“La nouvelle loi sur l’investissement, malgré son importance, ne constitue pas une condition suffisante pour impulser l’investissement tant national qu’étranger, dans le contexte actuel tendu et empreint d’incertitude. La dégradation de l’environnement de l’entreprise, le laxisme et la baisse des performances de l’administration, l’instabilité fiscale, le grand retard qu’accuse le secteur de la logistique et des transports, la volatilité du dinar, l’hésitation à appliquer la loi, la persistance des tensions sociales, commencent à doucher les espoirs nés de la Conférence internationale Tunisia 2020.
Et c’est sur ces facteurs qui sont à l’origine du doute, qu’il va falloir agir avec célérité pour conférer à cette loi consistance et efficience “, c’est en ces termes que Fouad Lakhoua, président de la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (Ctfci), a traduit l’appréciation des chefs d’entreprises du nouveau cadre juridique relatif à l’investissement, mais aussi de la conjoncture actuelle.
S’exprimant lors d’une rencontre de présentation de la nouvelle loi sur l’investissement, organisée, mercredi, par la Ctfci en collaboration avec d’autres chambres mixtes, il a considéré que “l’environnement de l’entreprise s’érige en obstacle à toute initiative d’investissement”, faisant savoir “que le lancement imminent d’un conseil des chambres mixtes, vise à mettre en place une interface crédible et représentative capable de faire avancer les choses”.
Réagissant au tableau sombre dressé par Lakhoua, le ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, Fadhel Abdelkefi a estimé que le dernier accord avec le FMI et les répercussions positives qu’il aura sur les décisions des autres bailleurs de fonds, les accords et promesses donnés lors de la Conférence 2020 et la mise en place d’un nouveau cadre juridique pour l’investissement constituent des “bonnes nouvelles” sur lesquelles il faut capitaliser, pour améliorer le cadre des affaires et relancer l’investissement.
Abdelkefi a, par ailleurs, reconnu que “la situation est compliquée mais finalement en huit mois je ne pense pas qu’on pouvait aller plus vite que cela n’a été le cas. Résultat des courses, nous avons de bons indicateurs. Les IDE ont augmenté de 18%, au cours du premier trimestre de 2017, par rapport à la même période en 2016, contre une baisse des investissements en portefeuille. L’investissement industriel a progressé de 63,3% de trimestre à trimestre. On pourrait donc dire que malgré tous les soucis, l’investissement est en train de repartir”.
Abdelkefi a aussi considéré ” qu’on ne peut pas parler d’une instabilité fiscale en Tunisie, alors que le cadre fiscal n’a pas beaucoup changé durant la période 1972-2016, et ce malgré “le choc émotionnel” qu’ont subi les sociétés offshore qui sont passées d’une exonération totale à un taux de 10% et ensuite à une imposition conjoncturelle de 7,5%. C’est un choc vécu en 2016-2017 et on s’en excuse, mais c’est loin d’être une instabilité fiscale”.
S’agissant de l’instabilité sociale, le ministre a évoqué les efforts déployés dans les régions intérieures précisant que “depuis 2011, des centaines de millions de dinars ont été investis dans les régions, c’est sans doute pas assez, mais on ne peut pas dire que rien n’a été fait. Pour certains gouvernorats à l’intérieur du pays où tout le budget de développement était de l’ordre de 20 à 25 millions de dinars, sachez qu’aujourd’hui, entre 600 et 800 millions de dinars y sont investis “.
Et de poursuivre ” que peut faire un Etat en 2017, en dehors de faire des routes, des autoroutes, des ponts, de garantir l’approvisionnement en eau potable et l’électrification et de mettre en place toute l’infrastructure nécessaire pour permettre à terme au secteur privé de prendre le relais ”
” C’est vrai qu’on ne peut plus demander aux gens d’être d’une grande patience, mais nous sommes le premier gouvernement à prôner une certaine orthodoxie macro-économique et nous sommes en train d’y travailler et c’est extrêmement compliqué. Nous sommes aussi, les premiers à avoir dit que la Tunisie devrait passer par des réformes qui seront sans doute douloureuses au départ. Nous considérons que la feuille de route sera mise en place d’ici fin juin “, a-t-il conclu.
De son coté, Khalil Laabidi, DG de la FIPA, a présenté, aux investisseurs présents, le nouveau cadre relatif à l’investissement rappelant que ses principaux objectifs se résument en l’augmentation de la valeur ajoutée, de la compétitivité et du contenu technologique, le renforcement des exportations, la création de l’emploi,, le développement régional intégré et équilibré et le développement durable.
Il a également fait savoir que l’Instance tunisienne d’Investissement prévue par la nouvelle loi, va se mettre en place progressivement. Le lancement de son activité est prévue pour la fin de l’année, l’objectif final étant d’arriver au bout de 2 à 3 ans, à y fusionner toutes les structures liées à l’investissement.