«Rien ne marche dans un système politique où les mots jurent avec les choses», disait Napoléon Bonaparte.
Salma Elloumi Rekik, ministre du Tourisme et de l’Artisanat, ne veut pas que les mots jurent avec les choses, c’est pour cette raison qu’elle refuse d’entrer dans la logique démagogique de nombre de politiques. Elle préfère être dans l’action plutôt que dans la communication et agir plutôt que réagir.
La ministre n’a pas à pâlir de son parcours assez atypique, elle devrait tout au contraire en être fière. Car que de difficultés, lorsque l’on vient du secteur privé à s’adapter à une administration d’antan certes performante mais qui a beaucoup perdu de son lustre et de ses compétences depuis janvier 2011.
“Lorsque je m’étais présentée aux élections pour le parti Nidaa Tounes, j’étais tête de liste. Sur 7 députés, nous avons gagné 4 sièges…”
Qu’à cela ne tienne, Salma Elloumi impose son propre style. Celui de la sérénité, de la sincérité et surtout de la clarté. «Lorsque je m’étais présentée aux élections pour le parti Nidaa Tounes, j’étais tête de liste. Sur 7 députés, nous avons gagné 4 sièges. C’était ma première réussite politique. C’est grâce à la campagne électorale que j’ai fait beaucoup de terrain et que j’ai été au contact de mes concitoyens. Je n’ai jamais fait de promesses que je ne pouvais pas tenir. Je ne peux pas accepter le mensonge et je n’en vois pas la nécessité. Nous ne devons promettre que ce que nous pouvons réaliser. Si ce n’est que tout est réalisable sauf que cela prend du temps. Je crois en la Tunisie. Rien n’est impossible pour et dans notre pays. Notre histoire est glorieuse, nous sommes très respectés et même admirés à l’étranger où on a une très haute opinion de nous. Nous devons avoir foi en nous et croire en notre capacité à faire bouger les choses dans le bon sens. Nous devons également arrêter de nous dénigrer».
La ministre du Tourisme, qui faisait partie du cercle de «disciples» très proches de Béji Caïd Essebsi, se situe dans la logique de l’exemplarité. Pourvue de grandes qualités d’âme, polie et correcte, elle reflète une douce autorité et adopte une attitude inspirant les lignes à suivre pour ses proches collaborateurs et ses différents vis-à-vis au sein de son ministère ou avec ses partenaires.
“Je suis le pur produit des choix de la Tunisie bourguibienne. Après la révolution, j’ai réalisé que mon pays comptait plus que tout dans ma vie. Je suis née avec le Code du statut personnel et je n’aurais pas supporté que nous fassions marche arrière”
Quand on lui pose la question “pourquoi avez-vous embrassé une carrière politique alors que vous étiez une brillante femme d’affaires“, sa réponse est tout simplement émouvante: «Je suis le pur produit des choix de la Tunisie bourguibienne. Après la révolution, j’ai réalisé que mon pays comptait plus que tout dans ma vie. Je suis née avec le Code du statut personnel et je n’aurais pas supporté que nous fassions marche arrière. J’avais peur pour ma Tunisie. Rien n’avait plus d’importance pour moi-même, et je me disais que si je devais même vivre dans un gourbi j’étais prête à tout pour que notre patrie s’en sorte. Je ne voulais pas que les choses tournent mal, et que, par la suite, je me le reproche pendant tout le restant de ma vie. Pour agir sur les choses, il fallait assumer ses responsabilités en tant que citoyens, j’ai tout naturellement osé m’impliquer dans la politique».
“Béji Caïd Essebsi représente pour moi la Tunisie, celle que j’ai toujours aimée. Je me suis lancée avec lui dans le mouvement Nidaa Tounes…”
Salma Elloumi Rekik ne prétend toutefois pas être une grande professionnelle de la politique. J’ai eu la chance de côtoyer de grandes personnalités politiques quand le mouvement Nidaa Tounes a été lancé. Il y en a qui sont parties, d’autres sont restées. Mais pour moi la question la plus importante se rapporte à notre Etat, à notre nation, le reste n’est que détails. Nidaa Tounes a ses points forts, il est aussi vulnérable par bien de côtés, mais il a remporté les élections législatives et la présidentielle. Et c’est ce qui comptait le plus».
Au cours de sa présidence, Béji Caïd Essebssi a toujours mis l’intérêt de la Tunisie au-dessus de tout, et pour moi, c’est à la base de tout estime Salma Elloumi. “Il a défendu notre pays bec et ongles et même quand il était dans l’opposition, il citait ses adversaires politiques avec respect et à toutes les occasions. Je crois que c’est un grand homme, il ne s’est jamais abaissé à critiquer des personnes. Il a le sens de l’Etat. On le critique très souvent avec virulence mais il ne réagissait jamais. Il est au-dessus de la mêlée. Il voulait notre réussite et n’intervenait jamais dans les finances tenant plus que tout au respect de la loi».
Tout au long de sa carrière en tant que chef d’entreprise, Salma Elloumi a appris à capitaliser sur nombre de formations à l’international pour bien gérer ses collaborateurs, développer leurs capacités, manager les crises, adopter les approches citoyennes et réglementaires.
“Et même si des fois il y a des règles ou des lois qui ne sont pas en notre faveur ou nous déplaisent, eh bien, pour moi, il faut les appliquer. La démocratie, c’est aussi cela: le respect des lois…”
La légalité, un mot qui revient sans arrêt dans le discours de la ministre du Tourisme et de l’Artisanat. «Que nous soyons dans notre pays ou ailleurs, nous devons agir dans la légalité absolue. Pour travailler sans heurts et être efficaces, il le faut, sinon nous mettons en péril la pérennité de l’entreprise. J’ai toujours veillé à ce qu’il y ait dans notre groupe un contrôle interne, des audits, tout comme j’ai tenu au respect des réglementations dans nos relations avec toutes les administrations publiques. Et même si des fois il y a des règles ou des lois qui ne sont pas en notre faveur ou nous déplaisent, eh bien, pour moi, il faut les appliquer. La démocratie, c’est aussi cela: le respect des lois. J’ai aussi développé la dimension responsabilité sociale de l’entreprise. Nous ne pouvons être une entreprise performante si nous ne participons pas au bien-être de ceux qui nous entourent. J’ai essayé de le faire lorsque j’ai monté mon entreprise d’agroalimentaire. Dans le ministère que je dirige aujourd’hui, je m’évertue à offrir aux compétences les moyens de faire leurs preuves et d’assurer un climat de travail sain et humain».
«J’ai essayé, selon la mesure de mes forces, d’introduire dans ce qu’on appelle la politique la question morale et la question humaine», disait le grand Victor Hugo. C’est le propre de Salma Elloumi Rekik.