J’ai un ami pompiste avec lequel je sympathisais et échangeais des informations sur tout et rien. Un jour je l’ai trouvé déprimé et abattu. Je lui ai demandé pourquoi il est dans cette situation. Il m’a répondu qu’il a décidé de divorcer car il n’en peut plus. J’ai essayé de le raisonner et de lui expliquer que c’est une décision très grave et qu’il a intérêt à réfléchir beaucoup avant de prendre cette décision surtout s’il a des enfants. Il m’a alors informé qu’il a deux enfants et qu’il ne craint rien pour eux pour une raison simple : ce n’est pas lui qui les a enfantés mais c’est Dieu qui les a voulus. “Ce sont les enfants de Dieu”, a-t-il martelé.
Cette histoire de déni de responsabilité parentale m’est revenue à l’esprit parce que, avec le temps et le défilé d’exemples similaires, j’ai constaté qu’elle est loin d’être un cas isolé. C’est hélas un état d’esprit, voire toute une mentalité qui prévaut, particulièrement dans les quartiers populaires et les zones rurales. Deux cas dramatiques méritent qu’on s’y attarde.
Peut-on nourrir 5 enfants avec un revenu de 150 dinars?
Le premier concerne ces mères qui viennent avouer, à la télévision, que ce sont elles qui avaient financé le voyage périlleux de leurs enfants qui émigrent clandestinement dans des embarcations de fortune vers l’Europe et qu’elles sont prêtes à récidiver pour peu que leurs enfants arrivent à bon port. Et lorsque le voyage n’aboutit pas et est marqué par des drames en mer, ce sont ces mêmes mères qui viennent demander à gorge déployée au gouvernement de leur donner des nouvelles de leurs enfants disparus.
Le second cas a trait à un autre drame qui a eu lieu ces jours-ci à Sejnane. Radhia Mechergui, une femme de 44 ans, s’est immolée par le feu, le 17 novembre 2017, devant la délégation de Sejnane (gouvernorat de Bizerte) pour protester contre le retrait du nom de son mari de la liste des bénéficiaires de l’allocation sociale pour les personnes nécessiteuses (150 dinars).
A propos de ce drame, un élément d’information très important a été révélé par l’émission “malam yakol” sur la chaîne privée El Hiwar Ettounsi du 14 décembre 2017. Cette femme dont le mari est invalide est mère de cinq enfants, avec une pension de 150 dinars accordée à son mari jusqu’à 2016 puis retirée parce que son mari avait repris le travail.
L’irresponsabilité familiale, un phénomène de société
Si j’ai rappelé ces trois histoires, c’est tout juste pour attirer l’attention sur cette irresponsabilité parentale qui sévit dans les milieux dits populaires et sur l’enjeu de s’y pencher d’autant plus que cette absence de responsabilité est à l’origine de beaucoup de fléaux que connaît le pays : terrorisme, drogue, braquage, banditisme, crime organisé, économie souterraine, trafic d’armes…
Le mal le plus visible consiste en cette tendance des femmes voire de ces “lapines” à mettre au monde un très grand nombre d’enfants sans avoir les moyens matériels et pédagogiques requis pour les encadrer et en faire des citoyens honnêtes. C’est devenu presque une fatalité, les enfants des quartiers populaires et du monde rural, à défaut d’encadrement familial et social, sont livrés à eux-mêmes, d’où leur penchant suicidaire pour le terrorisme, l’émigration clandestine, la drogue, le gangstérisme…
A ce propos, le sociologue Mohamed Jouli relève que “les problèmes des jeunes délaissés ne sont pas vécus comme de problèmes sociaux mais comme des échecs personnels”.
Pourtant, la responsabilité des parents est ici totale. Ces enfants ne sont pas nés par leur propre volonté. Ils ont été mis au monde par deux cogéniteurs, une femme et un homme. C’est pourquoi, ces derniers doivent être dorénavant responsabilisés par l’Etat.
Responsabiliser avec des moyens dissuasifs les parents
La première démarche à faire serait d’imposer dans tout le pays la planification familiale, une stratégie qui a donné des résultats positifs durant des années. Le planning familial étant “l’ensemble des moyens qui concourent au contrôle des naissances, dans le but de permettre aux femmes et donc aux familles de choisir à quel moment elles auront un enfant”.
La seconde serait de responsabiliser les parents et de leur faire assumer, par des moyens dissuasifs, la bonne éducation de leurs enfants. Les parents doivent rendre compte lorsque leurs enfants interrompent leur scolarité. La Chine n’est parvenue à devenir une grande puissance mondiale que grâce au planning familial.
Quant aux moyens dissuasifs, ils pourraient être de lourdes amendes, des sanctions au travail, la perte d’avantages liés aux transports, aux crèches, à l’emploi, aux allocations de logement ou de santé, l’avortement forcé ou la stérilisation…
Cela pour dire que l’Etat et la société civile, particulièrement les organisations féminines doivent se démener pour encadrer ces femmes qui font semblant de nous faire croire que leurs enfants ne sont pas leurs enfants mais les enfants de Dieu (Jabhom Rabbi).