“Nous avons ras-le-bol des promesses non tenues par le gouvernement qui continue d’ignorer la crise du secteur du cuir et chaussures, malgré tous les cris d’alerte lancés par les professionnels et artisans. Nous avons épuisé tous les recours légaux et éthiques, et sommes prêts à l’escalade comme moyen ultime pour faire entendre nos revendications “, a déclaré Lazher Meselmani, membre de la Chambre nationale des fabricants de chaussures, qui s’exprimait au nom des professionnels du secteur, réunis lundi, au siège de l’UTICA.
Adoptant le même ton alarmiste, le président de la Fédération nationale du cuir et de la chaussure a averti de la menace de disparition de cette industrie, si les difficultés auxquelles fait face le secteur se poursuivent.
Il a à cet effet, rappelé que ces difficultés se résument en la non application des 23 mesures décidées en faveur du secteur lors du conseil ministériel (juin 2017) qui lui a été consacré, la cherté des matières premières, l’ampleur prise par l’importation anarchique et la friperie, la non application du décret n° 95-2396 du 2 décembre 1995, relatif aux modalités d’importation, de transformation et de distribution de la friperie, lequel interdit la commercialisation des chaussures usagées, mais, aussi, la contrebande, la forte imposition menaçant la pérennité des entreprises et la difficulté d’accès au financement bancaire.
Parmi les difficultés, il a aussi, cité le manque flagrant de matières premières en raison de l’exportation anarchique, la non application des mesures douanières relatives au contrôle automatique des opérations d’export et d’import, la détérioration quantitative mais aussi qualitative du cheptel bovin et le manque ou la désaffection de la main d’œuvre.
Akrem Belhaj, a aussi rappelé ” que ces difficultés sont à l’origine de la fermeture de 250 entreprises du secteur depuis 2011, sur un total de 480 unités. Le nombre des artisans a également, considérablement diminué. A Sfax, il y avait plus de 6000 artisans. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 1000 “.
Belhaj a encore, rappelé que les propositions du secteur pour sortir de la crise sont connues et se résument essentiellement, en la mise en application de toutes les mesures décidées par le gouvernement, l’élargissement du champ d’application de la loi n°2005-15 du 16 février 2005, relative à l’organisation du secteur des métiers, aux artisans de la chaussure, l’octroi de micro-crédits aux artisans du secteur à l’instar de ceux octroyés aux agriculteurs et la révision de la loi relative aux franchises.
Il s’agit encore, d’aider les artisans à s’organiser dans des groupements professionnels pour favoriser la commercialisation de leurs produits à l’étranger, de mettre en place des villages artisanaux et une zone industrielle consacrée aux tanneries, de réviser les taxes douanières relatives à l’importation des matières premières et de supprimer les autorisations préalables.
Réagissant aux interventions des professionnels, Samir Rekik, Directeur Général du Textile-Habillement au ministère de l’Industrie, a fait savoir que ” 70% des mesures décidées en faveur du secteur sont entrées en vigueur et que seules celles qui impliquent d’autres départements ministériels nécessitent un peu plus de temps “.
Son intervention a ravivé la tension dans la salle et suscité la colère des professionnels présents qui estiment qu’aucune avancée n’a été effectivement enregistrée en matière d’application des mesures décidées et que les mêmes problèmes persistent toujours.
Il a fallu que des membres du bureau exécutif de l’UTICA à l’instar de Khalil Ghariani et Hamadi Kooli, interviennent en promettant un échange plus sérieux avec le gouvernement sur la question, pour faire baisser d’un cran la tension dans la salle.
Le président de l’UTICA, Samir Majoul est, ensuite intervenu, annonçant ” qu’un rapport détaillé sur la situation du secteur sera élaboré et soumis à la présidence du Gouvernement pour accélérer la solution de sa crise “.
Majoul qui, selon ses dires, était lui aussi, un professionnel du secteur avant de fermer son entreprise à cause des problèmes évoqués, a exhorté les professionnels présents à ne pas perdre espoir et à batailler pour sauver leur secteur, face à l’économie parallèle qui sévit dans le pays et à conserver leur marché local.
Il a également considéré qu’à l’instar des efforts déployés pour soutenir les entreprises publiques, l’Etat devrait mettre en place les mécanismes à même de soutenir les entreprises privées en difficultés et empêcher leur disparition.
Le président de l’UTICA a dénoncé la forte imposition des entreprises à laquelle a recours le gouvernement, pour résoudre ses problèmes financiers estimant que ” le secteur privé est prêt à soutenir l’Etat mais pas en lui donnant de l’argent qui sera à son tour injecté dans des entreprises publiques peu productives et qui sont parfois la source du blocage “.