Deux journées chargées, celles que le président français passera en Tunisie du 31 janvier au 1er février. Emmanuel Macron n’en ratera pas une. Une séance pour la signature d’un certain nombre d’accords. Une conférence de presse se tiendra au Palais présidentiel à laquelle seront présents les «aristocrates» des médias tunisiens: ceux exerçant dans le secteur audiovisuel, Pourvu que la couverture soit à la hauteur de cette visite d’Etat de laquelle les deux parties, tunisienne et française, attendent beaucoup.
Le président français sera accompagné d’une grande délégation composée de trois ministres, deux secrétaires d’Etat, de recteurs d’universités françaises, de personnalités du monde culturel et artistique et bien évidemment des présidents de groupes économiques importants et des opérateurs privés.
Un millier de personnes assisteront au forum qui sera organisé au Palais des Congrès par la Chambre tuniso-française et qui sera clôturé par Youssef Chahed, chef du gouvernement et Emmanuel Macron qui y prononcera un discours.
Pour les organisateurs, cette rencontre qui se tient jeudi 1er février représente “un exercice d’échange d’idées dynamique. Un exercice qui permet une réflexion approfondie et une prospection sur le devenir de la coopération et du partenariat bilatéral qui met à contribution chefs d’entreprise, experts et hommes politiques. Il s’agit de représentants de grands groupes français (Airbus, Peugeot Stafim, Valéo, Orange, Avril, AFD…), de chefs d’entreprise français, tunisiens, d’experts du monde de la finance et du numérique, de l’économie et de médias (plus de 200 journalistes accrédités de Tunisie et de France).
Ce forum devrait s’inscrire dans la durée, il doit se tenir alternativement un an en Tunisie et l’année qui suit en France.
De nombreux experts en économie et en finance seront de la partie. Tous animeront les panels de ce forum qui a choisi un slogan qui n’est pas dénué de sens : “Réussir ensemble aujourd’hui et demain“. Le concept adopté se propose d’abord d’entendre le témoignage d’histoires réussies, celles de chefs d’entreprise installées en Tunisie et opérant dans l’industrie, l’agriculture, les finances et le numérique.
Sauf qu’à notre connaissance, le fisc français accentue les pressions sur les entreprises opérant à l’étranger, alors que la France est le premier partenaire de la Tunisie, le premier investisseur (les IDE français représentent en 2017 plus de 45% hors énergie), et le premier client de la Tunisie.
Précisons que les 1.400 entreprises françaises ou à participations françaises emploient environ 138 mille personnes en Tunisie. Quel impact aura la pression fiscale française sur ces entreprises?
Peut-être que les échanges qui auront lieu entre les présidents des deux pays ainsi qu’avec le chef du gouvernement et entre les ministres des deux rives permettront de remettre les relations tuniso-françaises quelque peu secouées ces dernières années sur les rails.
La France a tout intérêt à ce que la Tunisie soit stable sur le plan socio-économique. Alors qu’elle dépense des milliards d’euros en efforts de guerre dans des pays comme l’Irak, la Syrie, ou encore le Mali pour mettre fin à l’expansion du terrorisme djihadiste dans ces contrées, des centaines de millions d’euros pourraient servir la cause du développement économique en Tunisie par l’encouragement de nouveaux investissements. Il n’y a pas si longtemps, avant le 14 janvier 2011, on enregistrait la création chaque année d’une centaine d’entreprises françaises en Tunisie. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Mais d’un autre côté, une Tunisie républicaine, tolérante, ouverte et pacifiste est une garantie sécuritaire pour la France, laquelle est responsable, en grande partie, du désastre libyen sur nos frontières. Une Tunisie où sévit l’extrémisme religieux serait bien évidemment un danger potentiel pour l’Hexagone.
Le président français profitera de cette visite pour faire un tour dans les souks de Tunis, une occasion de découvrir la profondeur civilisationnelle de la Tunisie à travers son artisanat.
Une conférence de presse organisée par l’ambassade de France éclairera le grand public sur les résultats de cette première visite du président Macron en Tunisie.
Les Tunisiens, bien que conscients des efforts consentis par la France pour ce qui est du soutien apporté à leur économie (1 milliard d’euros consacrés par l’AFD sur trois ans) restent persuadés que ce partenaire historique et stratégique peut mieux faire.
Même si les médias français ne ratent pas une occasion d’altérer l’image d’une Tunisie qui, quoique l’on dise, est en train de réussir le pari démocratique au forceps, il n’est pas évident de traiter avec un islam politique qui s’est répandu comme une traînée de poudre.
Mais l’impossible n’est pas tunisien.
Amel Belhadj Ali