Etant appliqué pratiquement dans tous les pays du monde, l’open sky est inévitable et la Tunisie ne peut s’y soustraire, d’où la nécessité de l’appréhender comme une opportunité et non pas comme une menace. Il pourrait, toutefois, avoir des impacts négatifs si des stratégies d’accompagnement ne sont pas mises en place. C’est ce qu’a fait souligner le président de la Fédération tunisienne des agences de voyage (FTAV), Mohamed Ali Toumi, dans une interview accordée à l’agence TAP.
Selon lui, l’accord final de l’Open sky sera probablement signé, d’ici le printemps 2018, rappelant que la Tunisie et l’Union européenne (UE) ont paraphé, le 11 décembre 2017, un protocole d’accord marquant la fin des négociations concernant l’ouverture des cieux.
“En tant que FTAV, nous ne pouvons que soutenir l’open sky. Pourtant, les agences de voyage, notamment celles qui travaillent dans le domaine de la billetterie seront gênées par ce mécanisme, sachant que les compagnies low cost travaillent sans passer par les agences. 90% des activités de ces compagnies sont effectuées à travers internet et 10% via les centres d’appels”, dit-il.
Dans ce cadre, il estime que l’agent de voyage doit s’adapter aux changements et ne pas se contenter du rôle d’intermédiaire, pour aller vers l’Open data, le package dynamique et devenir “un architecte de voyage”.
Des études ont démontré que l’open sky favorise une croissance entre 2 et 3% du PIB, la création d’emplois et une visibilité de la destination tunisienne, d’autant que certains pays européens ne connaissent pas la Tunisie, a-t-il poursuivi.
Abondant dans le même sens, Kamel Ben Miled, directeur général de l’avion civile, souligne lui aussi que les avantages de l’open sky sont nombreux, dont l’augmentation des entrées en devises et la croissance de la navigation aérienne.
Le consultant en transport aérien, Habib Ben Slama, insiste néanmoins, pour sa part, sur l’impératif de restructurer le transporteur national Tunisair.
Revoir la stratégie touristique pour tirer profit de l’open sky
Selon Toumi, suite à l’ouverture des cieux une nouvelle catégorie de touristes visitera la Tunisie, dont ceux qui cherchent le court séjour et la découverte ainsi que les étudiants à petit budget car si le billet commercialisé par les compagnies low cost ne coûte que 40 euros, le client sera tenté de visiter la Tunisie.
Le ministère du Tourisme doit se préparer pour accueillir ce nouveau type de clientèle à la faveur d’une stratégie de communication appropriée pour mieux la cibler, car les compagnies low cost transportent des passagers et ne s’intéressent pas aux motifs de leur voyage (touristes ou simples passagers), d’où la nécessité d’établir une stratégie orientée vers l’attraction du plus grand nombre de touristes.
Il s’agit, en outre, de bien se positionner sur internet, en mettant en valeur les sites historiques et culturels de la Tunisie et non seulement les hôtels.
Rendre la Tunisie plus attrayante en valorisant ses musées et sites archéologiques est également un must, a-t-il dit, avançant que l’inscription de certains sites culturels sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) et l’organisation d’événements et de soirées animées par de grandes stars ne peuvent qu’encourager les touristes à venir passer de courts séjours.
A cet effet, une stratégie doit donc être élaborée avec le concours des professionnels, car “il faudrait considérer l’open sky en tant que moyen favorisant l’impulsion du tourisme et non seulement un objectif”.
Pour le président de la FTAV, le transport multimodal (train, bus, métro…) est un challenge à relever afin de faciliter le déplacement des touristes entre les aéroports et les villes ou lieux touristiques. L’objectif, a-t-il soutenu, est de créer une dynamique à travers la construction de complexes, petits restaurants et cafés …autour des sites archéologiques et culturels dans les régions de l’intérieur.
