Lotfi Brahem, le ministre de l’Intérieur, a appelé à la constitution d’une commission mixte représentant les ministères de la Défense, de la Justice, de l’Intérieur ainsi que la Commission de la législation générale de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), afin d’apporter des amendements au projet de loi réprimant les atteintes aux agents porteurs d’arme.
S’exprimant devant la presse au terme de son audition devant la commission de législation générale sur ce projet de loi, le ministre a indiqué que son département reste ouvert aux composantes de la société civile pour discuter du projet de loi. “Nous n’allons pas retirer le projet de loi mais nous allons nous ouvrir sur les différentes propositions pour son amendement faites par les députés et les organisations”, a-t-il précisé.
Lors de son audition, Lotfi Brahem a incité toutes les parties concernées à présenter des alternatives légales au projet de projet ou accepter un consensus sur sa formule actuelle, déclarant comprendre les appréhensions des composantes de la société civile sur certaines de ses dispositions.
Les députés ont émis des critiques sur le contenu du projet de loi, certains se prononçant même à son retrait et sa refonte. Sabrine Gobantini (bloc national) a estimé à cet égard qu’il “porte atteinte dans plusieurs de ses articles aux droits et libertés énoncés par la Constitution”.
Pour Hassan Amari (bloc de Nidaa Tounes), le projet de loi est important pour la protection des agents porteurs d’armes, suggérant toutefois la suppression du chapitre II portant sur les crimes contre les secrets de la sûreté nationale “qui porte atteinte aux libertés des citoyens et peut être interprété de manière erronée”.
De son côté, Naoufef Jammali (Bloc d’Ennahdha) a précisé que le projet de loi a été soumis à la Commission de législation générale au lieu de la commission des droits et libertés qu’il préside, sur une décision de l’ARP. “La philosophie du projet de loi dégage une appréhension du corps sécuritaire à l’égard des citoyens et cherche une protection vis-à-vis d’eux”, a-t-il estimé, tout en appelant à sa nouvelle reformulation pour “assurer un principe républicain dans la relation entre citoyens et agents de sécurité”.
Mourad Hemaidi (Bloc du FP) a estimé que les dispositions du projet de loi auraient été acceptées s’il avait été débattu en 2011 “lorsque l’appareil sécuritaire était ciblé matériellement et moralement et avait été rendu responsable (des actes) du régime déchu, mais un tel traitement de nos jours vis-à-vis du projet n’a pas de justification”.
Soulevant l’ampleur pris par la violence chez les Tunisiens qui cible tous les secteurs tels l’enseignement, la santé et les institutions sécuritaires, il s’est interrogé s’il “faut promulguer des lois en faveur de ces secteurs pour réprimer les atteintes dont ils font l’objet ou s’employer seulement à atténuer le niveau de la violence et de la criminalité en hausse en général”.
Répondant aux interpellations, le ministre a réitéré l’ouverture de son département à toutes les initiatives et propositions pour améliorer le contenu du projet de loi, mettant en avant des données et des statistiques qui “justifie sa présentation par l’autorité concernée”.
“Le département de l’intérieur a enregistré 5 mille plaintes pour atteinte aux agents de sécurité de 2015 à 2017 alors que 36 agents ont été atteints par des tirs à la chevrotine en intervenant pour mettre fin à des querelles tribales durant la même époque, 53 postes ont été attaqués et 624 véhicules endommagés, outre la déposition de 1031 plaintes pour menaces contre des agents de sécurité ou leurs familles”, a fait valoir le ministre pour soutenir le projet de loi.
Lotfi Brahem a souligné la nécessité de conforter le moral des forces de sécurité afin de “pouvoir s’acquitter au mieux de leur mission, veiller avec abnégation à la sécurité des citoyens, des institutions, des biens publics et privés, d’autant qu’elles consentent de grands efforts lors des différentes manifestations et dans leur travail quotidien”.