Tel un médecin qui prend le pouls d’un patient, la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (CTFCI) a décidé d’ausculter les entreprises françaises de Tunisie afin de relever leur réaction au choc exogène qu’elles viennent de subir: la contribution conjoncturelle exceptionnelle de 7,5% décrétée dans le cadre de la loi de finances 2017.
De fait, afin de «recueillir le sentiment des entreprises françaises implantées en Tunisie sur les impacts éventuels» de ce nouvel impôt et «dans la perspective de définir une position sur cette question», la CTFCI a adressé trois questions à 240 entreprises à participation française: sont-elles au courant de cette disposition de la loi de finances 2017? L’ont-elles anticipé dans leur budget pour l’année qui vient de commencer? Quels seraient ses impacts sur leur activité en 2017 sur le plan de l’investissement et de la création d’emplois?
Bizarrement, seules 23 entreprises ont répondu au questionnaire. Et de ces réponses, il se dégage, selon la CTFCI, «un sentiment mitigé de surprise, de connaissance des nouvelles dispositions et d’inquiétude des impacts des nouvelles mesures qui risquent pénaliser davantage l’attractivité du site tunisien des affaires et d’éroder la compétitivité des entreprises».
Sur les 23 interrogées, une seule entreprise déclare, en réponse à la première question, ne pas avoir connaissance au préalable de cette disposition (COFITEL). Les autres étaient informées de la nouvelle mesure fiscale et expriment à son sujet «des réserves et quelques regrets». A titre d’exemple, la société Thomas Plastique Tunisie «a estimé qu’il aurait fallu soutenir les entreprises françaises installées en Tunisie qui font face à des difficultés pour maintenir leurs clients et pour investir» au lieu que prendre de nouvelles dispositions «qui altèreront leur compétitivité». Pour ARDIA, c’est le problème de rétroactivité qui pose problème dans la mesure où l’impôt en question concerne l’exercice 2016 payable en 2017.
A la deuxième question, deux entreprises seulement répondent avoir prévu cette mesure dans leur budget 2017. La majorité des entreprises, dont les budgets ont été établis bien avant l’annonce de la mesure, n’ont pas pris en considération son impact. A ARDIA, on affirme que «cette contribution conjoncturelle risque de mettre en doute la crédibilité des filiales tunisiennes du groupe». Pour d’autres, comme Air Liquide ou Stelia, cela rend nécessaire la révision du budget 2017.
Enfin, concernant la troisième question, «la quasi-totalité des réponses évoquent des impacts négatifs sur l’investissement, les opérations d’extension, l’emploi et la compétitivité. Les entreprises qui n’ont pas prévu le coût de cette mesure dans leur budget affirment que «l’application de cette impôt conjoncturelle pourrait se traduire par des coupes dans les investissements, sinon leur report, une réduction au niveau de l’encadrement et des salaires. Ainsi, la société Thomas Plastique évoque des «risques de réduction des investissements et des effectifs en 2017».
Les réponses au questionnaire de la CTFCI ont également fait ressortir «certaine inquiétude (…) au sujet de l’impact de certaines (autres) mesures contenues dans la loi de finances 2017”, dont l’article 14 portant révision du barème de l’impôt sur le revenu des personnes physiques”, sur la sécurité dans le pays, l’amélioration des performances de l’administration tunisienne, la relance de l’investissement (…) et “les difficultés qui persistent pour attirer de nouveaux clients notamment pour des missions de prospection”.