La décision de l’Union européenne d’inclure la Tunisie dans la liste noire des 17 pays considérés comme étant des paradis fiscaux et devant être soumis à des sanctions par les pays membres de l’UE a été suivie en Tunisie par un déferlement de réactions, commentaires et coups de gueule contre les responsables qui ont clairement failli dans la gestion de ce dossier.
Ci-après la réaction de Hassen Zargouni:
Trois (3) enseignements au moins de ce classement en tant que “paradis fiscal” :
1- On a été très longtemps alerté, on ne pensait pas qu’ils allaient le faire, c’est un acte très longuement discuté et muri au sein des instances européennes (souvenons-nous du discours de Sarkozy, alors ministre du Budget, à l’hémicycle en désignant directement la Tunisie comme étant un paradis fiscal à bannir, car menaçant l’industrie de confection française en utilisant le cas de son frère Guillaume Sarkozy président de la Fédération textile au sein du Medef…). On a manqué de réactivité. On a manqué de continuité dans les négociations. L’administration en charge de ce dossier a failli.
2- La Tunisie a perdu beaucoup de terrain en termes d’influence au sein de l’Europe (le Maroc a réussi avec ses multiples canaux de lobbying à faire retirer son nom de la liste in extremis, grâce à ses liens entretenus avec la France notamment, grâce aux Français de Marrakech propriétaires de leurs biens immobiliers, grâce aux Marocains juifs installés en France, grâce aux Français nés au Maroc, grâce au réseau des golfeurs… ainsi que d’autres networks pas forcément avouables… mais toujours bien entretenus.
Bref, on ne pèse plus aussi lourd qu’avant (souvenons-nous de Romano Prodi quand il était président de la Commission européenne, qui nous a promis une intégration quasi totale à l’Europe il y a 15 ans exactement, le tout sauf avoir des représentants à Strasbourg). Notre poids diplomatique n’étant plus ce qu’il était au sein des instances européennes ni au niveau bilatéral (quid de nos relations personnelles avec la France nouvelle de Macron? De l’Allemagne? Ou de l’Italie et de l’Espagne de 2017?). C’est, pour ainsi dire, une situation nouvelle : plus de liens entre gens qui pèsent et au service de la nation.
Les raisons? Des relations entre personnalités à haut niveau de décision ou d’influence cela se construit sur la durée, la confiance est lente à se mettre en place et la nouvelle génération de politiciens, même s’ils ont passé un bout de leur vie non négligeable en Europe, ils n’ont pas capitalisé sur cette présence pour entreprendre un lobbying actif en faveur de leur pays d’origine, la Tunisie.
Conséquence immédiate : On ne pèse pas lourd dans les grandes décisions en Europe et partout dans les grands groupements régionaux (Asie du Sud, Amérique du Sud, et même au sein du continent africain).
3- La décision de l’Union européenne doit être perçue comme une leçon pour nous autres Tunisiens, une leçon pour travailler plus, travailler mieux, pour une fiscalité juste, mais surtout faire plus preuve de solidarité entre nous malgré les dissensions politiques qui paraissent futiles au regard des attaques extérieures à la réputation de notre pays, relégué au rang de pays paria, ce qui est évidemment injuste.
Assez d’invectives entre gauchistes et libéraux, assez d’insultes entre modernistes et conservateurs, assez d’accusations à l’emporte-pièce entre gens du passé et nouveaux politiciens. Assez !
Nous sommes à l’image de deux personnes tombées au fond d’un puits et qui se disputent alors qu’elles risquent toutes les deux de ne plus en sortir !
Au boulot Tunisiens de tous bords !
Retroussons nos manches pour un pays qui produit, qui crée de la richesse, un pays souverain et fort par ses hommes et femmes et le fruit de leurs labeurs.
Non, on ne reçoit pas de leçons des autres, de l’extérieur surtout qu’il a visiblement tort. Mais tirons les bons enseignements en ces temps difficiles ensemble et d’une manière constructive.
Walakom sadid ennadhar.
PS : Concrètement ce n’est pas un problème de fiscalité tunisienne, c’est parce qu’on n’a pas participé au système d’échange des informations fiscales (mené par l’OCDE et le GAFI).