L’Etat tunisien doit reprendre d’urgence son autorité, son prestige et montrer sa détermination. Le gouvernement a été porté au pouvoir pour gouverner et non pour subir le chantage des extrémistes traduit sur le terrain par des actions malveillantes de mercenaires et de voyous qui brûlent, saccagent les biens publics et agressent toute bonne volonté qui essaye de leur barrer la route.
La Troïka a longtemps abusé de sa légitimité usurpée pour faire tout et n’importe quoi. Par une légitimité tirée de ses propres interprétations des textes, la Troïka a fait durer, contre vents et marées et surtout contre la volonté du peuple tunisien, la mission de l’Assemblée nationale constituante (ANC) 3 ans au lieu d’une année annoncée lors de son élection. Trois ans qui ont coûté à la Tunisie des milliards de dinars, fait passer son endettement extérieur de 25 à 70% de son PIB. Tout ce temps et cette fortune pour écrire une Constitution qui aurait pu être bouclée en six mois.
Chacun sait que les trois années étaient nécessaires non pour écrire la Constitution mais pour faire d’autres projets non avouables.
Aujourd’hui les institutions ont une vraie légitimité, provenant des urnes, qui a porté les élus au pouvoir. Qu’attendons-nous pour faire valoir ce mandat qui puise sa légitimité des vœux de la majorité du peuple tunisien ? De qui et de quoi avons-nous peur ? Attendons-nous 2019 et la fin du mandat actuel pour voir le pouvoir à nouveau entre les mains des extrémistes ?
N’ayez aucun doute que si les extrémistes ont la légitimité des urnes en 2019, le peuple tunisien progressiste et libéral regrettera de ne pas avoir joui de son mandat pour gouverner pleinement entre 2014 et 2019.
Réagissons, réveillons-nous de cette hypnose qui nous plonge dans ce sommeil léthargique avant qu’il ne soit trop tard. Le temps ne joue pas en faveur des libéraux progressistes. Aucun parti républicain progressiste ne pourra prendre la suite de “feu“ Nidaa pour avoir une majorité lui permettant de gouverner.
La réussite des grands dirigeants réside dans leur capacité de voir loin, de préparer l’avenir et notamment la transition du pouvoir dans des conditions pacifiques loin du K.O en protégeant le pays, le peuple et la société.
Cher président BCE, en 2014 la majorité du peuple tunisien (enfants, femmes et hommes), vous a fait confiance en vous portant avec conviction et détermination sur leurs épaules au plus haut poste de l’Etat, à la tête de la présidence de la République à Carthage. Entre temps, le parti qui a rassemblé le peuple qui vous a porté au pouvoir a perdu sa crédibilité et son âme. Depuis 2014, la division s’installe et s’aggrave de jour en jour chez les démocrates.
Nous craignions fort que devant l’affaiblissement du front démocrate modéré, l’affrontement que nous avons jusque-là évité depuis 2014 avec les extrémistes ne soit qu’une partie remise que nous risquons de vivre avec les élections municipales de mars 2018 et celles, encore plus importantes, les législatives et présidentielle de 2019.
Nos élus de 2014 qui ont abandonné les locaux des bases du parti Nidaa dès l’annonce des résultats des élections sont-ils conscients que 2019 se jouait déjà dès le lendemain de celles-ci ? Qu’a-t-on fait depuis ? Quel avenir nous promettez-vous tous pour demain ?
Je ne peux pas conclure sans interpeller nos amis et nos partenaires étrangers.
Qu’attendez-vous pour tenir vos promesses et aider la Tunisie à consolider sa démocratie ? Si les démocrates tunisiens aujourd’hui aux commandes ne font rien de bon d’ici la fin de leur mandat en 2019, le pouvoir risque de retourner chez les extrémistes.
L’avenir de l’Europe dépend aussi de celui de la Tunisie.
Nous sommes tous sur le même bateau. Si la Tunisie coule l’Europe sera éclaboussée.
A bon entendeur salut !
Hakim Tounsi