Selon le ministre des Affaires religieuses, Ahmed Adhoum, le montant global de l’aumône légale (Zakat), estimé à 3,5 milliards de dinars, soit 5% du PIB et 12% du budget de l’Etat, pourrait aider l’Etat à combattre la pauvreté et le chômage.
“La Zakat peut apporter des solutions d’urgence aux problèmes de développement […] et l’Etat œuvrera, à l’avenir, à mieux l’encadrer en mettant en place un cadre juridique pour l’organiser et en agissant en partenariat avec les structures concernées”, a souligné le ministre à l’ouverture de la 4e conférence internationale sur la Zakat organisée en collaboration avec l’Université Zitouna, les 11 et 12 avril, sur le thème “Zakat des entreprises et économie solidaire”.
Pour Adhoum, la crise économique rend aujourd’hui impératif de faire réussir cette expérience et de revoir la Zakat dans le sens de la promotion de nouveaux projets économiques et sociaux solidaires qui impulsent le développement.
Aïd Trabelsi, chef de cabinet du ministre des Affaires sociales, a mis l’accent sur le rôle de la Zakat dans la réduction des inégalités, soulignant que son département a créé récemment une cellule chargée de l’économie solidaire.
Le ministère parvient actuellement à aider 24% des catégories vulnérables en Tunisie et est habilité à jouer un rôle primordial dans le développement de l’économie solidaire et du travail décent, a-t-il insisté.
Le directeur de la Bourse des valeurs mobilières de Tunis (BVMT), Bilel Sahnoun, a pour sa part expliqué que les places boursières constituent, dans le monde entier, un trait d’union entre les grandes entreprises cotées et les investisseurs, ajoutant que le calcul de la Zakat à travers la bourse rend l’opération plus facile.
“Beaucoup d’investisseurs, grands ou petits soient-ils, orientent leurs capitaux vers la bourse”, a-t-il dit, précisant que plusieurs hommes d’affaires veillent à verser leur zakat dans le cadre de l’économie solidaire.
“La majorité des personnes versent la Zakat aux parties qui n’en ont pas le plus besoin, comme les proches, la famille ou le personnel de l’entreprise. Cet argent est dépensé dans la consommation et s’évapore vite, sans sortir les nécessiteux de la pauvreté. Pire encore, il peut carrément financer le crime s’il n’est pas bien encadré”, a-t-il prévenu.
Et d’enchainer: “Si 10% de l’ensemble des capitaux en bourse (20 milliards de dinars aujourd’hui) sont comptabilisés comme Zakat, la Zakat annuelle se chiffrerait à 50 millions de dinars. Cependant, le manque de mécanismes et de stratégies rendant possible la collecte de la Zakat sur le plan national contribue à l’éparpillement de cet argent, qui n’est malheureusement pas orienté vers les régions les plus déshéritées”.
Sahnoun a dans ce cadre proposé cinq mécanismes permettant l’organisation de la Zakat des entreprises:
1- Mettre en place un cadre juridique régissant la formation et la gestion d’une institution de la Zakat,
2- Garantir la crédibilité et la transparence dans la gestion des fonds collectés,
3- Employer la Zakat pour financer l’Etat dans le cadre de la discrimination positive,
4- Exonérer d’impôts les sommes versées au fonds de la Zakat,
5- Ne pas considérer la Zakat versée à l’Etat dans les opérations d’audit.
Mohamed Megdiche, expert comptable et président de l’association tunisienne des sciences de la Zakat, a également souligné que la création d’une institution consacrée à la Zakat contribuera à réduire le chômage, la marginalisation et les inégalités sociales. Il a en outre indiqué que plusieurs entreprises et détenteurs de capitaux ne saisissent pas très bien le principe de la Zakat et confondent le caractère obligatoire et volontaire de l’aumône, ce qui a conduit à une baisse des sommes versées.
Le projet de création d’une institution de la Zakat a été présenté à la présidence du gouvernement, et les sommes collectées auprès des entreprises pourraient atteindre les 500 millions de dinars, a-t-il précisé.
Les travaux de la Conférence internationale se poursuivront mercredi et seront consacrés à l’étude du “Guide du comptable de la Zakat des entreprises” en Tunisie et au Maroc, en collaboration avec la Bourse de Tunis et l’Ordre des experts comptables de Tunisie.
Ils seront également consacrés aux spécificités de la Zakat des promoteurs immobiliers, des sociétés agricoles et sur les actions en bourse.