La loi des Finances 2017 a été élaborée dans un contexte particulier de passage d’un gouvernement à un autre et dans une situation où le pays est appelé à se conformer à des engagements pris auprès des institutions financières internationales et particulièrement le FMI.
Les difficultés budgétaires étaient d’ailleurs prévisibles pour l’année 2017 comme je l’ai signalé dans un statut (1) publié en 2015 sur le titre «l’année 2017: l’année de tous les risques» compte tenu de l’impact en année pleine des augmentations de salaires et des remboursements au titre de la dette après l’arrivée à échéance d’une partie du crédit contracté auprès du FMI.
La loi de Finance 2017 ne s’appuie pas sur une quelconque vision surtout que le contenu du plan (2016-2020) se trouve aujourd’hui dépassé et chose inhabituelle, le budget de l’Etat a été élaboré avant le budget économique, ce qui signifie que les équilibres globaux du pays ont été esquissés après l’équilibre budgétaire alors que c’est le chemin inverse qui aurait dû être emprunté.
Le budget 2017 comme les précédents budgets est porteur de déficits et n’incarne pas d’inflexion claire en direction de la maitrise des déficits: un budget qui croit de 11% pour un PIB qui augmente de 7% environ à prix courants.
Les hypothèses sur lesquelles se base le budget ne sont pas plausibles : 50$ le baril de pétrole alors que les instances internationales évaluent à plus de 55$ le prix du pétrole attendu pour 2017 et un taux de change d’un dollar à 2,25 dinars, soit quasiment le niveau actuel alors que tout plaide pour une poursuite de la baisse du dinar.
Une croissance économique de 2,5% tirée par la consommation et l’investissement alors que certaines dispositions de la loi des Finances risquent de freiner tant la consommation que l’investissement (institution d’une contribution conjoncturelle exceptionnelle, augmentation de la pression fiscale de 20,6% à 22,1% du PIB, TVA sur certains produits…).
L’estimation de l’impact financier de certaines mesures est incertaine: la contribution conjoncturelle ne pourra pas rapporter dans tous les cas de figure des ressources supplémentaires de 900 MDT.
Compte tenu de ces données le budget de 2017 sera très vraisemblablement réactualisé par une loi des finances complémentaires.
Maintenant il va falloir se tourner vers les réformes urgentes sur lesquelles il importe de travailler rapidement. Quatre réformes prioritaires à mettre en place au plus tôt:
1- La réforme de la fonction publique essentiellement par la mise en œuvre d’un programme de redéploiement et si possible de réduction des effectifs. Je pense que trois pistes sont à explorer :
Primo: redéployer les effectifs vers les secteurs à besoins (contrôle fiscal, Administration régionale, nouveaux corps à créer dans les domaines de la lutte contre l’économie parallèle et la protection de l’environnement etc…).
Secundo: Ouvrir les portes de la retraite anticipée.
Tertio: faciliter les possibilités de sortie en congé/création d’entreprises.
2- La réforme des retraites, une réforme dont l’urgence n’est plus à démontrer car le budget n’a plus les moyens de soutenir ces caisses pour lesquelles des dotations importantes ont été allouées : 300 MD en 2016 et 500 MD en 2017 compte non tenu des besoins de la CNSS et les besoins vont en s’accroissant, bientôt ce sont des milliards de dinars que le budget devra allouer à ces régimes, ce qu’il ne pourra pas faire.
3- La réforme de la fiscalité; le temps est venu de capitaliser sur le travail fait et de faire les choix. Le CPED a avancé des propositions dans ce sens. Il importe également de trouver les moyens de s’attaquer à l’économie parallèle qui ronge le pays. A ce titre autant je suis contre le changement des billets de banques autant je suis pour la levée du secret bancaire, mesure sans laquelle les services fiscaux ne peuvent travailler efficacement (voir annexe sur cette question).
4- Les réformes nécessaires pour accélérer la croissance et notamment celles relatives à la mise en confiance des opérateurs (textes d’application du code d’investissement, loi sur la réconciliation économique…) et le rééquilibrage du modèle de croissance.
2017, l’année de tous les risques pour la Tunisie, selon Taoufik Baccar
Par Taoufik Baccar