A défaut d’imagination politique, de courage et de crédibilité de la part du pouvoir en place, le pire est arrivé. Appelée à dissuader les insurgés du sud à bloquer les sites de production, l’armée nationale, la dernière institution-rempart du pays, s’est vu défiée sans réagir lors de la première confrontation avec les sit-inneurs du Kamour 2, à Tataouine.
Ces derniers, logés dans des tentes de luxe qu’on ne voit que dans des zones chics comme Hammamet, Gammarth, Carthage… sont parvenus, samedi 20 mai 2017, à narguer l’armée, à la braver et à l’amener à faire marche arrière, ce qui a permis à “ces jeunes manipulés par des forces occultes” de fermer la station de pompage de gaz.
Le repli de l’armée pour éviter des drames
Points d’orgue de cette bravade: d’abord, l’hystérie avec laquelle ces jeunes avaient secoué le grillage de clôture du site de la pompe, ensuite ce jeune qui se fait prendre en photo en train de fermer la pompe alors que des soldats se le donnaient en spectacle.
La photo, qui a fait le tour du monde, va donner la pire des images d’insécurité et de banditisme qui prévaut en Tunisie.
En toute logique économique, aucun éventuel investisseur étranger ne s’aventurerait à venir dans le pays dans un tel climat.
C’est du jamais vu. Même dans des pays qui ont connu des guerres dévastatrices comme l’Irak, les sites de production des hydrocarbures ont toujours été épargnés et protégés. C’est tout simplement affligeant, lamentable et triste.
Délimiter les responsabilités et agir pour y remédier
Face à une telle situation désastreuse pour l’image du pays, des questions méritent d’être posées: quelle est la partie qui assume la responsabilité d’un tel dérapage (le gouverneur de Tataouine qui vient à peine d’y être nommé, la présidence du gouvernement, la présidence de la République)? Y a-t-il eu une stratégie claire avec des plans A, B, C pour contrer ces sit-inneurs hystériques? Quelle est la responsabilité des soi-disant encadreurs du sit-in?
En effet, dans un Etat organisé comme la Tunisie, la légalité est souveraine. C’est pourquoi nous pensons qu’il est temps de s’interroger sur la légitimité de cette Coordination des sit-inneurs de Kamour et sur les circonstances dans lesquelles elle a été élue et mise en place.
A notre connaissance, les élections, quelle que soit leur nature, sont réglementées et organisées à des échéances bien déterminées.
Emergence de structures illégales dans la région de Tataouine
Cela pour dire que cette Coordination est une structure illégale extra-nationale obéissant à d’autres agendas, autres que ceux du pays.
D’ailleurs, cette tolérance vis-à-vis de cette Coordination a encouragé d’autres structures illégales à émerger dans la région. Ainsi, c’est pour la première fois qu’on a entendu parler de l’Union islamique internationale des avocats. Cette dernière est allée soutenir les sit-inneurs du Kamour 2, le jour de la fermeture de la station de pompage.
Cette association n’a aucune existence légale. C’est une association ex-nihilo. Elle a été créée selon l’humeur de ses fondateurs qui seraient pour la plupart des adhérents du parti Hizb Ettahrir et d’Ansar Chariaa.
Avec ce rythme, c’est “un émirat daechien” qu’on verra s’installer, bientôt, dans cette région du pays avec toutes ses structures illégales d’un Etat dans l’Etat.
De ce fait, la réponse à cette bravade doit être à la mesure des dommages qu’elle a portés au pays et à l’armée nationale, d’autant plus qu’elle est non justifiée, car les 64 mesures prises par le gouvernement en faveur de la région de Tataouine -dont la création de plus de 2.000 emplois- sont plus qu’acceptables. Beaucoup d’autres régions démunies auraient souhaité bénéficier du quart de ces mesures.
Impératif de sévir…
Le pays ne peut pas tolérer une telle insurrection d’autant plus que le gouvernement vient de commanditer un audit pour connaître exactement le potentiel d’hydrocarbures dont recèle le pays et pour mettre fin aux rumeurs selon lesquelles le sous-sol de Tataouine recèle d’importants gisements de pétrole et de gaz.
Rien ne justifie également cette bravade à l’endroit de la Grande muette qui demeure une des institutions républiques la moins gangrenée par la corruption. Faut-il rappeler que si l’armée a gardé son sang-froid, c’est pour éviter des drames et pour ne pas donner à ces extra-nationaux une opportunité d’aggraver la situation, surtout que le pays voisin, la Libye, connaît ces jours-ci une de ses plus graves crises après l’attaque, au sud du pays de la base de Brak al-Shati (141 morts) et l’assassinat, à Benghazi (Est de Libye) à la sortie d’une mosquée, du chef de la tribu Ouakir, Ibrik Louati, dans un attentat à la voiture piégée.
La situation est grave. Chaque partie doit assumer, dorénavant, ses responsabilités. L’application de la loi serait salutaire pour tous. Que tous ceux qui la violent soient punis.
A bon entendeur.