Pour l’ancien ministre et gouverneur de la Banque centrale, la situation économique et financière actuelle de la Tunisie est plus difficile que celle à laquelle le pays a été confronté en 1986. Elle peut toutefois, selon lui, être redressée car le pays a des «points forts».
Près de six après avoir été démis de ses fonctions de gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), le 17 janvier 2011, Taoufik Baccar est de retour sur la scène publique. Par le truchement du Centre de prospective et d’études sur le développement (CPED), qui a organisé, jeudi 24 novembre 2016, une conférence-débat traitant d’«éléments de stratégie pour une sortie de la crise», dont l’ancien gouverneur était le keynote speaker.
Créé à la fin de l’été, le CPED s’est fixé sept objectifs, dont en particulier l’évaluation et le suivi de la conjoncture économique et financière, la production d’études macroéconomiques et sectorielles, en particulier le secteur financier, et de papiers «portant des propositions et des recommandations susceptibles d’améliorer la performance de l’économie nationale et la situation sociale du pays», la mise en place –déjà en cours, selon un responsable du centre- d’une base de données couvrant le domaine économique et financier, et la création d’observatoires à caractère sectoriel ou régional.
«La création de ce centre a été faite suite à l’insistance d’amis, en raison de la situation du pays dans les domaines économique et financier et qui nécessite que chacun contribue à partir de sa position à régler les problèmes du pays», explique Taoufik Baccar.
L’action du CPED repose sur deux principes fondamentaux: d’abord, le volontariat de ses membres qui en assurent le financement avec leurs contributions financières, et, ensuite «la neutralité et l’indépendance par rapport au gouvernement et à tous les partis», souligne Me Samir Abdellah, vice-président du centre.
En trois mois d’existence, le CPED a déjà élaboré un premier rapport dans lequel il établit un diagnostic de la situation économique et financière du pays et fait des propositions en vue de la redresser. «Il ne s’agit que d’une contribution susceptible d’être enrichie et modifiée», insiste M. Baccar.
Dans sa présentation, l’ancien gouverneur de la Banque centrale a développé une analyse sans concession de la situation du pays aux plans économique, financier et … psychologique:
de «grandes difficultés économiques», une «détérioration sans précédent des finances publiques», un «horizon bouché», et même «un sentiment d’abattement».
Économiquement, le taux de croissance «ne dépasse pas 1,5%», très loin des 4,5 à 5% de l’avant-14 janvier 2011. En résumé, pour M. Baccar la situation actuelle est plus difficile que celle de 1986 puisque «les indicateurs sont plus mauvais» et «l’endettement et le déficit plus élevés».
Le président du CPED admet, certes, que «toute transition politique a un coût», mais que celui que «subit la Tunisie est lourd».
Toutefois, l’ex gouverneur de la BCT ne se laisse pas aller au désespoir. Car, dit-il, «la Tunisie a des points forts sur lesquels on peut se baser: une expérience en matière de sortie de crise et une administration encore capable de contribuer» à l’effort de sauvetage et de relance du pays «si on la libère des pressions pesant sur elle».
Moncef Mahroug