Kamel Ben Miled pense que l’open sky aura des impacts positifs sur la Tunisie et l’économie nationale, dont notamment la croissance rapide de la navigation aérienne qui peut atteindre une variation entre 13 et 15% chaque année, au cours des premières années, et doubler le nombre des voyageurs qui s’établirait à 18 millions de passagers contre 9 millions de passagers actuellement.
L’open sky générera, selon lui, une hausse des entrées en devises, réduira les tarifs pour les Tunisiens, favorisera la connectivité de la Tunisie à d’autres pays, créera de nouveaux emplois (environ 10 mille emplois pour chaque million de passagers additionnels selon les standards internationaux), outre l’incitation à l’investissement.
La libéralisation des services aériens entre les pays européens et la Tunisie, l’amélioration de l’accès au marché tunisien pour les compagnies aériennes ainsi que la réalisation de niveaux plus élevés en matière de sécurité, de sûreté et de protection de l’environnement figurent également parmi les avantages de l’open sky, a souligné Ben Milad.
Au sujet de Tunisair, il a indiqué que la concrétisation du plan de restructuration de la compagnie est en cours, rappelant que le protocole de fin des négociations de l’open sky a déjà exclu l’aéroport de Tunis-Carthage, pendant 5 ans, de l’atterrissage des vols des compagnies low cost afin de préserver l’intérêt du transporteur national et lui permettre de reprendre ses équilibres financiers, en plus de la mise en place des fondements de la concurrence juste.
Restructurer TUNISAIR pour concurrencer les compagnies low Cost
Le consultant en transport aérien Habib Ben Slama a, quant à lui, souligné que la Tunisie ne sera pas épargnée par l’introduction de l’open sky vu qu’elle est déjà engagée dans le système de libre-échange, dont le premier fondement est la mobilité.
Les traités internationaux restent, a-t-il fait remarquer, des systèmes non égalitaires, surtout quand il s’agit d’un accord entre un Etat et une communauté, mais demeurent, toutefois, des accords gagnant/gagnant.
Il a mis l’accent sur la nécessité de bien négocier afin de protéger les intérêts des transporteurs aériens tunisiens, essentiellement Tunisair et Nouvelair, qui ne disposent, actuellement que de 40 avions contre une flotte de 400 avions pour certaines compagnies européennes.
“La compétition sera rude avec ces grandes compagnies qui disposent de coûts moins chers que ceux des opérateurs tunisiens et offrent des variétés de prix”, a-t-il averti.
Redresser, restructurer et mettre à niveau le pavillon tunisien, essentiellement Tunisair, dont la situation “est catastrophique” sont des impératifs. Ces trois actions sont certes nécessaires mais insuffisantes, car par la suite, c’est le savoir-faire qui tranchera, a-t-il dit.
Ben Slama a rappelé que Tunisair a joué un rôle important dans le développement du tourisme, jusqu’en 2010, transportant six touristes sur dix passagers.
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A ce propos, si Tunisair n’est pas restructurée, elle disparaîtra et “c’est la perte du tourisme tunisien”.
Il a pointé du doigt une mauvaise gestion au sein du transporteur national, notamment l’ouverture de nouvelles lignes, en temps de crise marqué, surtout, par un déficit de 200 milliards, allant jusqu’à ne pas pouvoir payer le kérosène.
A signaler que les syndicats de Tunisair ont, lors d’une réunion tenue, le 14 décembre 2017, réitéré leur refus catégorique du Protocole d’accord sur l’Open Sky, affirmant que plusieurs mouvements de protestation seront observés pour dénoncer cette initiative.
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Le secrétaire général de l’union régionale du travail de l’Ariana, Mohamed Chebbi avait déclaré que cette décision unilatérale qui a été prise d’une manière improvisée, menace la pérennité de Tunisair et s’inscrit dans le cadre de la privatisation du secteur public.
Il a mis l’accent sur la nécessité de conjuguer les efforts pour sauver la société dont la situation actuelle ne lui permet pas d’entrer en concurrence avec les grandes compagnies aériennes, rappelant que de vains appels ont été adressés au gouvernement pour restructurer et réhabiliter la compagnie nationale.