Selon Adel Hentati, conseiller et expert en environnement, «la délégation tunisienne à la 22e conférence des Nations unies sur les changements climatiques (Cop22), qui vient de se tenir à Marrakech au Maroc (7-18 novembre 2016), n’a pas proposé de projets environnementaux pour financement». L’expert, qui s’exprimait sur les ondes de la radio privée Express Fm, a rappelé que la Tunisie avait participé à ce sommet avec une très forte délégation de 120 personnes dont le chef du gouvernement, Youssef Chahed, et le ministre de l’Environnement et des Affaires locales, Riadh Mouakher.
Il a ajouté que «des pays en développement comme le Liberia et le Népal ont proposé à la COP22 des projets environnementaux et ont bénéficié de subventions à hauteur de 2,2 et 2,9 millions de dollars respectivement».
Empressons-nous de signaler le bien-fondé de cette déclaration en ce sens où aucune partie officielle en charge du dossier de l’économie verte et du développement durable ne l’a démentie.
Le sommet de Marrakech était pourtant chargé des financements
Il s’agit de toute évidence d’une grosse défaillance du gouvernement tunisien d’autant plus que le sommet de Marrakech, qui relaye celui de Paris en 2015 (COP21), avait pour mission majeure d’examiner «la lancinante question des financements».
En vertu d’une recommandation du sommet de Paris en 2015, les nations industrialisées s’engagent à mobiliser en faveur des pays en développement au moins 100 milliards de dollars (90 milliards d’euros) par an, d’ici à  2020, de financement climat du Nord vers le Sud. Ces fonds d’appui sont censés aider les pays les pauvres, qui seront aussi parfois les plus touchés, à faire face aux changements climatiques et à investir dans une économie plus verte. Cela pour dire qu’il y avait de l’argent à prendre.
Mieux, l’Accord de Paris prévoit un soutien adéquat aux nations en développement dont la Tunisie et établit un objectif global pour renforcer l’adaptation au changement climatique de manière significative grâce à la coopération internationale.
La coopération internationale en matière de technologies sûres pour le climat et le renforcement des capacités pour lutter contre le changement climatique dans le monde en développement sont aussi renforcés par le nouvel accord.
Concernant la Tunisie, l’Accord de Paris était une perche de salut. Petit pays méditerranéen aux 1.300 KM de côtes environ, et sérieusement exposé aux impacts du dérèglement climatique, pour peu que les températures augmentent de 1,1% degré C d’ici 2030, la Tunisie aurait dû se préparer, comme il se doit, au sommet de Marrakech et présenter, aux bailleurs de fonds et autres financeurs privés et publics, des projets bien ficelés en ce qui concerne la préservation de son littoral considéré comme un patrimoine intéressant toute l’humanité.
Conséquence : la Tunisie aurait dû mettre à profit le sommet de Marrakech pour solliciter une importante aide financière qui lui permettrait de répondre aux conséquences des dérèglements climatiques lesquels sont, d’ores et déjà , visibles à travers l’accentuation de son aridité et la répétition de catastrophes naturelles dans de nombreuses régions (sécheresse, inondations…), faits probablement liés aux changements climatiques en cours.
Elle aurait pu également tirer profit des technologies que la communauté internationale a décidé de mettre à la disposition des pays menacés.
Un ratage impardonnable
Mais rien de tout cela n’est fait. Cette négligence assassine qui a privé le pays d’importants fonds multilatéraux et bilatéraux ne doit pas passer inaperçue. Si on peut excuser le gouvernement qui vient d’être nommé, l’administration en charge du dossier, en l’occurrence le département de l’environnement, doit rendre compte et expliquer cette grosse bourde.
Ce manquement vient illustrer du reste que l’économie verte retenue comme une des trois principales composantes du futur modèle de développement du pays avec l’économie numérique et l’économie solidaire, est pour nos officiels une simple profession de foi, voire un jeu de mode et non un enjeu. Les résistances au sein des entreprises publiques opérant dans l’énergie (STEG, ETAP, STIR…) contre l’économie verte sont apparemment très fortes.
Et pour ne rien oublier, la nouvelle COP est une convention universelle contraignante depuis le sommet de Paris (COP21). Elle offre un cadre global de négociations sur le climat, reconnaît l’existence d’un changement climatique d’origine humaine et donne aux pays industrialisés le primat de la responsabilité pour lutter contre ce phénomène. Elle se tient chaque année dans un continent. Après la «Cop africaine» de Marrakech, la COP23 se tiendra l’année prochaine en Asie. Espérons cette fois-ci qu’on sera au rendez-vous.
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