La Tunisie vient de remporter une bataille –pas encore la guerre-, en quittant la liste noire pour être classée sur la liste grise des juridictions fiscales “non coopératives” de l’UE. La décision a été prise mardi 23 janvier 2018 et concerne également la Barbade, la Grenade, la République de Corée, la RAS de Macao, la Mongolie, le Panama, la Tunisie et les Émirats arabes unis.
Le communiqué publié par l’Union européenne sur ce sujet reste flou, en ce sens que le Conseil de l’UE explique seulement que “cette radiation de la liste noire a été prise suite aux engagements pris par ces pays pour remédier aux carences identifiées en matière fiscale. Cet engagement a été appuyé par des lettres signées à un niveau politique élevé”.
Dans une interview accordée à nos confrères de La Presse de Tunisie, parue avant la publication du communiqué du Conseil de l’UE, le commissaire européen aux Affaires économiques et à la Fiscalité, Pierre Moscovici, affirmait que «la Tunisie n’avait clairement pas sa place parmi les paradis fiscaux». Mais il a ajouté qu’«il est désormais de la responsabilité des autorités tunisiennes de tenir leurs engagements et de modifier les régimes identifiés dans les délais fixés».
A la question «… En dehors du risque de nuire à une économie qui se débat dans de réelles difficultés, ne pensez-vous pas que cette inscription risque surtout de nuire à la crédibilité de votre sélection, dont sont absents plusieurs pays connus pour être de vrais paradis fiscaux (… et dont certains sont européens !)?», Moscovici dit comprendre “ce sentiment de perplexité“, ajoutant que la Tunisie ne fait pas partie des pays régulièrement cités par la presse dans la longue série des scandales fiscaux“.
Et le commissaire européen d’expliquer un point essentiel: “le listing qui a été effectué va au-delà des usual suspects à partir d’une liste de 92 pays tiers et ne vise pas seulement les paradis fiscaux bien connus, mais aussi des pays dont l’Europe estime que la législation fiscale n’est pas en ligne avec les standards internationaux ou européens. Cet examen approfondi a pris plus d’un an. Des contacts ont été pris dès le début de l’année 2017 pour demander à ces pays des informations sur certains régimes fiscaux, les critères ont été largement communiqués et expliqués, en toute transparence avec les pays tiers concernés“.
Il rappelle que “la Tunisie a transmis ses engagements après la date limite. Les Etats membres n’ont donc pas eu le temps de les examiner et de juger s’ils étaient satisfaisants ou non“.
Et d’ajouter : “… La Tunisie a pris des engagements qui lui ont permis de passer de la liste noire à la liste grise; la balle est maintenant dans son camp pour répondre avec des actes d’ici la fin de l’année, et j’ai toute confiance qu’elle le fera! De son côté, la Commission va continuer à travailler à la mise en place de sanctions pour les pays qui coopèrent le moins et qui resteront sur la liste noire“.
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Moscovici souligne également que “… l’exercice de bonne gouvernance fiscale que mène l’Union européenne ne s’adresse pas qu’à la Tunisie. Son but est d’inciter les pays, partout dans le monde, à supprimer les régimes qui permettent d’attirer de manière artificielle des profits, au détriment des pays européens, de leurs voisins et, bien souvent, des pays qui les reçoivent en renonçant à des recettes. Cette concurrence fiscale est une course à l’échalote où il y aura toujours un pays prêt à baisser ses impôts plus que ses concurrents pour attirer les investissements. Il ne s’agit en aucun cas de détourner les investissements dans l’économie réelle de tel ou tel pays. Tout le monde a à gagner d’une concurrence fiscale plus loyale, l’Europe mais aussi la Tunisie et le reste du monde“.
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