La rentrée politique s’annonce très très chaude. Elle sera marquée indéniablement par un remaniement ministériel. La récente démission du super ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, et ministre des Finances par intérim, Mohamed Fadhel Abdelkefi, rattrapé par la justice pour une embarrassante affaire, a accéléré les choses.
Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, n’a pas, hélas, le choix, d’autant plus que la vacance, depuis le mois de mai dernier, de deux postes clé, ceux de l’Education et des Finances, ne peut plus se poursuivre en raison de l’imminence de deux échéances majeures, la prochaine rentrée scolaire et l’élaboration de la loi des finances 2018 avant le 15 octobre prochain, comme le stipule la Constitution.
Un remaniement logiquement incontournable
Selon nos informations, le chef du gouvernement discutera des détails de ce remaniement, d’abord, avec le président de la République Béji Caïd Essebsi, lors de leur rendez-vous hebdomadaire, et ensuite avec les parties représentées au gouvernement d’union nationale (GUN).
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Concrètement, ce remaniement est ouvert à toutes les options. Il peut être soit partiel, soit moyen, soit assez élargi.
Il peut concerner la nomination de ministres aux postes vacants (Finances, Education et du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale).
Il peut être moyen et toucher, également, les ministres du gouvernement d’union nationale dont le rendement a été peu convaincant, voire nul ou scandaleux.
Les médias citent, notamment, à ce sujet, les ministres actuels de l’Industrie et du Commerce (Ennahdha), du Transport (Nidaa Tounès), de la Santé (Afek Tounès), des Affaires locales et de l’Environnement (Afek Tounès), de la Jeunesse et des Sports (Nidaa Tounès), de l’Energie et des Energies renouvelables (proche de Nidaa Tounès)…
Il peut être élargi et concerner une grande partie du gouvernement, option préférée des deux partis dominants (Nidaa Tounès -du moins ce qui en reste- et Ennahdha). Mais ce scénario est difficilement réalisable en raison de la crise délétère et multiforme qui prévaut actuellement dans le pays.
Dans tous les cas de figure, la tâche de Youssef Chahed ne sera aucunement facile. Au regard des rapports de force en place, des magouilles d’hommes politiques corrompus et affairistes, des pressions de toutes sortes et de l’exiguïté de la marge de manœuvre du chef du gouvernement, personne ne souhaiterait être à sa place. C’est désormais une grande épreuve pour le jeune chef du gouvernement.
Nidaa Tounès et Ennahdha voudraient la tête de Youssef Chahed
Sur le terrain politique, Youssef Chahed est un homme pratiquement seul. Il n’est pas appuyé de manière franche des deux partis majoritaires au Parlement: Nidaa Tounès et Ennahdha.
Et même si certains dirigeants de ces partis déclarent qu’ils le soutiennent, ils le disent du bout des lèvres, donc hypocritement.
Le président d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, est allé plus loin en déclarant carrément la guerre à Youssef Chahed lors de la fracassante interview accordée, en cravate, à la chaîne de télévision privée Nessma TV.
Menaçant et impertinent, le Ghannouchi l’avait sommé de tempérer sa lutte contre la corruption, de vaquer exclusivement à la gestion des affaires courantes et de ne pas penser à se présenter à la présidentielle de 2019.
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Moralité : L’inimitié et l’hostilité qu’affiche le tandem Nidaa Tounès-Ennahdha à l’endroit de Youssef Chahed sont désormais des plus claires. Il est désormais l’homme à abattre. Avec l’échéance imminente de ce remaniement, ils l’attendent de pied ferme.
A l’origine : avec sa guerre contre la corruption, la contrebande, la contrefaçon et l’évasion fiscale, le chef du gouvernement commence à déranger les intérêts de ces deux partis.
Ce n’est pas un hasard si Ennahdha fait flèche de tout bois, actuellement, pour imposer un des siens (Taoufik Rajhi ou Ridha Saidi, actuellement conseillers du gouvernement), au prochain poste de ministre des Finances. Le parti a hâte de mettre la main sur le portefeuille des Finances pour mieux contrôler à sa guise la douane. La Direction actuelle de la douane tunisienne ne serait pas de son goût dans la mesure où elle a commencé à enquêter sur un trafic de produits de luxe contrefaits et de contrebande entre la Tunisie et la Turquie, un des derniers alliés stratégiques d’Ennahdha.
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Au rayon de Youssef Chahed, les seuls appuis actifs qui lui sont apportés proviennent de la puissante centrale syndicale (UGTT), du peuple, de la présidence de la république, des bailleurs de fonds qui le soutiennent dans sa lutte contre la corruption à condition qu’elle soit institutionnalisée. Et ce n’est pas peu.
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Au final, c’est en quelque sorte un bras de fer manichéen qui oppose, d’un côté, les forces du bien, représentées par Youssef Chahed -ces forces, fortes de l’appui populaire et international, ne se soucient que de l’intérêt supérieur du pays-, de l’autre, les forces du mal, représentées par les mafias politico-financières nidaistes et nahdhaouies, lesquelles, au nom de la légalité électorale et de leur poids dans le Parlement, cherchent à gagner le maximum de temps pour protéger leurs intérêts et bloquer tous les projets du gouvernement.
Des arbitrages ?
La solution réside dans la qualité de l’arbitrage qui sera assuré, normalement, par trois parties transversales et non partisanes. Il y a tout d’abord l’arbitrage du président de la République qui peut calmer le jeu et donner une chance à l’actuel gouvernement l’opportunité de poursuivre son action d’autant plus que ce dernier a été nommé il y a seulement une année et, par conséquent, ne peut pas être évalué objectivement.
Le second arbitrage est un arbitrage dissuasif. Il s’agit de celui de la centrale syndicale qui, par la forte mobilisation de ses troupes, peut mettre le holà.
Il y a enfin l’arbitrage des bailleurs de fonds et des partenaires étrangers de la Tunisie, lesquels peuvent intervenir en faveur du gouvernement Chahed car ils n’ont aucun intérêt à ce que la Tunisie soit déstabilisée.
Cela pour dire que tous les ferments sont là pour annoncer une nouvelle configuration politique avec comme toile de fond la cherté de la vie, le mal de vivre, le chômage et un arrière-pays en insurrection permanente et non encadrée. Une insubordination qui risque de se transformer, facilement, en tsunami politico-social qui viendrait tout emporter sur son passage. Et comme le dit si bien ce proverbe belge, “celui qui compte seul peut compter deux fois”.
A méditer !
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