Il faut lutter contre la corruption, il faut que les dossiers soient portés devant la justice, et il faut que les corrompus soient dénoncés nominativement. C’est ce qu’estime Henda Fellah, responsable du projet “I watch”, lors du rassemblement organisé, jeudi 20 avril, par cette ONG tunisienne, devant le palais de justice à Bab Bnet, contre la chaîne de télévision privée Nessma TV, laquelle se trouve, depuis quelques jours, au centre d’un scandale médiatique.
Henda précise à l’Agence TAP que l’organisation a choisi délibérément d’organiser ce rassemblement devant le palais de justice et non pas devant l’Assemblée des représentants du peuple pour adresser un message de confiance en la justice, “la seule institution qui a réagi favorablement à nos démarches”.
Un dossier de 700 pages concernant la chaîne et la boîte de communication Karoui & Karoui (accusée de malversations et d’évasion fiscale) a été déposé par l’organisation depuis l’été dernier, auprès de plusieurs institutions dont l’Instance nationale de lutte contre de la corruption, le ministère des Finances et la Banque centrale de Tunisie.
Henda, peu découragée par le nombre limité des gens qui prennent part au rassemblement, continue à scander les slogans, appelant à une lutte sans merci contre les corrompus et se moquant des détracteurs de l’ONG.
“ô Hached et Belaid, les corrompus ont vendu le pays”, “combat continu, non à la conciliation et au marchandage”, “le combat continue contre les bandes de corrompus”, ces slogans lancés par Henda et ses camarades sont repris par une cinquantaine de jeunes qui prennent part à ce rassemblement où les partis politiques et les institutions de lutte contre la corruption ont brillé par leur absence.
Une invitation à ce rassemblement a été lancée sur Facebook il y a deux jours, note Henda précisant que l’organisation a choisi de laisser l’invitation ouverte à tous. “Je suis déçue par le nombre des participants à la manifestation de l’organisation pourtant largement soutenue par les facebookeurs dans cette affaire, affirme de son coté, Aya Rezgui, une des participantes.
L’horaire est mal choisi, ajoute cette fille qui s’est drapée de l’étendard national, faisant remarquer que la participation des étudiants à cette manifestation aurait été plus grande si elle n’avait pas coïncidé avec la période des examens
“Je suis choquée par les propos diffamatoires contenus dans l’enregistrement et en tant que féministe, je ne peux qu’être interpellée par des propos qui font appel à la mentalité machiste ” de la société pour dénigrer une jeune fille membre de l’organisation”, poursuit Aya qui est âgée de 19 ans, faisant allusion à l’enregistrement audio attribué au 1er responsable de la chaîne privée Nessma TV, (Nabil Karoui), dans lequel il lance sur sa chaîne, une campagne de dénigrement contre I Watch et ses membres notamment une des leurs.
Rejoignant les participants sur l’esplanade de la Kasbah où le rassemblement a pris fin, le président de l’Organisation “I Watch”, Achref Aouadi note que le soutien apporté au rassemblement constitue avant tout un soutien à la Tunisie et non pas à l’organisation, précisant qu’il comparaîtra demain vendredi, devant la justice en tant que témoin. “Pour nous, le plus important demeure leur condamnation (les entreprises Karoui) par la justice”, a-t-il conclu, soulignant la nécessité de poursuivre la lutte contre la corruption et les corrompus dans le pays.
La chaîne Nesma TV est au centre d’un scandale médiatique après la diffusion, dimanche, sur les réseaux sociaux d’un enregistrement audio dans lequel le patron de la chaîne privée parle du “lancement d’une campagne de dénigrement contre I Watch sur la chaîne Nessma”.
L’ONG de lutte contre la corruption avait publié un rapport en juillet 2016, accusant la chaîne et la boite de communication des deux frères Karoui, de plusieurs malversations dont l’évasion fiscale, des prêts bancaires obtenus sans garantie auprès de la Banque de l’Habitat et des transferts d’argent illégaux, lesquelles accusations ont été récusées par les responsables de ces entreprises. Ce rapport a été le point de départ d’une guerre judiciaire entre les deux parties et a valu à l’organisation une attaque en justice dans plus de 20 plaintes.
Mardi, dernier, son président avait affirmé que l’organisation va saisir la Justice dans d’autres affaires contre le patron de la chaîne Nesma TV, Nabil Karoui et ses partenaires, conformément au code de procédure pénale. Selon Aouadi, Nabil Karoui est accusé de “formation d’une bande criminelle”, de “menaces”, de collecte et publication de données personnelles et d’”atteinte aux bonnes mœurs”.
I WATCH qui se présente comme étant une organisation de lutte pour la transparence financière et la bonne gouvernance, a révélé dans ses rapports, des affaires de corruption et de mauvaise gestion liées notamment, à la campagne électorale de 2014, au comité olympique national et au secteur du transport.