Thèse de doctorat de Mohamed BELHAJ : «Plateforme de management de projets de collaboration Université-Industrie dans le contexte recherche et développement en Tunisie» (Partie introductive -1)

Mohamed BELHAJ a soutenu le 25 novembre 2017 sa thèse de doctorat en sciences de gestion, sous la conduite du professeur Anis JARBOUI sur le thème: «Plateforme de management de projets de collaboration Université-Industrie dans le contexte recherche et développement en Tunisie».

Introduction Générale

1.1- Introduction

Dans une perspective de contextualisation du sujet présent et des travaux de recherche effectués, nous tenons à signaler dans cette introduction les raisons et les motivations qui nous ont amené à étudier la collaboration entre l’Université et l’Industrie dans le domaine de la recherche et du développement en Tunisie.

Nous allons ainsi introduire le contexte général de la collaboration Université-Industrie à travers l’énoncé des problèmes majeurs de cette thématique.

Nous présentons également, les objectifs ainsi que la structure de cette thèse.

1.1.1 La collaboration Université-Industrie : impact et contexte général

Malgré l’abondance de la littérature et un certain nombre d’études de cas, de nombreux projets de collaboration entre l’Université et l’Industrie échouent. Les raisons souvent citées pour les échecs sont les différences significatives dans les objectifs et les motivations de chacune des deux parties prenantes (Etzkowitz, 2014, Franco et Haase, 2015).

Alors que les chercheurs universitaires sont souvent motivés par la reconnaissance au sein de la communauté scientifique, ils se concentrent beaucoup plus sur la recherche fondamentale et la publication des articles scientifiques, facteurs indispensables d’avancement dans le grade (Perkmann et al., 2013), les Industriels s’intéressent à la recherche appliquée et ils sont fortement motivés par la commercialisation de nouveaux produits et par la génération d’un gain financier (Parmar et al., 2010).

D’autre part, la collaboration peut générer des ressources de financement pour l’Université (Patil, 2012 ; Etzkowitz, 2003) tout en améliorant la qualité de la recherche (Philbin, 2008 ; Dooley et Kirk, 2007 ; Lee et al. 2010).

En collaborant avec l’industrie, les chercheurs peuvent tester et mettre en application leurs travaux théoriques (Arza, 2010), accéder à des ressources et des équipements de pointe (Bozeman et Slade, 2013). Ils peuvent également développer des idées innovantes pour des futures recherches (Tartari et Breschi, 2012 ; Guan et Zaho, 2013 ; Scandura, 2016).

Cet intérêt pour les collaborations que nouent les universitaires et les industriels tient en partie à la généralisation récente des pratiques de la collaboration. Celle-ci prend en réalité des formes très diverses, formelles ou informelles (Guenther et Wagner, 2008 ; Hemmert, Bstieler et Okamuro, 2014).

Les retombées économiques, sociales et technologiques de la collaboration Université-Industrie (CUI) et leurs impacts importants sur la croissance économique des pays ont généré de nombreuses études réalisées au cours des dernières années à travers le monde (Mitive, 2009 ; Bozeman et al., 2012 ; Freitas et al.2013, Kruss, Visser, Zhao et Wu, 2017).

L’Université et l’Industrie sont les deux piliers les plus importants dans le Système national d’innovation (SNI), dans lequel les deux parties prenantes doivent collaborer pour produire des biens et des services nouveaux, ainsi que des sources de financement (Slimane et Ramadan, 2017).

Toutefois, la Tunisie semble avoir échoué en termes de dynamique de développement de son Système national d’innovation (Casadella et al., 2015).

Par ailleurs, son SNI a montré sa fragilité suite à la crise mondiale. Cette situation soulève des questions sur les causes de cet échec.

En fait et comme le montre l’évaluation du SNI, la dégradation et le recul constatés au cours des dernières années au niveau des aspects liés à l’innovation et à la R&D relèvent de plusieurs types de dysfonctionnements.

1.1.2 L’évaluation du Système national d’innovation en Tunisie

Selon l’OCED 2016, l’efficacité d’un Système National d’Innovation repose essentiellement sur la performance des principaux acteurs (entreprises publiques et privées, institutions d’enseignement supérieur, organismes publics de recherche et structures d’interfaçage) intervenant dans l’exécution de la R&D, l’innovation et les interactions entre eux.

Les résultats de la récente étude d’évaluation du SNI en Tunisie, réalisée par l’Agence nationale de la promotion de la recherche (ANPR) en 2015, révèlent une performance mitigée de la Tunisie en matière d’innovation et de R&D.

L’analyse du SNI a mis en évidence une superposition de blocage et de dysfonctionnement à plusieurs niveaux.

D’une part, malgré la mise en place des structures, des institutions de recherche, de financement et de diffusion de l’innovation, il existe un réel manquement au niveau de la coordination des actions et du suivi des interactions entre les principaux acteurs, demeurant encore discontinus et sporadiques (Slimane, Ramadan, 2017).

D’autre part, selon les rapports annuels sur la compétitivité, réalisés chaque année par le World Economic Forum (WEF), la Tunisie a pris un retard considérable sur les aspects liés à l’innovation et à la collaboration Université-Industrie dans le domaine de la R&D, comme le montre le tableau suivant :

Année 2014 2015 2016 2017
Rang / Pays /144 /140 / 138 /137
Capacité d’innovation 107 109 99 93
Collaboration                 Université-

industrie en R & D

117 116 107 106
Brevets PCT 68 72 76 71

 

Tableau 1 : Le classement de la Tunisie selon l’indice global d’innovation Source :http ://www3.weforum.org

Le classement établi dans ce tableau met en évidence les faiblesses de la Tunisie en matière de capacité d’innovation et d’interaction entre les universitaires et les industriels dans le domaine de la R&D.

Ainsi et afin de renforcer la collaboration Université-Industrie et dynamiser l’interaction entre les principaux acteurs du système d’innovation, la Tunisie devrait améliorer la gouvernance de son SNI, investir plus et mieux dans la R&D, pour rattraper de la sorte le retard enregistré.