Mettre en place un véritable Etat de droit, capable de veiller sur la bonne application de la loi et sur l’équilibre entre les pouvoirs et de favoriser la lutte contre le népotisme et la corruption, serait la voie pour renforcer la croissance économique et réaliser le développement social intégré. C’est en tout cas ce que pense l’économiste et chercheur en sciences politiques américain, Francis Fukuyama -auteur du célèbre livre “La fin de l’Histoire et le Dernier Homme” et considéré comme l’un des essais les plus importants de la fin du 20ème siècle.
Présidant une conférence intitulée “Renforcer la croissance économique de la Tunisie grâce à la bonne gouvernance: exemples du monde entier”, organisée conjointement par le Centre international pour l’entreprise privée (CIPE) et l’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE), à la Maison de l’entreprise, Fukuyama a aussi souligné que la transition vers un Etat moderne devrait être menée par un leadership politique capable d’opérer le changement et convaincu de la séparation nécessaire entre les intérêts publics et individuels, mais également par des institutions qui veillent à l’application des règles de la transparence et une société civile qui défend et favorise cette orientation.
L’économiste américain évoque notamment les expériences ukrainienne et géorgienne, au sein desquelles la lutte contre la corruption était un facteur déclencheur de révolutions sociales, soulignant qu’au-delà de ses aspects techniques qui ont une grande importance, la lutte contre la corruption est essentiellement politique. Laquelle lutte ne pourrait, toujours selon lui, aboutir, qu’en présence d’une force politique interne et réelle, œuvrant dans ce sens.
Pour avancer sur cette voie et mener à bien sa transition économique, la Tunisie pourrait, selon lui, s’inspirer des expériences des autres pays et recevoir des conseils techniques de la part de ses partenaires, mais elle a besoin d’une modélisation intérieure et d’une vision interne du changement.
Adhérant aux propos de l’économiste américain estimant que les transitions ne réussissent qu’à travers la construction d’un Etat moderne et fort, l’application de la loi et la mise en place d’une justice performante, offrant au secteur privé et l’investissement privé les conditions d’action, de création d’emploi, de richesses, et de croissance, l’ancien ministre de l’Equipement, Hedi Larbi, dira que “la transition politique en Tunisie semble évoluer dans la bonne voie, mais les conditions de la construction d’un Etat moderne et de l’application de la loi sont toujours loin d’être réunies”.
Larbi considère par ailleurs que “la transition tunisienne doit, de ce fait, se concentrer sur ces éléments et se retourner parallèlement vers les réformes économiques profondes et d’ordre institutionnel, loin de la logique des petites réformes qui semble prévaloir”.
L’ancien ministre indique aussi que “la lutte contre la corruption n’est qu’un élément de la réforme et ne doit donc pas être traitée à part. Le jour où la loi sera appliquée, la corruption disparaîtra d’elle-même. A défaut, elle restera toujours plus forte que le système lui-même”.
Exhortant la société civile à contribuer à la définition d’une politique économique efficace et à identifier les réformes à engager, à l’instar de sa contribution à la transition politique, Larbi pense que la Tunisie a toutes les chances de réussir, étant donné qu’elle possède toujours des fondamentaux solides qui ont pu jusque-là lui garantir une certaine résilience.