Cette année, Ils n’ont pas pris d’assaut les magasins, comme à l’accoutumée, pour faire leurs achats de vêtements, en prévision de l’Aid El Fitr. En effet, de nombreux parents, découragés par la cherté des habits, ont choisi les bazars à ciel ouvert et la fripe pour vêtir leurs enfants lors de cette fête qui clôt le mois de Ramadan, et qui est d’abord la fête des enfants. C’est l’occasion pour eux de mettre leurs plus beaux habits.
Les rues Charles De Gaulle et Jamel Abdennaceur et aussi les célèbres friperies de Hafsia, Cité Ibn Khaldoun, Bab El Fella et El Mourouj, sont pleines à craquer de parents et de jeunes femmes, venus de toutes les banlieues de Tunis pour faire des achats à bon prix.
Les prix affichés dans les magasins sont exorbitants
Une dame à la mine fatiguée, rencontrée dans une ruelle de la capitale déclare à l’Agence TAP, qu’après avoir passé trois heures à faire le tour des magasins, elle a décidé au bout du compte de changer de destination et d’acheter les habits de ses enfants dans les friperies et les bazars de proximité.
“J’ai dépensé seulement 150 dinars pour habiller mes trois enfants âgés de 5, 7 et 10 ans. C’est là un exploit, comparé aux prix des vêtements neufs exposés dans les magasins “, se félicite t-elle. “Les prix affichés dans les magasins et les centres commerciaux sont exorbitants. Après les dépenses de Ramadan, il nous est difficile de dépenser davantage d’argent pour acheter des habits neufs”, se désole t-elle.
Dans la Banlieue sud de Tunis, la friperie d’El Mourouj n’arrête pas de recevoir des visiteurs. Dans ce marché installé récemment, Raoudha a trouvé son compte. Tenant jalousement les pièces qu’elle a pu dénicher dans les balles de fripe, la jeune femme semble très satisfaite, “Oui, j’ai trouvé exactement ce que je cherche pour mes petites filles et à des prix beaucoup moins chers que ceux pratiqués ailleurs”. Pour elle, la fripe est une aubaine pour les familles aux revenus limités.
Raoudha, qui travaille dans une usine à Ben Arous, avoue qu’elle procède à toute une mise en scene pour que ces filles âgées de 9 et 11 ans acceptent de porter les habits de la fripe. “Je lave et repasse les vêtements achetés et je les mets dans des sacs d’une marque quelconque et voilà, ils sont comme neufs”, raconte la jeune femme.
Elle reconnait, toutefois que pour les petits enfants, cette méthode fonctionne, mais pour les plus grands, c’est difficile “parce que ceux-ci veulent plutôt des vêtements à la mode”.
Les balles de la fripe contiennent des vêtements de toutes les marques, dit t-elle, ajoutant que les chaussures et même les accessoires dont la famille tunisienne a besoin pour les enfants à l’occasion de l’Aid el Fitr, sont importés de plusieurs pays du monde et sont en bon état, certains habits sont même neufs mais comportent des défauts simples.
Idriss Mohamed, vendeur de friperie, indique que les marchés de la friperie ont connu lors des dernières journées du Ramadan, une grande affluence et ont prospéré au cours de ces jours, grâce aux prix réduits des marchandises, comparés aux prix des vêtements neufs.
Entre 10 et 25 dinars…
A la friperie d’El Mourouj, les prix des vêtements d’occasion pour un seul enfant varient entre 10 et 25 dinars, alors ceux des vêtements exposés dans certains locaux commerciaux varient entre 80 et 150 dinars, et ce pour les garçons et les fillettes. Il faut comptabiliser également, le prix des chaussures (entre 25 et 70 D).
Plusieurs vendeurs du prêt-à-porter et de chaussures ont renoncé face à la rude concurrence des étalages anarchiques, qui occupent les rues de la capitale et impacte directement leur activité, puisqu’ils sont appelés à s’acquitter de leur devoir fiscal, à payer le loyer de leur local outre plusieurs autres dépenses.
Ils ont indiqué que les prix des vêtements de l’Aid restent relativement chers par rapport aux vêtements exposés dans les étalages anarchiques, puisque ces vendeurs à la sauvette ne sont pas contraints à payer les impôts, ni le loyer ni les factures d’eau et d’électricité, et réalisent une marge bénéficiaire élevée.
Des commerçants expliquent cette relative hausse des prix des vêtements affichés dans leurs vitrines par rapport à ceux des vêtements d’occasion étalés à même le sol, par la hausse des prix des matières premières et des équipements utilisés par les chefs d’entreprises de textile. Ces produits et équipements sont importés en devises étrangères, une opération devenue de plus en plus coûteuse notamment avec la baisse de la valeur du dinar par rapport à l’Euro.
Ils préviennent contre les risques engendrés par le port des vêtements d’occasion, qui ne répondent à aucune norme de santé et peuvent même causer des maladies dermatologiques et contagieuses.
Selon l’Observatoire tunisien de l’économie (OTE), le secteur des vêtements a enregistré le plus haut taux d’inflation. Entre 2010 et 2017 ce taux a atteint 60,6% et celui des accessoires 70,4%.
Le directeur général de la compétitivité et des recherches économiques au sein du ministère du commerce, Abdelkader Dimoumi a, pour sa part, affirmé que les prix des vêtements et chaussures sont libres et ne répondent qu’à l’offre et la demande.
Il a ajouté que le ministère a adopté plusieurs mesures pour protéger le consommateur contre les dépassements à travers des opérations de contrôle nocturnes, à partir du 12 juin, dans le Grand Tunis et dans différentes régions du pays.
Dimoumi a fait savoir par ailleurs que les soldes de l’été débuteront le 8 août 2017, et tiendront compte du pouvoir d’achat du citoyen, notamment après ce mois de consommation et de dépenses.