La profession reste à un niveau basique et, par conséquent, se développe peu. Peut-on, par volontarisme, susciter un boom de l’épargne assurance? L’Etat doit y mettre du sien. La profession doit se réinventer, et, l’épargnant suivra.
L’ITES (Institut tunisien des études stratégiques) se lance un défi en organisant un séminaire sur l’avenir du métier d’assurance, en proposant d’élaborer un contrat-programme avec l’aide des opérateurs et de l’instance de régulation à l’effet d’aider au boom de ce secteur d’activité, grand pourvoyeur d’épargne longue, si bienfaisante pour le financement du développement.
L’état des lieux
La pénurie ne fait pas le marché. La profession d’assurance est figée autour de quelques produits basiques. Cela fait que son taux de pénétration reste si modeste. Les assurances souscrites sont les seules assurances obligatoires. Le total des primes sur la place est inférieur à 2% du PIB. Peut mieux faire! Et tout le monde y gagnerait.
L’Etat, d’abord, car il disposerait d’un bon gisement de financement. L’épargne nationale est à son étiage. Elle est passée de 22% du PIB en 2010 à 10% en 2016. Activer l’effet de captation de l’épargne par les produits d’assurance serait donc opportun.
Les experts aussi, qui voudraient que le métier aille vers son âge d’or. En appelant à aider au regroupement des enseignes sur la place, ils poussent vers des tailles critiques, pour plus de robustesse financière des opérateurs. A titre d’exemple, les assureurs tunisiens ont 50 à 60.000 véhicules en portefeuille, leurs homologues français dénombrent 2 à 3 millions de véhicules. Les rendements d’échelle joueraient, en l’occurrence, en faveur et des compagnies et des clients.
Et les épargnants trouveraient leur compte, garantissant un supplément de revenus dans le futur. La retraite par répartition sature. Un complément de retraite est par conséquent fort propice.
Rectifier le tir
La stratégie des compagnies d’assurances n’a pas été uniforme car la supervision est éparpillée entre la CGA, la BCT, la FTUSA, et on ne sait qui d’autre. Au vu de l’important impact financier de la profession, la BCT, à elle seule, pourrait exercer en exclusivité cette responsabilité, à l’instar de la Banque de France.
Rappelons que l’assurance-vie et la complémentaire retraite ont connu un boom sur ces vingt dernières années en France. En gagnant donc en cohérence, le secteur gagnerait aussi en efficacité.
Si donc l’on veut pousser la profession à se redéployer, quelle serait la part de participation de chacun? La régulation s’engage à pousser les compagnies en difficultés financières à se restructurer en 2017. Sans quoi elle userait des solutions extrêmes. La place serait entièrement sécurisée et cela conforte le contrat de confiance avec les clients.
Elle envisage de soigner définitivement la plaie de la R-C auto (Responsabilité Civile, dommages occasionnés aux tiers), qui saigne sans arrêt, en libérant son tarif. Structurellement déficitaire, cette branche pourrait s’équilibrer et ne plus plomber le développement du business.
A l’heure actuelle, l’assurance-vie est défiscalisée à hauteur de 10 mD avec une maturité de 10 ans, contre 50 mD en faveur du Compte Epargne en Actions et une maturité de 5 ans. L’Etat acceptera-t-il de faire jouer le stimuli fiscal, en l’occurrence?
Les experts rappellent qu’un dinar d’incitation fiscale accordée par l’Etat génère 10 dinars de revenus supplémentaires pour le bénéficiaire.
Par ailleurs, le plafonnement de la retraite à 6 fois le SMIC doit inciter les salariés à se prémunir contre la baisse de leurs revenus. Mais ces derniers subissent des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales) élevés et ne peuvent aller vers ce produit, réparateur. Encore une fois, l’Etat est sollicité pour plus d’assouplissement fiscal. Le fera-t-il?
Il faut bien garder à l’esprit qu’un contrat d’assurance n’est pas un acte de loisir mais un engagement de raison. L’épargnant doit pouvoir s’y retrouver. En la matière, rappelons qu’il s’agit d’une décision politique, un choix de société et qu’elle ne doit pas relever des responsables de l’administration. De la sorte, on irait vers une démocratisation de l’épargne assurance. Cependant, il existe, à l’heure actuelle, 23.000 assujettis qui déclarent des revenus égaux ou supérieurs à 100.000 dinars tunisiens, voilà une niche qu’il conviendrait que les assureurs exploitent à fond. Au vu des résultats obtenus, l’Etat aurait un retour d’expérience édifiant.
Quid de l’assurance risk management?
Pousser les compagnies d’assurances vers les produits vie, santé et la complémentaire retraite est un choix fort. Mais l’on se demande pourquoi l’on n’associerait pas les Caisses de retraite à cette dynamique. Elles possèdent une expertise avérée en la matière. Exclure les Caisses serait, de notre point de vue, un acte discriminant.
Par ailleurs, l’assurance risk management est aussi juteuse que les produits fétiches de vie et de retraite. Son avantage suprême est qu’elle protège le patrimoine des entreprises et à la fois les engagements des banques. Si les créances actuellement classées avaient été dûment assurées, le secteur bancaire serait-il dans cet état de gêne permanente? La question mérité d’être débattue, au plan national.