné que le contexte politico-économique exceptionnel et la transition démocratique, que traverse la Tunisie, nécessitent des sacrifices et des efforts de tous, sans exception. Et c’est “cet esprit que doit refléter le dialogue autour de la Loi de finances 2017”.
Abdelkafi s’est dit, en outre, optimiste quant à la capacité de la Tunisie à surmonter les difficultés et de retrouver son équilibre économique, en rétablissant la valeur travail. “Le salut du pays passe par une volonté collective et une détermination de tous de trouver les solutions de sortie de crise qui existent encore”.
De son côté, Hakim Ben Hammouda, ex-ministre de l’Economie et des Finances, a considéré que la situation économique actuelle est critique, et que la lutte contre la contrebande et l’évasion fiscale se heurte souvent à une faible application des mesures décidées dans ce domaine, durant les dernières années.
Pour sa part, Neji Baccouche, professeur de droit, a relevé que le retard enregistré dans la mise en application de la réforme fiscale, n’est pas seulement imputable à la complexité du système fiscal, mais à l’absence de mesures et de programmes bien étudiés. L’universitaire a appelé, à cet égard, à regrouper au sein d’un même code les textes fiscaux dispersés et à ouvrir un vrai dialogue national sur la fiscalité et la réforme fiscale, et les problématiques qui y sont liées et notamment celles de l’évasion et de la fraude fiscales.
Participant au débat, Ahmed Bouzguenda, président de l’IACE, a insisté sur la nécessité de lancer le “chantier fiscal”, dans les plus brefs délais, pour faire face à la crise des finances publiques, qui se traduit par l’incohérence entre les dépenses de gestion et de développement dans le budget de l’Etat, et la contrainte de recourir régulièrement à des lois de finances complémentaires, dont les coûts sont comparables à ceux des lois de finances initiales.
Bouzguenda s’est également interrogé sur les raisons de l’incapacité de résoudre la problématique de la consommation des dépenses du titre II du budget, dont une partie est souvent reconduite vers le titre I, en l’occurrence vers le paiement des salaires.
Ahmed Masmoudi, président de l’IACE, Section Sfax, a pour sa part estimé que les débats qui ont eu lieu durant le Forum pourraient être traduits en recommandations dans l’objectif de favoriser l’identification des solutions aux problématiques soulevées au niveau de la Loi de finances 2017, d’aider les députés à statuer sur cette loi et de réduire le poids des tensions sociales et des tractations politiques, auxquelles cette loi a donné lieu.