Moult indices montrent que le départ de Néji Jalloul, actuel ministre de l’Education, est une question de jours, voire de jours. Il faut reconnaître qu’au regard des enjeux, c’était déjà dans l’air. Tout le monde savait qu’il allait être sacrifié un jour ou l’autre. Les Tunisiens ne pouvaient pas supporter que leurs progénitures passent une année blanche.
Le premier indice le plus visible est certes la décision de la Commission administrative de l’enseignement secondaire relevant de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) d’annuler la suspension des cours à partir du 27 mars.
A regarder à la télévision les syndicalistes du secondaire jubiler et scander à gorge déployée leur victoire, il n’y a pas de doute. Ils ont obtenu des assurances que leur ennemi juré, le patriote et brave Néji Jalloul sera incessamment remplacé, et ce même si le secrétaire général de la centrale syndicale dément tout accord conclu en ce sens avec le chef du gouvernement, Youssef Chahed, lors de leur dernière rencontre (lundi soir 20 mars 2017).
Béji Caïd Essebsi a-t-il scellé le départ de Jalloul?
Pour mémoire, cette rencontre était intervenue après la diffusion de l’interview-monologue accordée par le chef de l’Etat à la chaîne Watania 1 à l’occasion de la célébration du 61ème anniversaire de l’indépendance.
Dans cette interview, les observatoires avertis y ont détecté un message assassin de BCE quand il a dit: «Un ministre n’est pas éternel à son poste». Et c’est là l’indice le plus déterminant.
C’était un message codé attendu annonçant au tandem Chahed-Taboubi, alors en réunion, que le sort de Néji Jalloul était scellé et qu’ils pouvaient manœuvrer.
Depuis, les évènements se sont accélérés. Le lendemain, mardi 21 mars 2017, le bureau exécutif élargi tient une réunion.
Une mise en scène de basse facture
Le porte-parole de la centrale syndicale, Sami Tahri, avait déclaré que “l’UGTT fait assumer au ministre de l’Éducation la responsabilité de la tension qui règne au sein de ce département, et appelle le gouvernement à lui trouver un remplaçant dans les meilleurs délais”.
Il a annoncé, en même temps, la tenue d’une réunion, le mercredi 22 mars 2017, de la Commission administrative du syndicat général de l’enseignement secondaire. Le reste, on le connaît.
Tout indique qu’il s’agirait d’une mise en scène de basse facture, voire d’un complot fomenté par la présidence de la République, la présidence du gouvernement et la centrale syndicale pour habiller l’écartement du valeureux Néji Jalloul.
Quid du rôle de Ghannouchi dans cette affaire?
Le donneur d’ordre n’est autre que le maître absolu du pays, le gourou Rached Ghannouchi, président du parti Ennahdha, qui, rappelons-le, voyait d’un mauvais œil la réforme laïque de l’éducation que Néji Jalloul est en train de mener.
C’est ce qui explique l’arrimage et “l’apparentage” de ses troupes avec les syndicalistes nationalistes lors de manifestations anti Néji Jalloul. C’est ce que justifie aussi l’accord hiératique conclu entre Caïd Essebsi et Ghannouchi -accord en vertu duquel les deux vieux s’étaient engagés à gouverner ensemble et à se rendre mutuellement service quelles que soient les conséquences. L’un au niveau de l’exécutif et l’autre au niveau du législatif.
Moralité: l’alliance contre nature entre les nationalistes arabes de Lassaad Yacoubi et compagnies, les salafistes nahdhaouis qui voulaient restaurer l’enseignement moyenâgeux et des nidaistes agonisants politiquement a fini, au nom de cette maudite légalité électorale, par isoler le patriote Jalloul et par l’écarter éventuellement.
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Nous sommes dans un pays où règnent, hélas, bassesse, lâcheté, ignominie, complots, infamie, turpitude, coups bas… Nous vivons une sérieuse crise morale.
En dépit de cet acharnement à l’écarter, Néji Jalloul ne peut que sortir grandi de cette épreuve. Il a le mérite d’avoir osé réformer l’irréformable, en l’occurrence un système éducatif peu reluisant.
Néji Jalloul doit être fier de ses réalisations
C’est connu, partout dans le monde. Tous ceux qui s’étaient engagés sur cette voie ont connu de farouches résistances aux relents conservateurs.
Néji Jalloul peut être déjà fier de ce qu’il a accompli en deux ans et quelques mois. Il peut se targuer d’avoir remporté de très belles batailles contre les partisans des “études de perroquets improductives”, allusion aux cours jaunis des enseignants et à la mémorisation bannissant l’esprit critique.
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C’était un ministre qui avait des idées et un ambitieux projet de réforme du système éducatif, ce projet qui consistait à revenir aux mécanismes de base de l’apprentissage. Ceux-là mêmes qui visent à doter les apprenants de la capacité pérenne “de lire juste, d’écrire juste, de calculer juste et de se cultiver juste».
Concrètement, il peut s’enorgueillir d’avoir à son actif la suppression du dopage de l’épreuve du Bac à travers la suppression, à partir de l’année scolaire 2016/2017, des 20% de rachat. Ainsi, à l’examen du Bac 2017, les élèves n’auront pour armes que leur préparation effective et leur véritable niveau d’instruction.
Il peut également se vanter d’avoir entamé un processus visant à améliorer les conditions de vie dans les établissements scolaires (création d’un office de services scolaires), d’avoir mené une croisade contre les cours de rattrapage rémunérés, d’avoir cherché à améliorer le niveau des instituteurs (restitution de l’Ecole normale supérieure), d’avoir lutté contre l’absentéisme des enseignants et autres manquements (congés fictifs, mise en disponibilité de complaisance pour longues maladies… 100 MDT de manque à gagner pour l’Etat en 2015). Et la liste des acquis est loin d’être finie.
Ces acquis, témoignages tangibles de son abnégation au travail et de son dévouement au pays, lui ont valu d’être constamment au Top des sondages. C’est un signe que son rendement était excellent et qu’il ne peut qu’être aimé par le peuple.
Quant à ses adversaires, ces syndicats de flemmards et de resquilleurs, ces salafistes nahdhaouis aux agendas moyenâgeux et ces cadavres nidaistes qui sont jaloux de lui, ils sont dans ce qu’ils ont donné et vont donner encore: un système éducatif de très bas niveau qui ne génère que des abandons scolaires (100.000 par an, c’est effrayant), des qualifications inadaptées aux besoins économiques du pays et des jeunes suicidaires terroristes djihadistes)…
Ils oublient toutefois que grâce aux révélations faites ces deux dernières années par le battant Néji Jalloul, nous savons comment les superviser et les avoir à l’œil.
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