Une gestion efficace des déchets de chantier (déchets de démolition ou de construction-DDC) permet une réduction des coûts des projets immobiliers de l’ordre de 30 à 40% au moment où ces déchets constituent un grand problème en Tunisie. Car, chaque année, le ministère de l’Environnement dépense 10 millions de dinars pour le transport des DDC et leur mise en décharge, d’après Ibtissem Ben Ahmed, présidente du Groupement professionnel de nettoyage, de collecte, de transport et de recyclage des déchets (N.C.T.R.D), relevant de la CONECT (Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie).
En plus, le nombre des dépôts anarchiques recevant ces déchets a explosé après la révolution pour atteindre environ 290. Des “points noirs”, qui défigurent le paysage naturel et urbain et portent atteinte à l’environnement.
Du point de vue économique, c’est un gaspillage auquel il faut faire face, selon les experts, présents jeudi, à une journée de sensibilisation organisée par le (N.C.T.R.D). Ils recommandent le recyclage en tant que solution idoine pour valoriser des matières premières non renouvelables mais valorisables (ciment, briques, sable, acier…).
Réunis au CITET, les représentants des municipalités, les chercheurs et experts ont tenté de revenir, à travers des exposés, sur l’état des lieux et les solutions permettant d’exploiter ces déchets, qui, une fois bien traités permettent des économies considérables pour les constructeurs particuliers ou les entreprises.
Contrairement aux pays développés où 80% des déchets de démolition son recyclés, la Tunisie est en retard en matière de recyclage de ces matières non renouvelables, qui peuvent être utilisées, notamment, dans l’aménagement des routes et chaussées. La nature de ces déchets est adaptée à ce type de projets. Déjà, 90% des déchets de construction et de démolition sont des déchets inertes et peuvent être utilisées comme des remblais, a confirmé le représentant du Centre technique des matériaux de construction, de céramique et du ver (CTMCCV), Mohamed Ben Rekaya.
Pour leur part, les promoteurs recycleurs se soucient, de l’existence de clients. Ils estiment qu’ils ne peuvent pas vendre leurs produits après recyclage et s’attendent à une chaine d’acteurs appuyés par l’Etat.
Quelque 160 000 m3 de déchets de construction et de démolitions, ont été rejetés dans la nature d’une manière anarchique durant les dernières années, selon le directeur général des services techniques à la Municipalité de Tunis, Ridha Meksi . “Cela devient de plus en plus encombrant”, dit-il.
” Il faut trouver une solution, car la décharge de Jebel Borj Chakir, ne reçoit plus ces déchets depuis déjà deux mois alors que l’administration continue à la citer dans les permis de bâtir comme étant une décharge autorisée pour les déchets de construction”, ajoute-t-il plaidant en faveur du recyclage, qu’il qualifie de “meilleure solution”.
De son coté, Kawthar Machat, enseignante à l’ISET de Rades et spécialistes des projets de gestion des déchets de démolition et de construction met l’accent sur un blocage d’ordre réglementaire. “Le promoteur immobilier, appelé à respecter le cahier des charges, n’est pas encore autorisé, à utiliser les matériaux et les déchets de construction et de démolition pour la réalisation de ses projets”, note-t-elle, appelant à suivre l’exemple de l’Italie qui a réussi un projet d’utilisation de ce type de déchets dans l’aménagement de couches de fondation des routes. “C’est un créneau très juteux qu’il faut encourager en améliorant les lois et en encourageant le recyclage”, recommande l’universitaire.
Des mécanismes sont déjà disponibles pour encourager la valorisation des résultats des recherches scientifiques dans le domaine de gestion des DDC, déclare de son côté, la directrice des technopoles au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Scientifique Rim Said . ” On est prédisposé à assister financièrement et techniquement les initiatives des promoteurs basées sur des résultats scientifiquement prouvés “, dit-elle.
Pour ce qui est de l’Agence nationale de gestion des déchets (ANGED), le président du projet de la filière de gestion des déchets de démolition et de construction, Mourad Chabou évoque un projet d’étude sur cette question confié à un bureau d’études en se référant à d’autres expériences réussies au Canada, France, Luxembourg et Belgique.
Le projet consiste à évaluer la situation actuelle, à mettre en place un système de gestion des DDC, à identifier les parties intervenantes et chercher des sources de financement en vue de la promulgation par la suite d’un texte de loi pour déterminer les méthodes de gestion de ce type de déchets, dans des zones à grande densité urbaine telles que Tunis, Sfax, Sousse.