“La demande excédentaire du dollar par rapport à l’offre, la réduction de l’intervention de la Banque centrale de Tunisie et l’appréciation du dollar américain à l’échelle internationale, voilà les raisons derrière la tendance baissière du dinar tunisien par rapport au dollar US, ces dernières années”. C’est en tout cas ce qu’a déclaré Fatma Marrakchi Charfi, professeur en Sciences économiques à la Faculté des sciences économiques et de gestion de Tunis (Université de Tunis El Manar).
“La première raison est endogène à la Tunisie et est inhérente à la demande excédentaire du dollar par rapport à l’offre. En effet, tant que le dinar est sous pression, il ne peut que perdre de sa valeur. La rareté du dollar a fait que le dinar s’est déprécié de 6,1%, de 11,5%, de 7,6% et de 14,1% respectivement sur 2013, 2014 2015 et 2016 (statistiques BCT).
La principale cause de cette régression est l’ampleur du déficit commercial qu’a connu la Tunisie sur les dernières années (baisse des exportations des phosphates) qui a impacté directement et négativement le déficit courant. Le déficit commercial n’étant plus compensé par l’excédent de la balance des services et notamment la balance touristique influe négativement sur la valeur du dinar. A titre indicatif, le solde des services atténuait 93% du déficit commercial en 2005, il n’absorbe que 22% du déficit commercial en 2014 et uniquement 7% en 2015. En effet, le solde courant par rapport au PIB a affiché d’importants déficits (8,3% en 2013, 8,9% en 2014 et 8,7% en 2015)”, a-t-elle expliqué.
“La deuxième raison revient à la réduction de l’intervention de la Banque Centrale. En effet, pour défendre le dinar, il faut d’abord disposer de réserve en dollars suffisantes, outre les montants en dollars nécessaires pour payer les importations et pour honorer le service de la dette. En raison de la pénurie de devises, la BCT ne peut que laisser faire les forces du marché, avec des interventions “a minima”, au détriment d’une stabilité du taux de change”, a-t-elle encore précisé.
Pour Mme Charfi, “la troisième raison est exogène au fonctionnement de l’économie tunisienne et trouve son origine dans le fait que le dinar subit l’effet de l’appréciation du dollar américain à l’échelle internationale qui était en hausse vis-à-vis des principales devises notamment l’euro.
Les performances de croissance enregistrées de l’économie américaine, les rendements obligataires favorables et un relèvement des taux d’intérêt aux USA, qui a eu lieu effectivement après une annonce ayant longtemps précédé cette augmentation, ont entrainé une hausse de la valeur du dollar.
D’ailleurs, d’autres pays ont subi l’appréciation du dollar plus fortement que la Tunisie, tels que le Nigeria, la Turquie et l’Egypte, mais moins fortement que la Tunisie (Pologne, Chine, Inde, Singapour et les Philippines)”.