Le député Nadhir Ben Ammou a déclaré, mardi 26 septembre, que le projet de loi sur la réconciliation administrative qui a été adopté par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) “est susceptible de perturber le processus de transition démocratique et de consacrer l’impunité en violation des dispositions de la Constitution”.
La version du projet de loi adopté outrepasse toutes les étapes de la justice transitionnelle, qu’il s’agisse de dévoiler la vérité, de demander des comptes, de réparer les préjudices et de parvenir à la réconciliation, estime Ben Ammou, lequel a démissionné du groupe parlementaire d’Ennahdha au lendemain de l’adoption, par l’ARP, du projet de loi sur la réconciliation administrative.
Intervenant lors d’une la conférence organisée par l’Ordre national des avocats de Tunisie sur le thème “La loi de réconciliation administrative et le processus de la justice transitionnelle”, Nadhir Ben Ammou a attiré l’attention sur l’absence dans ledit projet de loi d’un mécanisme pour dévoiler la vérité sur les infractions commises après la suppression de la Commission de réconciliation telle que prévue dans la première version du projet présenté par la présidence de la République en 2015.
Le député Mondher Belhadj Ali (bloc Patriotique), ui au contraire, soutient le projet de loi sur la réconciliation administrative, rappelant que 40 députés ont présenté à l’Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi (IPCCPL) des réponses aux recours déposés par les députés de l’opposition contre ledit projet.
Les députés ont décidé d’adopter le projet de loi sur la réconciliation administrative afin de respecter les délais légaux du dépôt des recours, a-t-il argumenté, estimant qu’il n’est plus permis de bloquer les affaires des fonctionnaires et cadres arrêtés, conformément à l’article 96 du code pénal sur la corruption des fonctionnaires.
S’agissant de l’avis consultatif préalable du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) concernant le projet de loi, Belhadj Ali a indiqué que le Parlement avait sollicité l’avis du CSM et adressé quatre correspondances en ce sens. Mais le conseil a proposé de “suspendre l’adoption du projet de loi pour l’examiner dans les meilleures conditions”. Une réponse “inacceptable” pour le député qui a jugé qu’un report de l’examen du projet de loi à une 3e session parlementaire n’était pas envisageable.
Réagissant aux accusations portées au projet de loi sur la réconciliation administrative qui encouragerait la corruption, le député du bloc Patriotique a cité l’article 2 dudit projet de loi. Ce dernier stipule que les articles 82 et 96 du Code pénal ne sont pas applicables aux fonctionnaires publics ou assimilés tant que l’avantage n’est pas procuré à eux-mêmes mais à des tiers.
L’article 96 du Code pénal stipule: “Est puni de dix ans d’emprisonnement et d’une amende égale à l’avantage reçu ou le préjudice subi par l’administration tout fonctionnaire public ou assimilé (…) qui use de sa qualité et de ce fait se procure à lui-même ou procure à un tiers un avantage injustifié, cause un préjudice à l’administration ou contrevient aux règlements régissant ces opérations en vue de la réalisation de l’avantage ou de préjudice précités”.
Mondher Belhadj Ali précisera que “les corrompus seront exclus des procédures de réconciliation”, appelant l’Instance Vérité et Dignité à vérifier la véracité des documents présentés par les personnes concernées par la réconciliation administrative.
A l’ouverture de la conférence, le bâtonnier Ameur Merherzi a réaffirmé la position de l’Ordre national des avocats qui “rejette catégoriquement” le projet de loi sur la réconciliation administrative du fait qu’il “consacre l’impunité et perturbe le processus de justice transitionnelle” qui, selon lui, constitue “le meilleur moyen de parvenir à la réconciliation nationale”.
Ont pris part à la conférence plusieurs députés : ceux qui ont attaqué le projet de loi sur la réconciliation administrative pour inconstitutionnalité et ceux qui l’ont défendu.
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