L’imposition d’une contribution conjoncturelle exceptionnelle de 7,5% sur les bénéfices des sociétés, le retard pris pour l’entrée en vigueur de la loi de l’investissement repoussée au mois d’avril 2017, mais aussi pour la promulgation de la loi relative aux avantages fiscaux, les tensions sociales et la surenchère syndicale … sont autant de préoccupations formulées par les responsables des entreprises allemandes installées en Tunisie, au chef du gouvernement, Youssef Chahed, lors d’une rencontre organisée samedi 14 janvier par la Chambre tuniso-allemande de l’industrie et du commerce (AHK).
Au nombre des problèmes évoqués figurent également l’ampleur prise par l’économie informelle, les blocages administratifs, la complexité des procédures, la fermeture des frontières avec la Libye et le non-respect du facteur temps.
Raouf Ben Debba, président de l’AHK Tunisie, a souligné “le besoin de visibilité et de garanties juridiques, conditions essentielles pour promouvoir l’esprit d’entreprise et développer l’investissement allemand dans le pays”, résumant ainsi, les préoccupations des responsables allemands et tunisiens des entreprises allemandes.
Chahed: oui je vous comprends, mais…
Réagissant aux interventions des entreprises allemandes, Youssef Chahed a déclaré qu’il comprend les soucis formulés, mais “qu’il faut aussi prendre en considération la situation socio-économique difficile que traverse le pays depuis 6 ans. Il faut considérer l’importance des changements qui ont eu lieu en Tunisie. Tout le pays était focalisé sur la construction démocratique et il vrai que durant cette période, nous avons moins travaillé sur le volet économique et social. Nous avons reporté les réformes qu’il fallait initier depuis quelques années”.
Le chef du gouvernement a tenu, par ailleurs, à rassurer les investisseurs allemands: “aujourd’hui, nous avons déjà engagé les réformes nécessaires, notamment la réforme de l’administration publique, la lutte contre la corruption à travers la révision du cadre législatif y afférent, la réforme des caisses sociales, la lutte contre l’économie parallèle…”.
En ce qui concerne le climat des affaires, Chahed a affirmé l’engagement de son équipe à pallier à tous les obstacles qui se posent aux investisseurs: “nous avons déjà voté la loi de l’investissement qui entrera en vigueur avec ses décrets d’application le 1er avril 2017, lesquels décrets d’application ont été approuvés par le conseil des ministres, le 31 décembre 2016. Nous sommes déjà engagés sur la loi relative aux avantages fiscaux, qui est en cours d’examen par la Commission des finances de l’ARP et qui entrera également en vigueur le 1er avril 2017. Nous travaillerons également, à activer la loi sur les PPP, qui a été votée mais qui tarde encore à être appliquée et je pense que l’expérience allemande pourra nous être d’un grand soutien, dans ce domaine”.
Chahed a aussi évoqué la loi d’urgence économique, “dont l’adoption a pris du retard mais que le gouvernement s’emploie à relancer”.
S’agissant de la contribution exceptionnelle de 7,5% sur les bénéfices des sociétés, qui figure parmi les grandes inquiétudes des entreprises allemandes, le chef du gouvernement a souligné “qu’aucun gouvernement ne souhaite imposer une telle taxe, mais nous y avons été contraints, en raison de la situation difficile des finances publiques. Ce n’est aucunement une politique du gouvernement, c’est un impôt conjoncturel pour l’année 2017. Je comprends vos préoccupations, mais sans solidarité dans le partage des richesses, on ne peut pas renouer avec une croissance inclusive”.
Globalement, malgré les difficultés, Chahed a estimé que “le changement est initié et qu’une inversion de la tendance des courbes va certainement suivre. L’objectif c’est qu’en 2019, les clignotants commencent à virer au vert, pour un certain nombre d’indicateurs économiques”.
Déjà quelques indicateurs au vert…
Et d’ajouter: “on commence à voir aujourd’hui une amélioration de la croissance en Tunisie, nous avons quelques indicateurs positifs. A titre d’exemple, en termes de production du phosphate, nous avons enregistré, en 2016, le chiffre le plus élevé depuis la révolution, soit 3,7 millions de tonnes, avec une évolution mensuelle de 70 mille tonnes, durant les 4 derniers mois. Une amélioration de la gestion du trafic au niveau du port de rades a également été réalisée avec une moyenne entre 0 et 2 bateaux en rade actuellement malgré la persistance de quelques problèmes logistiques”.
Au terme de son intervention, Chahed a formulé le souhait de ” voir se tisser une coopération plus étroite, plus inclusive en 2017, entre le tissu économique tuniso-allemand et le gouvernement tunisien”, rappelant que “258 entreprises allemandes sont aujourd’hui présentes en Tunisie, employant pas moins de 55 000 personnes, que 54 nouveaux projets allemands et 81 projets d’extensions ont été réalisés durant les 4 dernières années, et que les exportations de la Tunisie vers l’Allemagne ont augmenté de 10% durant les trois dernières années”.